Eglises d'Asie

Un théologien indien assigne des tâches nouvelles à la théologie asiatique

Publié le 18/03/2010




Le 12 mai dernier, lors d’un forum patronné par le Service de documentation et d’études (Sedos), en marge du synode d’Asie, le P. Felix Wilfred, théologien indien, ancien secrétaire de la Commission théologique de la FABC, membre du Comité de direction de la revue Concilium, s’est prononcé pour une transformation complète des méthodes et du style de la théologie en Asie. Celle-ci doit devenir l’instrument d’une Eglise soucieuse d’apporter sa contribution à la transformation des sociétés d’Asie, affrontées à des défis sociaux, moraux et économiques sans précédent. La théologie doit aider les Eglises en Asie à entreprendre une révision complète de leurs conceptions et de leur approche du monde.

Seule une théologie capable de prendre en compte les transformations actuelles et les défis qu’elles représentent pour l’engagement chrétien peut constituer une force capable de protéger et de promouvoir la vie, cette vie dont Jésus a dit qu’il était venu l’apporter en abondance. Tout autre type de théologie, a précisé le P. Wilfred, risque bien d’apparaître comme une simple curiosité historique. La théologie conçue en ce sens devra intégrer dans sa réflexion les problèmes soulevés par la mondialisation, le communautarisme, la marginalisation des groupes sociaux les plus fragiles, les violations des droits de l’homme, autant de courants et mouvemenst sociaux qui contribuent à modeler la physionomie actuelle de la société asiatique, une société marquée aujourd’hui de surcroît par une double crise économique et écologique.

Le théologien indien a ensuite concentré son analyse sur la nature et les effets en Asie du phénomène de mondialisation. Bien que quelques-uns de ses aspects soient positifs, il a surtout contribué à repousser les villages d’Asie à la périphérie de la vie nationale et à éliminer la diversité des cultures au profit d’une culture uniforme. Le modèle de développement imposé par le courant de mondialisation épuise les ressources naturelles, favorise un système de valeurs orienté sur le profit, la concurrence et la consommation. Les effets négatifs de la mondialisation ont été supportés par les catégories de statut le plus précaire, à savoir les femmes, les paysans, les travailleurs, les réfugiés, les minorités ethniques. Par ailleurs, la mondialisation a trouvé dans les Etats des complices qui ont utilisé ses forces et son idéologie pour renforcer leurs pouvoirs et mépriser la démocratie.

Selon le P. Wilfred, si l’on veut apporter une réponse à l’actuelle crise sociale qui sévit en Asie, il est indispensable de mettre en cause le modèle de développement imposé en Asie à la faveur de la mondialisation, modèle qui a provoqué la paupérisation de millions de personne, détruit un peu partout l’nvironnement et dépouillé de nombreuses personnes de leurs droits. Une forme alternative de développement, a-t-il affirmé, doit être recherchée, une forme plus humaine et plus adaptée au génie de l’Asie, qui renforcera la confiance en soi des peuples. Ce nouveau modèle devrait opposer à l’individualisme engendré par la mondialisation une authentique communauté respectueuse de la pluralité et de la laïcité. Les lois du marché et les exigences du capîtal ont transformé les peuples en objets et les Etats en idoles. Le nouveau modèle de développement devrait permettre aux population de recouvrer leur individualité et de créer un espace pour la société civile.

Dans sa conclusion, le théologien a affirmé que si l’Eglise ne peut évidemment répondre à la totalité des défis que lui pose son temps, elle doit, du moins, cheminer avec les divers peuples d’Asie, auxquels elle peut apporter d’importantes contributions.