Eglises d'Asie

L’ Eglise catholique prend part à un débat public sur la prostitution légale

Publié le 18/03/2010




Depuis le mois de septembre dernier, un grand débat public sur la prostitution et sur les conditions de son existence s’est engagé à Taïwan. Il a été provoqué par la décision prise par le maire de Taipei, Chen Shui-bian, de mettre un terme à ce que l’on appelait jusque là la prostitution légale. 18 maisons closes officiellement autorisées auparavant vont être obligées de mettre un terme à leurs activités, tandis que 128 prostituées, titulaires d’une licence délivrée par la ville, perdront leurs sources de revenus. Cette interdiction a aussitôt suscité de vives controverses et protestations qui n’émanent pas seulement des principales intéressées, les courtisanes professionnelles de Taipei. Des groupes féminins, en particulier, dans les milieux chrétiens de la capitale, ont échangé des arguments concernant la morale et le droit au travail. La controverse est devenue d’autant plus vive qu’en dernier ressort, le maire de Taipei a accordé aux intéressées une période de rémission de deux ans avant que ne soit appliquée la décision municipale. Un nouveau maire, élu en décembre dernier, a officiellement annoncé que les autorités de la ville respecteraient le délai de deux ans qui devrait permettre aux prostituées de retrouver un autre métier.

La soeur Cecilia Yen Pao-kuei, responsable du Sprout Group“, qui rassemble un certain nombre d’associations concernées par les problèmes féminins, a fait le point sur la controverse actuelle. Elle s’est déclarée inquiète de la position prise sur ce point par quelques groupes féministes. Ceux-ci, en effet, se sont fait les avocats des droits des travailleuses du sexeIls considèrent avoir gagné une première manche avec la reprise temporaire de la prostitution légale pour deux ans et sont ainsi encouragés à continuer leur lutte pour encore d’autres droits. Sprout Groupest en train de mettre au point un communiqué traitant de cette question.

D’autres responsables insistent sur la gravité du problème en question et des débats engagés sur ce thème. Ils pensent que ceux-ci devraient déboucher sur des remises en cause catégoriques. Yvonne Lin Mei-jung, assistante sociale, fait remarquer que Taïwan est la seule région en Asie à avoir légalisé la prostitution. Elle considère comme une profonde honte pour les citoyens du pays la culture pornographiquequi y sévit et, en particulier, l’existence de 40 à 60 000 enfants prostitués, selon des statistiques données par l’ONU. Ce que nous devrions faire, conclut-elle, c’est laver cette honte, plutôt que débattre pour savoir si nous devons ou non accorder une période de rémission à la prostitution

Les personnalités catholiques de l’île ont tenu à se prononcer sur ce même sujet. Mgr Joseph Wang Yu-jung, membre de la Commission épiscopale de la doctrine et de la foi, considère que le libéralisme avec lequel la population de Taïwan envisage la prostitution ne peut être corrigée qu’en dispensant une véritable éducation concernant le mariage et les problèmes sexuels. Faisant allusion à la prostitution, il a déclaré le 24 février dernier: Il y a des professions qui ne sont pas de véritables professionsCependant, il a expliqué que, même si l’Eglise ne peut accepter de voir se développer une entreprise du sexe, elle prend en compte les circonstances qui ont conduit les prostituées dans leur état et leur doit le même amour qu’elle porte à toute l’humanité. Le cardinal Paul Shan Kuo-hsi de Kaohsiung a fait entendre la voix de la morale classique : Non seulement la prostitution dégrade la dignité de la femme, mais, de plus, elle contrevient au sixième commandement: ‘tu ne commettras pas l’adultère’Par ailleurs, il recommande au gouvernement de fournir toute l’aide et tous les conseils possibles aux femmes qui maintenant vont s’engager dans un nouvel emploi.