Eglises d'Asie

UNE ECONOMIE DE JUSTICE ET UNE EGLISE ENGAGEELe rôle de l’Eglise dans la crise économique asiatique

Publié le 18/03/2010




Introduction

1 – Nous, les participants au Forum “La crise économique en Asie et le rôle de l’Eglise”, nous sommes réunis à une centaine environ, à l’université jésuite de Sogang et dans la paroisse internationale catholique de St François, à Séoul du 24 au 29 Août 1998.

2 – Ce forum s’est réuni à l’initiative du mouvement international catholique pour les affaires culturelles et intellectuelles (ICMICA-Pax Romana) et l’Institut de théologie Woori (WTI) de Séoul soutenu par la communauté des femmes catholiques coréennes pour un nouveau monde (KCWC), le comité catholique pour les droits de l’homme en Corée (CHRC) et la société coréenne pour la solidarité internationale et la démocratie participative (PSPD), afin de réfléchir sur la crise économique asiatique qui commença avec l’effondrement du baht thaïlandais en juillet 1997 et s’étendit rapidement à d’autres pays d’Asie orientale et du sud-est, donnant lieu à des banqueroutes, du chômage et à un appauvrissement sur une grande échelle.

3 – Nous sommes des laïcs, des religieux, des prêtres et des évêques, membres de l’Eglise et membres d’organismes non gouvernementaux (ONG) et autres issus de la société civile, originaires de la région Asie-Pacifique (particulièrement des pays les plus touchés par la crise, Thaïlande, Corée et Indonésie). Nous nous sommes réunis avec des collègues d’Europe et d’Amérique (des Etats-Unis et du Mexique).

4 – De par notre engagement chrétien nous avons l’obligation de :

-analyser la nature et la cause de la crise;

-de les juger du point de vue de notre réflexion théologique sur les enseignements de Jésus et des enseignements sociaux de l’Eglise chrétienne dans le dialogue avec les messages sociaux des autres Eglises et les traditions libératrices des autres religions asiatiques, en nous concentrant sur les expériences des victimes de la crise;

– de proposer des moyens qui nous permettent d’agir contre les structures de ce mal social.

5 – Au début de nos délibérations nous avons été encouragés par les paroles de l’évêque auxiliaire de l’archidiocèse de Séoul, Mgr Peter U-Il Kang, à la messe d’ouverture. Il a parlé de la vie dans les bâtiments qui dépendent de la cathédrale, là où chaque jour il y a des manifestations de gens qui sont subitement devenus chômeurs, et n’ont aucune alternative. Il a cité les paroles du pape Jean-Paul II dans “Sollicitudo Rei Socialis“: “Il faut dénoncer l’existence de mécanismes économiques, financiers et sociaux qui, bien que manipulés par des gens, fonctionnent souvent presque automatiquement, accentuant ainsi la richesse de quelques-uns et la pauvreté des autres” (n.16).

Voir la crise à travers les yeux des victimes

6 – Au début de notre forum nous avons cherché à situer nos discussions dans la réalité vécue par les victimes de cette crise économique. Par petits groupes nous avons rendu visite :

– à des groupes de travailleurs faisant face à des licenciements sans compensation ou prime de départ;

– à un abri financé par l’Eglise presbytérienne de Corée pour les travailleurs migrants au chômage, dont la plupart seront expulsés, alors que le reste espère une reprise économique;

– à la confédération des syndicats coréens (KCTU), et à un centre pour travailleuses au chômage qui propose des conseils, des informations, des soins et d’autres aides.

-à des squatts de pauvres urbains qui habitent dans des logements de fortune, sans adresses, situés sur des terrains en friche aux environs de la ville;

-à des sans-abri en colère et désespérés autour de la gare de Séoul, et dans un parc public, qui sont aidés par des anglicans, des bouddhistes et d’autres oeuvres caritatives.

7 – Cette expérience de rencontre avec les victimes de la crise asiatique nous a aidés à comprendre ses conséquences humaines et à les regarder à la lumière de la réalité pratique.

Analyse des structures de la politique économique globale et de son impact sur l’Asie

8 – Nous avons remarqué qu’alors que la crise économique entrait dans sa deuxième année, les économies qui ont souffert n’ont pas encore touché le fond. Comme l’Amérique latine et l’Afrique dans les années 80, l’Asie de l’Est fait face à une débacle qui pourrait durer une décennie, sinon plus. En outre, la menace de la dépréciation des monnaies, qui a d’abord touché certains pays, s’est étendue à un plus grand nombre dans la région.

9 – La crise actuelle doit être analysée dans le contexte de la globalisation de l’économie de type néo-libéral pratiquée maintenant. Les mécanismes clés de cette globalisation sont négociés par une coalition d’intérêts internes et externes (politiques, institutions financières, leaders de groupes industriels, intellectuels) issue de pays développés ou en voie de développement, avec presque aucune participation de la société civile, y compris des Organisations non gouvernementales.

10 – Nous comprenons qu’il y a eu des facteurs internes contribuant à la crise, sous forme d’investissements excessifs dans l’immobilier et dans les actions en bourse, des systèmes bancaires faibles, de mauvaises politiques gouvernementales, du clientélisme, etc. Il est important, cependant, d’analyser ces facteurs dans le contexte de la dérégulation financière qu’entreprirent les économies asiatiques dans les années précédentes. Le FMI (Fonds monétaire international), la Banque mondiale et les gouvernements du G-7 (des principaux pays industrialisés) ont constamment poussé les autorités financières asiatiques à libéraliser leurs comptes de capitaux et à ouvrir leur secteur financier encore plus à la participation étrangère. Il y avait peu de régulations sur les mouvements de capitaux dans les pays qui acceptèrent l’idéologie néo-libérale du FMI, et peu d’expérience précédente de gestion de tels afflux massifs de capitaux. Ainsi les capitaux étrangers n’allèrent pas au secteur productif de l’économie (comme l’agriculture et l’industrie) mais à la Bourse, au financement de la consommation et, tout particulièrement, à l’investissement immobilier. La même libéralisation des comptes de capitaux qui facilita des afflux massifs de capitaux, n’avait pas de mécanismes pour ralentir le départ de ces fonds quand les banques et les investisseurs décidèrent de les rappeler. La même dérégulation du marché permit aux spéculateurs sur les monnaies de faire des profits sur les retraits des investisseurs nationaux et étrangers, de spéculer sur les monnaies locales et ainsi d’aggraver les fuites de capitaux.

11 – La globalisation financière a sérieusement affecté le rôle de l’Etat-nation, puisque la souveraineté du contrôle et de la régulation est transférrée à des organismes inter-gouvernementaux. En même temps, il est demandé à l’Etat de la transparence et d’être politiquement responsable.

12 – Le FMI est un des organismes qui a incité à la libéralisation des comptes de capitaux dans les économies asiatiques. Dans ses programmes de stabilisation à l’usage des pays touchés par la crise, le FMI continue à pousser à la totale libéralisation financière, ignorant l’évidence que ce sont les mouvements incontrôlés de capitaux qui ont provoqué la crise. Les effets de cette crise ont été aggravés par les programmes du FMI, conduisant à des récessions catastrophiques dans les économies de Corée, de l’Indonésie et de Thaïlande. Mesurés en terme de baisse de production, banqueroutes de banques et de compagnies, les coûts sont énormes. Mesurés en termes de chômage, de millions de personnes passant sous le seuil de pauvreté, les coûts sont encore plus terribles. Même ceux qui ne sont pas d’acccord avec tous les aspects de notre analyse doivent accepter les impératifs moraux qui naissent des effets dévastateurs de cette crise.

13 – La société civile naissante dans ces économies profondément affectées d’Asie commence à exercer son rôle en collaboration avec plusieurs réseaux d’ONG de types divers. Elles essayent de comprendre la crise, de répondre aux besoins les plus immédiats des victimes et de proposer des alternatives à différents niveaux où se rencontrent la politique et l’économie.

14 – Nous avons aussi noté l’impact de la crise, et de la restructuration menée par le FMI, sur les secteurs les plus vulnérables de la société – le secteur rural (les fermiers, les pêcheurs, etc), les travailleurs indépendants, les travailleurs à contrats temporaires, les vendeurs ambulants, etc.., l’environnement (l’érosion, la pollution des rivières, des forêts des marais, etc). De plus, la crise a appauvri davantage les population les plus pauvres de la région, mais elle a aussi créé de nouveaux pauvres dans les rangs de la classe moyenne.

15 – La crise a révélé que les femmes d’Asie sont plus gravement affectées à cause de leur position inégale dans la société et de leur rôle très circonscrit. Les femmes sont les premières à être licenciées et ont moins accès aux mesures d’aide, telles que le crédit et les aides aux chômeurs. La crise occasionne une féminisation accrue de la pauvreté, du chômage et des migrations, ainsi qu’une aggravation des mauvais traitements et de l’instrumentamisation des femmes. Si avant la crise, les femmes pauvres étaient les plus touchées par la discrimination, avec la crise du FMI, les femmes des classes moyennes commencent à ressentir aussi une discrimination. (Nous estimons que les femmes, le secteur rural et le secteur des petits emplois sont des ressources pour répondre à la crise et y survivre et que leur contribution doit être reconnue).

16 – La crise actuelle a annulé les réductions de pauvreté qui étaient en cours pour beaucoup de gens dans la région. Les aspirations à améliorer leur qualité de vie ont tourné au cauchemar de l’insécurité de l’emploi et de la subsistance, à la perte de leurs maisons, etc. Un avenir de pouvoir politique, d’affirmation culturelle ayant pour base un pouvoir économique grandissant, ont été remplacés par la honte et l’incertitude, et par la peur d’un nouveau colonialisme. Ce n’est pas un avenir acceptable.

17 – Au forum de Séoul nous avons évalué l’impact du programme du FMI sur la situation des différents pays, c’est à dire l’Indonésie, la Corée du Sud et la Thaïlande. Nous avons aussi eu l’occasion de comparer l’expérience du Mexique qui a connu des processus d’ajustements structurels depuis dix-sept ans.

18 – Les mesures, y compris les emprunts à des organismes supranationaux, ont eu, pour l’Indonésie, la Corée du Sud et la Thaïlande, des effets dévastateurs à tous les niveaux, particulièrement sur les pauvres, et ont donné le contrôle aux marchés globaux qui sont dominés par des multinationales géantes.

19 – Nous avons entendu des exposés montrant les effets de la crise dans ces trois pays et nous avons remarqué que les situations étaient, dans l’ensemble, similaires, sauf qu’en Indonésie la mise en oeuvre des mesures prescrites par le FMI devinrent l’occasion de troubles sociaux et politiques dirigés contre le régime autoritaire de Suharto.

20 – La leçon que nous avons pu retirer de l’expérience du Mexique est qu’après une aussi longue période d’ajustements structurels, alors que le PIB s’est amélioré depuis deux ans, les salaires des travailleurs ont perdu de leur pouvoir d’achat, et le nombre de ceux qui sont en dessous du seuil de pauvreté a augmenté de moitié, jusqu’à constituer les deux tiers de la population.

La crise parmi les travailleurs et les pauvres – Ateliers thématiques

21 – Après ces présentations il y eut un certain nombre d’ateliers de réflexion pour considérer les effets de la crise sur certains groupes et dans des domaines spécifiques, notamment les fermiers, les pêcheurs, l’environnement, les pauvres des villes et les travailleurs, surtout les migrants et les femmes. D’autre part, les ateliers considérèrent la réponse de l’Eglise au niveau diocésain et de la paroisse, par les commissions “Justice et paix”, par le renouveau et la restructuration de l’Eglise et dans le dialogue oecuménique et interreligieux.

22 – Au cours de ces discussions, nous avons remarqué qu’il y avait eu des déclarations significatives de quelques conférences d’évêques en réponse à la crise, mais qu’il reste encore beaucoup à faire par les commissions Justice et paix et à tous les niveaux de l’Eglise. Celle-ci a un rôle prophétique pour exprimer la solidarité avec le peuple dans sa recherche de solutions alternatives et pour répondre aux besoins humains des gens qui sont dans cette crise. Nous avons trouvé qu’il y a un appel clair pour que les priorités pastorales de l’Eglise passent d’un cléricalisme patriarcal aux besoins actuels des laïcs et à une ouverture vers une plus grande coopération interreligieuse. En outre, l’Eglise est appelée à agir pour la protection des droits des travailleurs et pour les aider à s’organiser.

En discernant les signes des temps – Kairos

23 – Conscients de la riche tradition de réflexion éthique, particulièrement des enseignements sociaux, de l’Eglise catholique, nous attendons le développement de ces enseignements à tous les niveaux de l’Eglise pour que soit prise en compte la nouvelle situation de globalisation de l’économie. Cette évolution devrait prendre racine dans les expériences pratiques des Eglises locales, devrait prendre en compte la perspective laïque et intégrer les expériences vécues des chrétiens.

24 – Nous voyons qu’à l’avenir le développement des enseignements sociaux catholiques devra mettre plus l’accent sur la valeur de la solidarité qui maintenant a une perspective globale. Il devra aussi renforcer la compréhension du droit de tous à la propriété, un droit qui doit être reconnu et devenir effectif si les gens, individuellement ou dans des communautés locales, doivent atteindre un degré d’indépendance proportionné à leur dignité. Ce droit est depuis longtemps reconnu par l’Eglise, qui dénie, à tout individu ou corps constitué, le droit de propriété qui exclut les autres de toute possibilité d’accéder, même à un niveau modeste, à la propriété. Les enseignements de l’Eglise devraient développer cette vision en se référant à l’expansion continuelle du contrôle économique des multinationales, des traités internationaux, tels que l’Accord multilatéral sur les investissements (AMI) qui est en cours de négociation dans l’OCDE (Organisation pour la coopération économique et le développement), et aux pratiques courantes de prises de brevet sur les savoirs traditionnels des peuples indigènes et des ressources bio-génétiques.

25 – La globalisation est un défi à la morale mais aussi à la théologie. La crise actuelle en Asie est pour nous un temps de conversion, de vérité, et de grâce (kairos) :

– Un temps pour discerner dans la lumière de la foi biblique de l’Exode et de la bonne parole de Jésus. Quels sont les enjeux?

– Un temps pour être convertis en nous demandant: quels sont nos styles de vie et nos modèles de développement?

-Un temps pour dénoncer: avons-nous joué notre rôle de chrétiens et dénoncé les idoles – l’argent, le marché considéré comme un absolu, etc.?

-Un temps pour dire: avons-nous donné l’exemple d’un nouveau monde basé sur la solidarité en présentant des alternatives au présent?

-Un temps pour reconnaître et accueillir l’Esprit de Dieu spécialement présent dans les pauvres, les femmes, et les cultures et religions d’Asie.

26 – Cette kairos de la crise asiatique nous est révélée à la lumière de l’année du Grand Jubilé, l’an 2000, qui nous invite à rendre de nouveau vivantes les forces des enseignements et de la vie du Christ pour critiquer le présent et construire un nouvel avenir.

27 – Pour vivre cette kairos nous avons besoin d’une nouvelle spiritualité communautaire et personnelle. L’Eglise s’efforce de vivre une spiritualité de désencombrememnt de soi (kenosis) et de service suivant le modèle de son maître, le Crucifié, tout en étant consciente de ses fréquents échecs par ses alliances avec les pouvoirs en place et le triomphalisme. Elle apprend à entrer en dialogue avec les pauvres du monde (spécialement ceux de l’Asie) et avec les cultures des peuples asiatiques, avec un respect profond. Elle enlève ses chaussures humblement devant les autres religions parce qu’elle reconnaît la présence et l’action de Dieu en elles. Les participants du forum de Séoul n’ont pas d’autre approche que celle qui est offerte par ce triple dialogue. Ils écoutent la voix de l’Esprit qui provient du buisson ardent de l’Asie, de ses luttes, de ses angoisses, de sa douleur, de son espérance (spécialement celle de ceux qui n’ont aucun pouvoir et sont exclus). Ils y discernent leur engagement actif dans la solidarité avec les peuples de religions différentes, mais de bonne volonté pour le service de tous dans l’amour. C’est dans cet esprit de fidélité créatrice au Dieu de vie et de justice tel qu’Il s’est révélé en Jésus-Christ, et dans l’engagement vis-à-vis de notre peuple que nous avons réfléchi à la crise actuelle en Asie.

28 – Nous devrions adopter la ligne de conduite “d’être plus” plutôt que celle “d’avoir plus”

Un programme d’actions de solidarité

29 – Compte tenu de la crise économique asiatique, il faut une restructuration fondamentale des Institutions financières internationales. Les propositions ci-dessous ne sont pas exhaustives, elles ne représentent pas non plus un programme systématique de réformes, ce sont des actions concrètes que nous pouvons entreprendre immédiatement.

a -Nous prenons la résolution d’engager et de soutenir des campagnes contre les initiatives du FMI pour qu’il modifie sa politique de soutien à la libéralisation complète des comptes de capitaux. Il s’agit d’une action irresponsable de la part du FMI.

b -Nous prenons la décision d’engager et de soutenir des campagnes contre les autres accords multilatéraux, régionaux, et bilatéraux existants (tels que l’Organisation mondiale du commerce (OMC), l’AMI, l’interdiction du contrôle des capitaux de l’Organisation nord-américaine de libre échange (NAFTA) etc.), qui visent à libéraliser davantage les flux de capitaux sans les réglementations et obligations appropriées vis-à-vis des investisseurs. Le contrôle sur les transactions de capitaux doivent être maintenus.

c -Nous sommes décidés à soutenir la mesure qui consiste à faire payer aux bailleurs de fonds et aux investisseurs leur part des coûts. Quand une crise survient et qu’un renflouement intervient, dans la phase de récupération d’emprunts étrangers impossibles à honorer, les gouvernements ne devraient pas en garantir le remboursement. Cela constitue un injuste fardeau pour les contribuables, spécialement pour les pauvres, alors que cela protège les intérêts de banques étrangères irresponsables et de leurs débiteurs.

d -Nous sommes décidés à soutenir les mesures qui aboutiront à l’effacement de la dette extérieure pour les pays à faibles revenus. La santé, l’éducation et d’autres nécessités de base de certains des peuples les plus pauvres du monde sont compromis pour que les gouvernements puissent effectuer des paiements sur une dette qui ne peut jamais être remboursée. La campagne du Jubilé 2000 (qui est une campagne de pétition internationale appelant à la suppression de la dette extérieure des pays les plus pauvres) appelle aussi à prendre des mesures pour éviter la réapparition de ce genre de dette à l’avenir.

e -Nous décidons de soutenir les mesures consistant à abandonner le Programme d’ajustement structurel (SAP). Nous soutenons par exemple le schéma africain alternatif pour la transformation socio-économique et d’autres initiatives similaires en Asie, en Amérique latine et aux Antilles.

f -Nous sommes décidés à soutenir des programmes de rétablissement économique qui veulent agir immédiatement pour proposer et mettre en place des filets de sécurité sociaux pour les plus touchés par la crise. Ces plans devraient se concentrer particulièrement sur les secteurs les plus vulnérables de la société tels que les femmes, les enfants, les travailleurs indépendants, les populations rurales et indigènes, la nouvelle classe moyenne urbaine menacée par la pauvreté, etc. Des représentants de ces groupes doivent participer au développement de ces programmes.

g -Nous sommes décidés à soutenir des mesures de bons gouvernement, ayant des références correctes aux droits de l’homme qui nécessitent la transparence et la responsabilité, de la part des gouvernements et des institutions internationales.

h -Nous sommes décidés à établir des liens de réseaux avec des ONG telles que Réseau-Tiers monde, “Consumers InternationalEurorad, la Coalition pour le Jubilé 2000, Foodfirst, FIAN, la Fondation internationale pour le progrès rural, Bankwatch, “Cinquante ans, c’est assez” et d’autres organisations pour partager des idées et collaborer à des campagnes et à du lobbying.

i -Nous sommes décidés à soutenir les efforts pour contrôler les transferts de capitaux spéculatifs à court terme grâce à des mesures telles que la proposition de taxe Tobin, taxe sur les transferts financiers internationaux.

Un programme de renouvellement de l’Eglise

30 – En constatant les profondes souffrances des victimes des pratiques économiques qui causèrent la crise actuelle en Asie, il est important pour l’Eglise d’Asie, en solidarité avec l’Eglise universelle, de s’engager à répondre aux divers défis, en commençant par notre propre changement, basé sur une vision critique de notre attitude, de notre mentalité et de nos valeurs.

a – Nous incitons les Eglises d’Asie à examiner leurs structures et leur orientation pastorale dans le contexte de cette crise économique. Nous pensons que la participation des laïcs devrait être effective à tous les niveaux, y compris à celui des prises de décisions; qu’il devrait y avoir moins d’importance donnée à l’administration et plus aux préoccupations pastorales; et que, dans certains pays, il devrait y avoir un investissement moindre dans l’immobilier et un investissement plus grand dans les gens et dans leurs besoins.

b -Nous incitons les Eglises d’Asie à jouer un rôle de contrôle, de protection et de promotion des droits de l’homme pour ceux qui sont affectés par la crise économique asiatique, en particulier ceux qui ont perdu leur emploi et les sans-abri, en les aidant à organiser la protection et l’amélioration de leurs droits et leur dignité.

c -Nous demandons aux Eglises du monde industrialisé d’être solidaires des Eglises d’Asie. Dans ce contexte nous sommes en accord avec le message final du Synode des Eglises d’Asie qui disait: “Nous appellons les différentes Eglises du monde industrialisé à être solidaires avec les pauvres d’Asie, à se faire leurs avocats auprès de leurs propres gouvernements et auprès des institutions économiques mondiales telles que la Banque Mondiale et le FMI et l’Organisation mondiale du Commerce, pour arriver à ce que le pape Jean-Paul II a appelé cette année dans son message pour la journée mondiale de la paix: “La globalisation sans la marginalisation. La globalisation dans la solidarité

d -Nous demandons au Conseil pontifical pour la justice et la paix de développer des positions personnelles, dans toutes ses activités et particulièrement en préparant ses rencontres avec le FMI et la Banque mondiale en vue de discussions sur la dette extérieure des pays pauvres, ceci après avoir dialogué avec les ONG et les gens de terrain qui travaillent sur la question de la dette et dialoguent avec les personnes en difficulté.

e -Nous demandons à la Fédération de la Conférence des évêques d’Asie (FABC) d’envoyer une délégation au FMI et à la Banque mondiale pour discuter l’impact de leur politique sur les peuples d’Asie, spécialement sur les pauvres, leur demandant de réviser la nature de leurs interventions et de changer les conditions qu’ils imposent. Nous demandons à la FCEA d’inviter les autres leaders religieux à se joindre à eux dans ce dialogue avec les institutions financières internationales.

f -Nous demandons à la FABC et à tous les groupes catholiques laïcs, organisations et mouvements de promouvoir la campagne pour le Jubilé 2000 à travers l’Eglise d’Asie.

g – 1-Nous demandons aux conférence épiscopales nationales d’Asie de préparer des lettres pastorales ou d’autres réponses à la crise économique asiatique et aux injustices qui en découlent, dans la lumière des enseignements sociaux catholiques et dans le dialogue avec les victimes. Les laïcs, spécialement les femmes

et les ONG concernées devraient être représentées dans le processus d’élaboration de ces documents. Ce principe de consultation ouverte devrait être appliqué à la formulation de la politique et des documents de l’Eglise à tous les niveaux.

2-Nous demandons aux conférences épiscopales d’Asie d’établir une commission pour les femmes, comme il y en a pour le travail, la justice et la paix, etc. Les femmes, à cause des souffrances dues à la crise économique, aggravées par la discrimination qui les frappe, ont besoin d’un canal officiel pour exprimer leurs besoins et pour participer au dialogue sur l’amélioration de la situation.

h -C’est pourquoi nous demandons que la conscience des injustices socio-économiques et les stratégies pour y remédier deviennent et demeurent une part importante des préparations et des célébrations de l’an 2000 pour le Grand Jubilé, aussi bien au niveau de l’Eglise universelle qu’au niveau des Eglises locales.