Eglises d'Asie

Aceh : 41 morts et une centaine de blessés lors de la répression de la manifestation du 3 mai par les militaires

Publié le 18/03/2010




Depuis plus d’un mois et demi, les manifestations violentes en faveur de l’indépendance se succèdent dans la province d’Aceh. La première avait eu lieu à Bandar Aceh, la capitale provinciale, le 26 mars dernier, quelques heures à peine avant l’arrivée sur les lieux du président B.J. Habibie (3). Depuis, c’est la localité de Lhokseumawe (4) où se trouve le siège de plusieurs compagnies étrangères, qui est devenu le théâtre le plus fréquent de l’affrontement des militants indépendantistes et des forces de l’ordre. Le dernier incident date de la nuit du 10 au 11 mai, nuit durant laquelle cinq grenades ont été lancées contre une base aérienne proche de Lhokseumawe sans, semble-t-il, faire de victimes. Les militaires ont accusé le groupe séparatiste Hasan Tiro d’avoir lancé ces cinq projectiles à l’aide d’un lance-grenade.

Le précédent heurt entre la population et l’armée avait était beaucoup plus sanglant. Il s’était produit, lui aussi, auprès de la base aérienne de Lhokseumawe dans l’aprèsmidi du 3 mai. Un cortège de plus de 2 000 manifestants était en marche vers la base pour protester contre la brutalité des fouilles opérées, la veille, dans les maisons d’un village voisin par des parachutistes, lorsque des soldats arrivés en camion ont ouvert le feu contre la foule. Selon les dernières déclarations officielles, au moins 41 personnes ont été tuées par balles et plus d’une centaine blessées dont beaucoup sont encore hospitalisées.

Les versions des faits diffèrent selon les sources. Les militaires ont prétendu que la manifestation avait l’intention de mettre à sac la base où sont stockés des missiles. Les manifestants affirment qu’ils voulaient seulement s’assurer qu’il n’y aurait plus de violences militaires. Les forces de l’ordre affirment que les soldats n’ont fait que répondre à des tirs venus du cortège des manifestants, alors que des témoins oculaires certifient que la fusillade s’est déclenchée après que les manifestants eurent jeté des pierres en direction des soldats. Le colonel commandant de la région d’Aceh a même prétendu que les coups de feu n’ont pas été tirés par les militaires : ceux-ci ne seraient pas en possession d’armes capables d’utiliser les projectiles trouvés sur les victimes. Pourtant, dans un film enregistré par une station de télévision privée, on voit clairement des soldats en train de tirer. Dans la nuit du 6 mai, à Lhokseumawe, dans les stations de bus, les gares routières et les mosquées, des centaines de personnes en deuil se sont rassemblées pour prier pour les victimes du 3 mai. Selon un religieux musulman, ces cérémonies de deuil devaient se prolonger pendant une semaine.

Les derniers incidents ont encore exacerbé l’animosité de la population à l’égard de l’armée. Beaucoup d’observateurs pensent que la répression de l’armée n’a fait qu’intensifier la guérilla des indépendantistes musulmans d’Aceh. Une large fraction de la population demande maintenant l’organisation d’un référendum sur l’indépendance et appelle au boycott des élections qui auront lieu le 7 juin prochain. Inquiet de cette situation, le responsable du Comité national des élections est arrivé sur place, le 6 mai, pour consulter les dirigeants locaux sur la possibilité d’organiser ce vote.