Eglises d'Asie

La création d’une branche népalaise du Shiv Sena risque d’accentuer les difficultés des catholiques

Publié le 18/03/2010




C’est avec une certaine appréhension que les catholiques du Népal ont appris la prochaine installation dans leur pays du groupe hindou militant Shiv Sena (Armée de Shiva), dont l’implantation principale est en Inde, dans la région de Bombay. Ils craignent que la venue chez eux de ce groupe extrémiste ne contribue à exacerber les problèmes qui sont déjà les leurs à l’intérieur du royaume hindou. Les propos entendus lors d’une conférence de presse tenue le 5 janvier à Kathmandou pour annoncer officiellement la création d’une branche népalaise de l’Armée de Shiva n’ont pas été pour les rassurer : « Nous nous opposons résolument aux conversions et nous ne tolérerons pas les institutions qui se servent des privilèges de notre société et s’allient à des communautés étrangères pour s’opposer à l’hindouismeaffirmait un communiqué de presse lu à cette occasion et signé du président de l’Armée de Shiva pour le Népal. Par ailleurs, un député népalais, cité par le « Kathmandu Post », a déclaré à la même occasion que l’Armée de Shiva au Népal s’inspirerait de l’idéologie mise en oeuvre par l’association indienne du même nom, dirigée par Bal Thackeray (7).

Bien qu’un certain nombre de passages du communiqué visent les musulmans en priorité, les chrétiens sont inquiets à l’idée que les activités de l’Armée de Shiva, qui est un allié du principal parti pro-hindou, le BJP, dans la coalition au pouvoir en Inde, ne viennent rendre encore plus difficiles les relations entre hindous et chrétiens. Pour ces derniers, le problème le plus délicat actuellement est constitué par l’enregistrement annuel obligatoire auquel sont soumises les ONG. Il faut savoir, en effet, que c’est à ce titre d’organisations non gouvernementales que sont présentes au Népal non seulement les associations caritatives catholiques mais aussi la plupart des congrégations religieuses.

Récemment, le ministère de l’Intérieur a demandé aux responsables des 75 districts du pays de refuser l’enregistrement des ONG transférant annuellement de l’étranger pour plus de 500 000 roupies (7 350 dollars). Dans ce cas-là, seuls le ministère de l’Intérieur, le ministère des Finances, le Conseil de coordination du travail social sont habilités à délivrer ce certificat d’enregistrement. Quelques ONG, parmi lesquelles Caritas Népal, ayant renouvelé leur demande depuis plusieurs mois sont toujours en attente de réponse. On pense que ce retard est en rapport avec des transferts d’argent à l’intérieur du pays, effectués par ces ONG. Dans le cas de Caritas Népal, il se pourrait que le délai qui lui est imposé soit dû à une certain nombre de plaintes portées contre l’association caritative après que l’ancien directeur intérimaire de celle-ci eut décidé de ne soutenir que des projets de développement dont le financement puisse être totalement justifié et de ne pas accepter quelques-uns des projets présentés.

Malgré l’appréhension de certains responsables, l’optimisme continue à être de règle en beaucoup de milieux catholiques. Le P. Pius Perimana, curé de la paroisse de Kathmandou, voit dans ces difficultés de renouvellement de l’enregistrement un « bienfait déguisé » forçant les catholiques à devenir plus « sociables » et à multiplier les contacts. « C’est seulement lorsque nous sommes aux prises avec des problèmes de ce type, dit-il, que nous nous démenons pour savoir ce qui se passe« . Le prêtre aujourd’hui multiplie les contacts avec des responsables de districts, des journalistes et même des ministres susceptibles de l’aider.

Le renouvellement de l’enregistrement n’est pas la seule difficulté à laquelle se heurtent les chrétiens au Népal. D’autres problèmes, celui de la citoyenneté, ou encore celui de leurs prétendues relations avec la rébellion maoïste pourraient être exploités par des groupes de pression malveillants. Au Népal, l’obtention de la citoyenneté népalaise est liée à la présentation d’un certificat de citoyenneté du père ou d’un membre de la famille de sexe masculin. Ce qui est quasiment impossible aux catholiques appartenant aux minorités ethniques et constituant plus de la moitié des fidèles de l’Eglise catholique népalaise. La plupart d’entre eux habitant dans le pays depuis des générations n’ont, en effet, aucun papier. Par ailleurs, quelques chrétiens sont soupçonnés d’être en relation avec la rébellion maoïste (8). Certains figurent parmi les quelques 2 000 personnes, suspectes de maoïsme, tuées par les forces armées depuis l’intensification de la répression de la rébellion maoïste entreprise l’année dernière par le gouvernement intérimaire de Girija Prasad Koirala.