Eglises d'Asie – Vietnam
Un projet de décret sur la religion est proposé à la discussion
Publié le 18/03/2010
Le dernier article du nouveau projet précise que celui-ci remplace le décret 69/HDBT (20). C’est en effet le décret qui était en vigueur depuis le 21 mars 1991, date de sa publication. En réalité, la réglementation des activités religieuses contenue dans le document actuel apporte peu de changements par rapport au précédent projet. Les premiers articles concernant la liberté de croyance et de non croyance n’ont pas évolué. Par contre, la subordination des activités religieuses aux intérêts supérieurs du pays, à l’indépendance nationale et aux grandes priorités du Parti, semble avoir été largement accentuée.
Cependant, l’originalité du nouveau projet réside dans l’analyse gouvernementale des institutions religieuses. Tout en s’efforçant quelquefois à plus de finesse, le projet de décret s’est appliqué à faire entrer toutes les grandes formations religieuses du pays dans un même cadre. Si l’on analyse la suite des articles, on s’aperçoit qu’ensemble, ils constituent un instrument qui rend compte à sa façon, une façon sociologique, de toutes les grandes familles religieuses en activité dans le pays.
La catégorie la plus générale est constituée par ce que le document appelle “organisation religieuse”, terme qui est quelquefois synonyme d’Eglise, un mot plus rarement employé ici que dans d’autres documents. C’est, par exemple, le terme “organisme religieux” qui est utilisé pour décrire d’une manière voilée les rapports de l’Eglise catholique du Vietnam avec l’Eglise universelle. En effet, il est dit, à l’article 28, que “…les organisations religieuses légales à l’intérieur du pays doivent demander l’autorisation des autorités civiles avant de mettre en oeuvre les orientations religieuses émanant d’organisations religieuses à l’étranger. Si ces orientations sont en désaccord avec la législation de l’Etat, avec les coutumes traditionnelles de la nation, elles ne doivent pas être réaliséesMais le terme peut signifier aussi des réalités religieuses plus restreintes, comme les diocèses, les paroisses, ou encore les mouvements religieux. Ces organisations doivent avoir reçu l’autorisation de fonctionner du Bureau des Affaires religieuses, suivre des orientations religieuses correctes et de progrès.
Ces organisations religieuses regroupent, en leur sein, deux types de personnes. D’un côté, se trouvent les fidèles dont il est peu parlé. Ils ne sont mentionnés que dans deux des 38 articles que comprend le présent décret. Ils sont définis par leur possibilité de prier et de pratiquer le culte, soit dans leurs propres maisons (le culte des ancêtres), soit dans des lieux autorisés pour cet usage, à savoir les lieux de culte. La deuxième catégorie de personnes qui composent une “organisation religieuse” sont, selon notre document, les “chuc sac“, terme qui, dans le caodaïsme, désigne les membres du clergé, en quelque sorte les ecclésiastiques, et les “Nha tu hanh“, terme traditionnellement employé par le bouddhisme pour signifier ceux qui embrassent la vie religieuse. La majorité des articles du projet de décret s’attarde à décrire la nature de cette catégorie de personnes, à énumérer leurs droits et leurs devoirs. Ce sont des citoyens comme tous les autres, affirme l’article 11, avec les mêmes devoirs et les mêmes droits civiques que les autres (article 12). De plus, ils sont spécialisés dans la religion. En cette qualité, ils sont sévèrement contrôlés par la loi. Ils sont formés par l’Eglise, en conformité avec la loi, dit le texte du projet, ordonnés, nommés, déplacés avec l’approbation du gouvernement. De plus, en tant que clercs, ils ont une charge politique : ils doivent mobiliser la population selon les lignes politques du moment.
Mais cette analyse des groupements religieux reste le seul élément nouveau du décret. Aucune solution n’est donnée à plusieurs problèmes brûlants évoqués. Ainsi, l’article 21 qui mentionne les propriétés d’Eglise confisquées par l’Etat est plutôt en recul par rapport à un certain nombre de réponses précédentes du gouvernement (21). Les propriétés soi-disant “offertes” lors du changement de pouvoir en 75 seront gardées par l’Etat. Quant aux autres, si la confiscation a été exécutée en vertu d’une ligne politique du gouvernement, elles restent propriétés d’Etat. La directive de juillet promettait de donner une solution au problème de la maison d’édition, réclamée depuis longtemps par l’Eglise. Or, comme le décret précédent, l’actuel projet renvoie à la loi en vigueur, sans dire que celle-ci, approuvée par l’Assemblée nationale, le 7 juillet 1993, ne laisse aucune place aux maisons d’édition privées.