En Inde le mot ‘conversion’ a des résonances particulières. Il est chargé de diverses connotations, sociales et politiques, que nous ne pouvons ignorer dans les propos que nous tenons en public. La conversion n’est pas perçue comme une décision de se tourner vers Dieu, comme une réponse à un appel de Dieu ou comme un engagement spirituel et religieux. Elle est plutôt perçue comme une perturbation des structures sociales qui assurent le maintien de “l’ordre établi” dans la communauté nationale. Vues sous cet angle, on comprend que les conversions soulèvent des ressentiments dans une partie importante de la population.
Cette réaction n’est pas nouvelle. Elle avait déjà amené la Compagnie des Indes Orientales à limiter le nombre et à contrôler l’activité des premiers missionnaires anglais de peur que leur présence ne gêne les projets commerciaux et politiques de l’empire. On trouve de même une opposition aux conversions, une forte opposition même si elle était exprimée en termes courtois, dans les déclarations de Mahatma Gandhi. Après l’indépendance et le vote de la constitution, la question des “conversions de masse” fut au coeur du rapport de la commission Niyogi instituée par le gouvernement du Madhya Pradesh. Elle fut plus tard à l’origine des lois promulguées dans l’Orissa, le Madhya Pradesh et l’Arunachal Pradesh et curieusement appelées lois pour pour la “liberté de religion”. Les attaques récentes contre les chrétiens, dans le Gujerat et autres régions de l’Inde, sont tout simplement une expression plus virulente de la tension sociale qui pendant si longtemps est allée de pair avec la présence et la mission chrétiennes en Inde.
Il y a cependant un changement qualitatif dans cette opposition récente : tout d’abord elle est devenue violente, détruisant les propriétés et attaquant le personnel impliqué dans les activités missionnaires, allant jusqu’au viol et au meurtre (Madhya Pradesh & Orissa), une violence qu’on n’avait pas constatée dans le passé. Ensuite, au début, l’opposition concernait principalement les “missionnaires étrangers” que, d’une façon trop générale (et donc injustement), on considérait comme responsables des perturbations dans le nord-est du pays. (En fait, le problème est beaucoup plus ancien et s’enracine dans l’histoire des débuts du colonialisme britannique.) Actuellement, les attaques visent les chrétiens indiens, soit qu’ils travaillent pour la mission, soit qu’ils fassent tout simplement partie des fidèles du lieu. En ne mettant pas fin à ses activités après l’indépendance, l’Eglise a montré que la “mission” n’était pas fondamentalement liée au colonialisme. Néanmoins, au moins dans leurs esprits, certains refuseraient aux chrétiens le droit de revendiquer pleinement la citoyenneté indienne.
Beaucoup de chrétiens reconnaissent aujourd’hui que l’Eglise est en partie responsable de cette tension. Les premiers missionnaires furent souvent insensibles aux valeurs culturelles et aux sentiments religieux des peuples qui les accueillaient, même si on doit reconnaître que beaucoup parmi eux contribuèrent à préserver et à développer la culture du pays. De plus, allant à l’encontre des recommandations de Jésus au chapitre 10 de Matthieu et dans d’autres passages parallèles de l’Evangile, les missionaires s’appuyaient souvent de trop sur les ressources économiques occidentales. On les accuse souvent d’avoir attiré les pauvres et les ignorants dans les communautés chrétiennes à l’aide de “pots-de-vin”. Il n’est pas rare que cette accusation soit exagérée et elle ne prend pas en compte les sacrifices et souffrances que beaucoup de nouveaux chrétiens durent endurer, dans plusieurs régions du pays, à cause de leur décision d’adhérer à la foi chrétienne.
Dans la mesure où elle a effectivement commis des fautes la communauté chrétienne doit s’en repentir. Il est certain qu’aujourd’hui les Eglises condamnent toute forme de prosélytisme basé sur des motivations égoïstes. Cela n’aboutirait jamais à faire d’une personne un vrai disciple de Jésus. Vatican II s’est exprimé très clairement à ce sujet. Dans son décret sur l’activité missionnaire de l’Eglise, le Concile a recours à un langage très ferme: “L’Eglise interdit sévèrement de forcer qui que ce soit à embrasser la foi, ou de l’y amener ou attirer par des pratiques indiscrètes, tout comme elle revendique avec force le droit pour qui que ce soit de n’être pas détourné de la foi par des vexations injustes” (AG 13).
Cette déclaration de principe devrait partout servir de ligne de conduite pour toute formation religieuse (ou même politique). Même si nous sommes convaincus que les principales Eglises dans le pays s’en tiennent à cette directive formulée par Vatican II, il semble qu’il y ait aussi dans le monde quelques organisations chrétiennes, de formation récente, qui ne sont pas aussi modérées dans leur façon de témoigner de leur foi. Leurs méthodes ont un relent de ce genre de prosélytisme que Jésus condamne sévèrement dans Mt 23, 15. Au lieu de témoigner de l’amour inconditionnel de Dieu pour chaque personne, quelles que que soient sa religion ou même sa réponse personnelle, au lieu de mettre en valeur la liberté personnelle, le prosélytisme est une entreprise de contrefaçon qui a pour objectif principal l’augmentation des nombres en vue des statistiques et de leur valeur de propagande. On ne peut que regretter, même si on peut peut-être le comprendre, que les médias ne se préoccupent pas de faire la distinction entre de tels groupes et les Eglises appartenant au courant principal du christianisme. On peut regretter que tous les “chrétiens”, et donc toute activité missionnaire, soient condamnés en fonction des activités de tels groupes minoritaires. Leur genre de prosélytime, s’il va à l’encontre de la dignité et de la liberté humaines, mérite certainement d’être condamné et doit être combattu par des moyens légaux.
Sans aucun doute, nous, les chrétiens, devons faire un examen de conscience. Nous devons vérifier que les services que nous rendons aux pauvres et aux marginaux leur laissent une liberté authentique. On peut toujours être tenté d’utiliser le pouvoir que donnent la connaissance et la richesse pour induire les gens à faire des options qui ne jaillissent pas des profondeurs de la liberté. Si notre service est vraiment une option pour les pauvres, il ne devrait être jamais entaché d’une quelconque discrimination ou conditionné par les croyances des pauvres. La diffusion de la Parole de Dieu devrait améliorer la liberté des peuples plutôt que de l’affaiblir. C’est pour cela que Paul dénonçait toute sagesse autre que celle de la croix et que le Seigneur demandait à ses disciples de “prêcher dans la pauvreté“. Le pauvre n’est une menace pour personne et ne peut violer aucune liberté.
De nos jours, les chrétiens sont plus convaincus que jamais que Jésus est venu pour offrir à chacun une plus profonde liberté pesonnelle et pour libérer chacun de nous de toutes sortes d’asservissements qui entravent nos vies dans tous les domaines : moraux, psychologiques, socio-politiques, religieux. Les chrétiens partagent l’indignation profonde de tous les hommes droits face à la misère inhumaine et aux privations qu’endurent des milliards d’enfants de Dieu. Ils désirent s’identifier avec les membres les plus démunis de la communauté humaine et essayer de trouver, avec eux, des moyens de leur faire prendre conscience de leur situation et tirer parti de leur puissance collective pour la revendication de leurs droits légitimes. L’éducation des plus défavorisés, des populations minoritaires, des dalits, des femmes, etc. est l’un de ces moyens, comme le sont d’autres formes d’organisation sociale et de conscientisation. De nos jours, nous rejetons l’idée qui consisterait à faire du travail social un simple “instrument’ en vue d’autre chose, à savoir, la “conversion”. L’amélioration du sort des pauvres est par elle-même une vraie évangélisation et n’a pas besoin d’autre justification. Comme le dit le pape dans Vita consecrata au n°82 : “Le service des pauvres est un acte d’évangélisation et, en même temps, le sceau de l’authenticité évangéliqueTout effort pour mettre fin aux injustices économique et aux inégalités sociales dans nos sociétés fait partie de notre lutte contre les “péchés” collectifs et contribue à promouvoir le règne de Dieu.
Mais, de nos jours, nous insistons aussi sur une vision intégrale du salut et celle-ci nous interdit d’exclure de notre champ d’action la dimension spirituelle et religieuse de tout être humain. Nous espérons qu’avec l’aide de Dieu sera développée chez les gens une plus grande générosité, une meilleure sensibilité spirituelle, un plus grand amour du prochain et un plus grand souci de justice. Si, en raison de ce développement humain, ils éprouvent le désir de joindre la communauté chrétienne, nous ne les exclurons pas. On ne voit pas comment on pourrait alors parler de “conversion par la force”, ou voir dans cette façon de faire des tactiques frauduleuses.
Derrière bien des oppositions aux conversions on trouve un présupposé selon lequel les analphabètes et les pauvres se sont pas capables d’un vrai discernement, même si on s’adresse à eux dans une ambiance de liberté. Il est étrange que, pour étayer l’accusation de “conversion par la force” on n’ait jamais fait une étude factuelle sur les nouveaux chrétiens dans les Eglises appartenant aux courants principaaux. En fait, selon les déclarations du gouvernement du Gujerat publiées par la presse vers la mi-janvier et d’après celles du premier ministre, il est reconnu qu’il n’y pas de preuve de “conversion par la fraude ou par la force“. En revanche, nous ne manquons pas de preuves pour montrer que des chrétiens appartenant aux peuples aborigènes ont été amenés par la force vers des centres religieux hindous dans le cadre d’une campagne organisée en vue d’un soi-disant “retour au bercail” (ghar vaspasi) ou d’une “purification” (shiddhikaram), autrement dit, en vue de conversions ! Dans de telles circonstances, comment le gouvernement peut-il rester inactif face aux violentes attaques contre les communautés chrétiennes ? C’est inexplicable de la part d’un bon gouvernement.
Le nombre de personnes qu’on empêche, “par la force, les menaces, des moyens frauduleux ou des promesses d’avantages“, de joindre les communautés chrétiennes est, de loin, beaucoup plus élevé que celui des personnes qu’on forcerait à devenir chrétiennes. Comment se fait-il que ces violations des droits constitutionnels ne soient jamais condamnées ? Nous sommes tous opposés aux “conversions par la force”. L’expression comporte d’ailleurs une contradiction dans les termes. Le public s’est rendu compte que cette formulation “bidon” était faite pour brouiller les pistes.
Les protestations actuelles concernant une région où vivent des aborigènes et les vains efforts qui sont faits pour le “retour au bercail” semblent considérer comme un fait acquis que toutes les populations aborigènes sont hindoues. On peut certainement mettre en doute ce présupposé, car il fait violence à l’identité de ces populations. Les lois qui régissent les communautés hindoues ne s’appliquent pas à ces peuples. Ils ne font pas partie des communautés hindoues, à la différence des dalits – lesquels d’ailleurs ont commencé à mettre en cause une telle identification.
Si on regarde les statistiques, on s’aperçoit que la “menace” des conversions par la force est en réalité un masque qui dissimule d’autres préoccupations. La toute petite minorité de chrétiens ne constitue aucune menace pour aucune communauté. Mr Pravin Togadia, le secrétaire général du VHP a menti lorsqu’il a dit que les recensements récents de la population indienne montraient une “croissance géométrique des chrétiens comparée à celle des hindous” (TOI Delhi ed. 8 fév. 1999). En fait, le pourcentage des chrétiens dans le pays a diminué, passant de 2,6 il y a quelques années à 2,34 aujourd’hui. Les deux derniers recensements organisés par le gouvernement de l’Inde ont montré qu’en dix ans l’augumentation du nombre des chrétiens a été environ de 17%, tandis que la population hindoue a augmenté d’environ 23 %. Ceux qui s’adonnent à des analyses scientifiques objectives concluent que ce qui est redouté ce ne sont pas les conversions religieuses mais les occasions qui sont données aux pauvres d’améliorer leurs conditions de vie sociale et économique grâce à un regard nouveau sur leur situation et à une organisation sociale plus cohésive. Il s’agit de pauvres qui, pendant des siècles, ont été réduits à la position d'”esclaves” des couches supérieures de la société et obligés d’assurer, pour des salaires ridicules, des travaux serviles que les gens éduqués ne voulaient pas faire. Il y a tout un programme caché de défense de classe dans l’opposition aux activités missionnaires.
Au coeur des tensions dont nous avons fait l’expérience ces derniers mois, il y a la question de la mobilité de l’appartenance religieuse et de deux perceptions différentes de ce que signifie la religion. En général, dans le passé, l’hindouisme a été “génétique“, comme le dit Nirad C. Chauduri. On naît dans une religion, dans une caste, dans un pays, et il n’est pas question de changer son dharma. On hérite de sa religion. Telle était aussi la position généralement acceptée du judaïsme traditionnel, du zoroastrisme, des sikhs et des autres religions ethniques. A l’inverse, la théologie chrétienne considère que personne n’est né dans une religion : on y entre par une conversion personnelle dont le baptême est seulement le symbole. En ce sens, tous les chrétiens sont des convertis. Il est vrai que beaucoup sont baptisés, parce que les parents le souhaitent, lorsqu’ils sont encore des enfants ; mais ce baptême doit être complété par la conversion ou l'”adhésion” personnelle de chaque croyant pendant sa vie. On est invité à en prendre conscience, en particulier pendant le carême et au cours de la liturgie de la vigile pascale, et on formule cette adhésion chaque dimanche quand on récite le credo. Le bouddhisme et l’islam sont aussi des religions qui reposent sur une décision, et non principalement sur la naissance. Par suite, elles aussi sont “missionnaires”. On peut ajouter que même les religions “héréditaires” ou ethniques, comme le judaïsme au temps de Jésus, ainsi que l’hindouisme et autres religions de ce type (à l’exclusion du zoroastrisme) sont en train de changer et ont tendance à accepter des convertis, et donc à devenir elles-mêmes missionnaires. Personne n’objecte à une telle évolution.
La liberté de religion et la liberté de changer de religion sont des valeurs qui nous sont chères et des droits constitutionnels que le pays doit protéger. C’est aussi une pratique acceptée par la plupart des religions qui acceptent aujourd’hui les convertis qui veulent les rejoindre. Plusieurs écrivains ont fait remarquer dans la presse que le débat national sur les conversions a eu lieu pendant l’Assemblée constituante avec comme résultat un consensus qui a été soigneusement inscrit dans la constitution. Demander un nouveau débat revient donc à rejeter ou au moins à remettre en question ou à saper la constitution. Ce n’est pas seulement notre foi, mais aussi notre patriotisme qui nous demandent de défendre la précieuse liberté de pouvoir changer de religion. Dès le début de l’existence de notre nation indépendante, nos pères fondateurs ont voulu que nous puissions jouir de cette liberté. Nous défendrons ce droit avec fermeté.
Bien sûr, cette position demande qu’il puisse y avoir aussi conversion du christianisme vers d’autres religions ou vers l’absence de religion, comme cela arrive de fait. L’appel du Concile pour le respect de la liberté de conscience s’applique à tous ces cas. Evidemment lorsqu’un membre de notre communauté décide librement de la quitter, nous en souffrons. Mais nous ne pouvons pas refuser à quiconque le droit de prendre une telle décision. Dieu seul peut juger s’il s’agit de vraies conversions, c’est-à-dire d’une réponse à la grâce divine, ou plutôt de ce que le Nouveau Testament appelle “l’apostasie”, c’est-à-dire une infidélité à la grâce donnée par Dieu de suivre Jésus. Une persécution peut produire, et de fait produit, à la fois des martyrs et des apostats. Seule la toute-puissance de la grâce de Dieu peut “nous délivrer de tout mal“, comme nous le demandons tous les jours, et assurer notre persévérance dans la foi. Mais en ce qui nous concerne, nous devons respecter le mystère de la liberté humaine dans le choix de la voie que chacun choisit pour adhérer à Dieu et l’adorer, même si nous sommes collectivement peinés lorsque quelqu’un décide de se séparer de nous, et même si nous considérons que sa décision est mal inspirée. Peut-être d’ailleurs nous, chrétiens, devrions-nous corriger notre vocabulaire et ne pas appeler trop facilement ces personnes des chrétiens “perdus” ou des apostats. Eux aussi peuvent être des “convertis” et mériter notre respect et notre amitié. L’Evangile nous dit que l’amour de Dieu est inconditionnel et nous devrions nous efforcer que le nôtre le soit aussi.
Nous nous sommes référés aux domaines de la justice sociale et des droits de l’homme impliqués dans la controverse actuelle autour de l’ensemble du travail de l’Eglise. Il y a aussi un problème de culture. Nous avons reconnu que, dans le passé, les promoteurs de la mission chrétienne manquaient parfois de sensibilité vis-à-vis de valeurs chères à la culture indienne. Les cultures peuvent certainement se développer et se diversifier, mais nous aimons ce que la tradition nous a légué. Néanmoins, en dépit des timides efforts qu’elle a fait au cours des dernières décennies pour devenir “indienne”, pour beaucoup d’observateurs l’Eglise dans notre pays a encore un visage “étranger”. Les évêques eux-mêmes ont plaidé pour davantage d’autonomie et pour l’identité culturelle locale lors du récent Synode pour l’Asie. Dans de nombreuses régions du pays, aujourd’hui encore, celui qui devient chrétien fait l’expérience d’une rupture avec sa culture et sa communauté. Si nous devenons plus “inculturés” les conversion seront probablement perçues un peu moins comme des blessures et la co-existence sera plus facile. L’Eglise est certainement invitée à réfléchir à cela sérieusement. Le grand intérêt manifesté par l’Occident “chrétien” lors des récents incidents, alors que dans le passé il a largement ignoré les autres conflits de caste et de relations entre communautés devrait nous faire réfléchir sur notre identité et nos racines.
Dans la mesure où une “conversion” signifie devenir membre d’une nouvelle religion, cela concerne non seulement Dieu et la religion mais aussi la communauté. Naturellement, la communauté dont on se sépare est peinée lorsque l’un de ses membres semble la trahir. Il n’est pas rare que la communauté qui reçoit, en principe heureuse de recevoir de nouveaux membres, ne soit pas à même d’offrir au nouveau venu ce dont il a besoin pour se sentir chez lui. En effet, il n’a pas de liens de sang avec cette communauté et beaucoup parmi ces nouveaux chrétiens restent en fait en marge des diverses communautés sociales qui constituent la réalité de l’Eglise. Les problèmes sociaux que nous n’avons pas encore résolus consistent à savoir si nos communautés ethniques peuvent évoluer de telle façon qu’il puisse y avoir place pour diverses affiliations religieuses dans chacune d’elles, comme il y a de fait actuellement plusieurs communautés ethniques et sociales dans l’Eglise. Une telle transformation de nos communautés élargirait certainement le champ de la liberté individuelle et en même temps enrichirait les communautés avec des apports de diverses traditions. Dans quelques cas une transformation de ce genre a déjà lieu. Mais c’est exceptionnel et ce n’est pas visible. Peut-on espérer davantage de progrès dans ce domaine?
Nous croyons que c’est possible. La base de notre espérance c’est le soutien considérable dont a bénéficié la communauté chrétienne, au cours des derniers mois, de la part de beaucoup de personnes et de groupes appartenant à d’autres communautés et aussi de la part ce que nous appelons le monde laïque. Des hindous, des musulmans, des sikhs, des bouddhistes et des jaïns ont non seulement parlé mais ils ont aussi agi courageusement pour mettre fin à la violence dont ont été vicimes les personnes et les institutions chrétiennes et pour défendre les valeurs de la constitution. Les chrétiens ne peuvent qu’éprouver une reconnaissance profonde pour ces nombreuses manifestations de solidarité. Cette expérience nous invite à une nouvelle “conversion” individuelle et collective, c’est-à-dire à une “convergence”, à nous “tourner” les uns vers les autres, tout en nous tournant vers Dieu, de façon à ce que soient protégés à la fois le pluralisme religieux, la liberté individuelle et la liberté de changer de religion. Nous sommes ausi reconnaissants aux chrétiens du Gujerat, parmi lesquels beaucoup faisaient une nouvelle expérience de la vie de l’Eglise, pour la façon dont ils ont réagi face à une agression injuste, avec une authenticité évangélique: sans violence, et néanmoins en protestant contre l’injustice, tout en faisant appel à la conscience de la nation. Il s’est avéré que leur confiance était largement justifiée.