Eglises d'Asie

L’évêque de Dili, Mgr Belo, se prononce pour un plus grand dialogue entre Jakarta et les dirigeants politiques de Timor Oriental

Publié le 18/03/2010




L’administrateur apostolique de Dili, Mgr Carlos Filipe Ximenes Belo, dans un entretien avec les médias, le 12 février dernier, s’est livré à un commentaire des propos récemment tenus par le président Bacharuddin Jusuf Habibie, affirmant que l’Indonésie comptait ne plus être embarrassée par le problème de Timor Oriental à partir de l’an 2000. “Si telle est sa position, a précisé l’évêque, j’espère qu’il le déclarera dans un arrêté”.

La phrase citée par Mgr Belo avait été prononcée par le président indonésien au cours d’un entretien avec les membres de la Chambre de commerce indonésienne, le 8 février précédent. Il avait confié à ces derniers qu’il souhaitait que Timor Oriental accède à l’indépendance avant la fin de l’année et qu’ainsi dès l’année suivante l’Indonésie puisse mieux se préoccuper de son développement économique. Nous nous concentrerons sur les 26 autres provincesavait-il ajouté. Seulement deux semaines auparavant, le président Habibie avait pris au dépourvu l’opinion internationale aussi bien qu’intérieure, y compris les leaders de la résistance timoraise, en déclarant que l’Indonésie envisageait d’accorder l’indépendance à l’ancienne colonie portugaise intégrée en 1976, si la proposition d’autonomie était rejetée par la population locale et la communauté internationale (12).

Dans son commentaire, Mgr Belo, qui a avoué sa préférence personnelle pour l’autonomie, a expliqué qu’un arrêté présidentiel écrit déclarant que Timor serait libre l’année prochaine pourrait aider toutes les parties concernées à mieux se préparer à l’indépendance. Affirmant que l’époque était favorable au dialogue entre les partisans du référendum et les partisans de l’intégration, il a souhaité que le président reçoive les dirigeants politiques de Timor Oriental qui lui feraient connaître leurs positions respectives et s’informeraient sur la sienne. Bien que le gouvernement ait exclu la solution du référendum, Mgr Belo a pourtant insisté pour que tous les habitants de Timor Oriental soient invités à voter pour déterminer le statut définitif de leur région. Une solution décidée par des intermédiaires censés représenter la population ne me plaît pas. Qui leur donnera le mandat a-t-il interrogé. La position de Mgr Belo, sur ce point, est partagée par beaucoup d’instances internationales. Le 21 février dernier, un communiqué de l’Union européenne se prononçait pour une consultation juste et libre de la population par les NationsUnies

L’administrateur apostolique a également accueilli favorablement les initiatives tendant à associer à la recherche d’une solution le co-récipiendiaire du prix Nobel de la paix 1996, Jose Ramos Horta, aujourd’hui exilé, et Jose Alexandre “Xanana” Gusmao qui, le 11 février dernier, a été transféré dans une “maison-prison” de Jakarta où les conditions de détention sont moins pénibles. Celui-ci peut même s’entretenir avec un certain nombre de personnalités étrangères concernées par l’évolution de la question timoraise. Le 16 février, il a pu recevoir des journalistes portugais à qui il a déclaré que la future République du Timor oriental aurait une constitution fondée sur les droits de l’homme, un système politique parlementaire et un système économique libéral.

Apparemment Mgr Belo accueille avec sang-froid le brusque virage de la politique indonésienne vis-à-vis de Timor Oriental. Cependant, la rapidité de l’évolution politique de Jakarta ne manque pas d’inquiéter un certain nombre d’observateurs qui constatent que la peur et l’anxiété règnent à Dili où beaucoup de personnes s’en vont ailleurs. Le président du Comité international de la Croix-Rouge, à qui le gouvernement a refusé d’augmenter le nombre de ses représentants, a déclaré qu’il fallait se préparer pour le pire tout en espérant que ce sera différent“. Par ailleurs, l’armée indonésienne poursuit le renforcement des milices locales, accusées, il y a quelque temps, par Mgr Belo, de créer l’insécurité. Le 20 février, l’agence indonésienne Antara annonçait qu’un second contingent de supplétifs serait recruté à compter du 1er mars.

Tout récemment, le 24 février, les militaires, pris de panique, semble-t-il, ont tiré sur des

jeunes gens qui manifestaient en faveur de l’indépendance dans les rues de Dili. Selon des sources religieuses et des journalistes locaux, il y a eu au moins deux morts et huit blessés.