Eglises d'Asie

Les autorités civiles et les responsables d’Eglise se réjouissent du succès des fêtes du deuxième centenaire de Notre Dame de La Vang

Publié le 18/03/2010




Après les fêtes du deuxième centenaire de La Vang qui ont été célébrées du 13 au 15 août dernier, c’est un sentiment général de satisfaction qui prévaut chez les deux parties impliquées dans ces événements, à savoir l’Eglise catholique et les autorités civiles. Il faut dire que leur inquiétude avait été forte et très perceptible durant la période précédant les fêtes. Du côté gouvernemental, on redoutait que le pèlerinage ne soit accompagné de manifestations politiques. Cette crainte s’était manifestée avec éclat lors de l’intervention du secrétaire général Lê Kha Phiêu le 5 mai dernier (7), intervention au cours de laquelle il avait annoncé que la participation des fidèles serait limitée pour de prétendues raisons d’économie. Auparavant, des mesures concrètes de divers types avaient été prises pour tenter de dissuader les Vietnamiens de l’étranger de venir trop nombreux aux fêtes de La Vang (8). Du côté de l’Eglise catholique, les craintes concernaient la façon dont le gouvernement réaliserait ses menaces. Dès le mois d’octobre 1997, le responsable du bureau politique avait mis en garde la Conférence épiscopale, et lui avait demandé de donner aux fêtes du centenaire un caractère régional plus que national (9). Plusieurs fois, cette restriction avait été renouvelée. L’Eglise n’avait jamais accepté de voir ainsi limitée la portée du centenaire. Une lettre signée du cardinal et de l’archevêque de Huê avait souligné le caractère national de ces fêtes qui devaient être celles de toute l’Eglise du Vietnam (10).

En fin de compte, les craintes se sont révélées sans objet. Les fêtes se sont déroulées conformément à l’idéal des activités religieuses si souvent proclamé par le bureau des Affaires religieuses: elles ont satisfait les exigences religieuses aussi bien que profanes: Tôt doi dep daoLe gouvernement s’est réjoui de voir que la religion n’avait pas été utilisée à des fins réactionnaires. Le quotidien du Parti communiste, le Nhân Dân, du 17 août, a été obligé de distribuer les félicitations: au diocèse de Huê, pour la soigneuse préparation de la fête, aux autorités locales pour l’attention qu’elles ont portée au déroulement du pèlerinage, et, enfin, aux fidèles, pour la discipline dont ils ont fait preuve. Selon le Nhân Dân, du dimanche 16 août, une joyeuse atmosphère a régné durant toutes les cérémonies.

Pour sa part, l’Eglise, comme l’a affirmé l’archevêque de Huê, a vu ses voeux comblés au-delà de toutes ses espérances. Malgré de nombreuses tentatives des autorités pour dissuader les catholiques de participer au pèlerinage, celui-ci s’est révélé être une manifestation de l’Eglise du Vietnam toute entière et non pas d’un seul diocèse. L’Eglise du Vietnam était là, toute entière. Selon un reportage paru dans la presse locale (11), les pèlerins étaient venus de toutes les régions du Vietnam, beaucoup en cars, quelques-uns par d’autres moyens de transports individuels. La plupart étaient d’ailleurs arrivés quelques jours avant le début des festivités. Avant de se rendre sur les lieux, un grand nombre d’entre eux avaient fait étape à Huê où ils avaient demandé asile dans les églises, les établissements religieux et les divers couvents.

Au début de l’après-midi de la première journée des fêtes, le 13 août, sous un soleil torride, plus de 100 000 personnes se pressaient déjà autour du sanctuaire, un chiffre repris par les envoyés des journaux locaux et des agences de presse internationales, venus à La Vang au nombre de cinquante. Les symboles du caractère national du rassemblement se sont multipliés dès cette première journée. Derrière le drapeau de la Vierge s’avançant en tête de la première procession vers l’autel, on a pu voir se succéder 25 autre étendards symbolisant les 25 diocèses du Vietnam, chacun d’eux accompagné d’une jeune fille portant un écriteau où était inscrit le nom du diocèse. Plus encore, l’intérêt de l’Eglise universelle pour cette manifestation fut mis en évidence dès l’ouverture de la célébration, par la lecture d’une lettre du pape (12) adressée à l’ensemble des fidèles du Vietnam. Cette impression fut renforcée le lendemain à l’arrivée du cardinal Pham Dinh Tung venu présider la traditionnelle procession, en qualité de légat du pape. Une lettre de Jean-Paul II confiant cette mission à l’archevêque de Hanoi fut lue en public et le Nhân Dân du 14 août a précisé que la mission confiée au cardinal l’avait été sur proposition du Vatican et avec l’accord du gouvernement vietnamien“.

La représentation des diocèses du Vietnam fut encore plus forte pour la messe du 15 août concélébrée par une bonne partie des évêques du Vietnam et environ 300 prêtres. Le nombre des fidèles qui avait encore augmenté a été estimé à 150 000. L’assemblée couvrait non seulement le terre-plein où se déroulait la cérémonie mais s’étendait encore au delà des chemins qui le bordaient. Après les foules rassemblées au Nord-Vietnam, lors du voyage du cardinal Etchegaray en 1989, l’assemblée réunie à La Vang fut sans doute une des plus nombreuses de l’histoire récente de l’Eglise du Vietnam (13).

L’origine du pèlerinage de La Vang remonte à la fin du 18ème siècle. En 1798, à l’époque des Tây Son, une persécution très sévère déclenchée par le roi Canh Tinh avait poussé les chrétiens à se rassembler pour prier en cachette dans un vallon, seule surface défrichée dans l’immense forêt qui s’étendait alors à l’ouest de Quang Tri. Réunis autour d’une statue de la Vierge posée sur la branche d’un imposant banian, les chrétiens demandaient consolation et forces à celle qu’ils appelaient “La Mère”. A la fin du 19ème siècle, une église était construite sur les lieux, remplacée par une plus grande en 1923. C’est en 1901, sur la décision de Mgr Caspar, évêque de Huê, que fut établie la coutume de rassembler un congrès marial à La Vang tous les trois ans. Ce congrès eut lieu régulièrement sans interruption jusqu’en 1978, année où il ne put avoir lieu à cause de la situation. Mais en 1981, Mgr Nguyên Kim Diên, archevêque de Huê, convoqua à La Vang les fidèles du diocèse qui, malgré les menaces policières, se rendirent nombreux auprès de la Vierge, accompagnés de chrétiens venant de toutes les régions du Vietnam.