Eglises d'Asie

Deux documents émanant des autorités de la province de Ha Giang témoignent de la répression exercée contre le christianisme au sein de la population h’mong

Publié le 18/03/2010




Deux documents publiés dans une revue vietnamienne de la diaspora (12) sont venus illustrer la répression exercée aujourd’hui sur les communautés protestantes évangéliques, comme d’ailleurs sur tous les chrétiens, dans la région de Hà Giang, province située à la frontière de Chine (13). Ils témoignent tous deux de la volonté délibérée des autorités civiles d’interdire toute conversion au christianisme chez les minorités ethniques de cette région montagneuse. Le premier est une lettre envoyée le 27 juin 1997 par le président du Comité populaire de la Province à un certain nombre de familles lui ayant auparavant fait parvenir une demande de conversion au protestantisme. Le second est un formulaire à remplir et à signer par la population, dans lequel le signataire s’engage à un certain nombre d’attitudes et de comportements dans le domaine de la religion. L’impression du document est datée de 1998.

La lettre du premier responsable de la province de Ha Giang se présente comme une réponse à onze familles H’mong du village de Lung Ngoa ayant présenté aux autorités locales une demande officielle d’adhésion au protestantisme (Dao Tin Lanh). La lettre commence par rappeler le respect de la liberté de croyances qui est la règle de conduite du Parti et de l’Etat. C’est en vertu de ce principe, ajoute la lettre, que personne ne peut forcer ceux qui traditionnellement pratiquent une religion reconnue par l’Etat à l’abandonner. L’inverse est vrai : personne ne peut forcer ceux qui traditionnellement ne pratiquent aucune religion à suivre telle ou telle religion.

Puis vient, dans la lettre, l’énoncé, pour le moins étrange, de l’application du principe exposé plus haut. En vertu de ce respect de la liberté religieuse de la population h’mong où, selon l’auteur de la lettre, jamais personne n’a suivi de religionil est interdit d’inciter les H’mongs à se convertir. Plus encore ceux-ci doivent refuser d’adhérer à n’importe quelle religion, car cela ne fait pas partie de leur tradition.

Il est ensuite fait mention de deux catégories de “pervers” (ke xâu) qui, dans les années récentes, ont utilisé la liberté de religion pour mener des activités de conversion au sein de la population h’mong : les “Kitô” (littéralement, les chrétiens), et les “Tin lanh” (les protestants). Le résultat le plus évident de ces conversions aurait été la rupture de l’unité traditionnelle dans le village dans les familles. A cela s’ajouterait une plus grande pauvreté et des déplacements de population préjudiciables au bien-être général. En conclusion, il est demandé à la population d’utiliser le droit que leur donne l’Etat de ne suivre aucune religion.

Le deuxième document se présente sous la forme d’un formulaire destiné aux habitants du district de Bac Mê, dans la province de Ha Giang. Après avoir inscrit un certain nombre d’éléments de son identité et confirmé qu’il a pris connaissance d’une liste de textes et circulaires émanant des autorités régionales et concernant la religion, le signataire du formulaire doit prendre trois engagements précis concernant ses activités religieuses. Il promet de ne pas participer à des études en vue d’adhérer au protestantisme et s’engage à revenir à la religion traditionnelle des H’mongs. Il fait serment d’intervenir auprès de ses compatriotes du village et de la commune pour qu’ils n’écoutent pas les protestants et ne procèdent pas à des déplacements illégaux. Il promet encore de faire des rapports aux autorités concernant ceux qui continuent à propager la religion et de dénoncer les prédicateurs venant de l’extérieur. En dernier lieu, le signataire affirme savoir que s’il contrevient à ces engagements, il en supportera les conséquences devant la loi.

Au mois de janvier dernier, la revue de droit (Phap luât) publiée officiellement à Hanoi a donné des renseignements sur la répression exercée contre les adeptes du protestantisme évangélique dans la province de Hà Giang. La revue se disait préoccupée par les nombreuses conversions ayant lieu, aujourd’hui, au sein des minorités ethniques de la province de Hà Giang. La revue rapportait encore qu’un détachement militaire spécial a été mis en place pour “régler” le problème de “l’évangélisme religieux illégal” (14).