Eglises d'Asie

Certains milieux catholiques saluent dans le nouveau décret la première reconnaissance officielle de la religion en tant qu’élément de la société civile

Publié le 18/03/2010




Les deux plus récents numéros de l’organe du Comité d’union du catholicisme à Hô Chi Minh-Ville, « Catholicisme et Nation », proposent des commentaires du nouveau décret sur les religions 26/1999/ND-CP (6) qui insistent, chacun d’eux, sur un certain nombre d’éléments positifs et négatifs de ce dernier document législatif (7).

Tran Van Son qui signe le premier commentaire, de même que le P. Thiên Cam, dominicain, rédacteur du second article, saluent comme un grand progrès la formulation adoptée par le nouveau décret pour exprimer le droit de liberté religieuse. Alors que le décret précédent 69 CP, comme d’ailleurs ceux qui l’avaient précédé, se contentait de parler de la liberté de croyance ou de non-croyance, l’actuel décompose cette liberté en liberté de croyance et en liberté de religion. Selon Trân Vin Son, il s’agit là d’un élément extrêmement nouveau que des dizaines de millions de croyants souhaitaient depuis longtemps. Le P. Thiên Cam parle d’un progrès remarquable (8). C’est la première fois, ajoute-t-il, que l’Etat vietnamien reconnaît publiquement la liberté de religion. Seule, affirme-t-il, la liberté de religion a besoin d’être protégée par la loi. La liberté de croyance, elle, est inhérente à la personne humaine : « Les catholiques n’ont pas besoin de voir la liberté de croyance reconnue par l’Etat. Même lorsqu’il sont traduits devant la justice pour « avoir été adeptes d’une religion« , personne ne peut leur interdire de croire et leur mort pour la foi prouve précisément leur absolue liberté en ce domaine« . S’il faut une intervention de l’Etat, c’est pour protéger les activités religieuses, c’est-à-dire les manifestations sociales de la religion, pour reconnaître l’institution religieuse, avec son système de croyances, sa hiérarchie structurée, sa loi, ses établissements et ses cérémonies.

Il faut cependant tempérer les affirmations de ces commentateurs en remarquant que la reconnaissance de la liberté de religion, à côté de celle de la liberté de croyances, est déjà inscrite à l’article 70 de la Constitution du 15 avril 1992 (9). Mgr Nguyên Van Hoa avait, lors de la discussion du projet de cette constitution, déclaré dans la presse que seule comptait la liberté de religion.

Toutefois, le P. Thien Cam suggère que cette reconnaissance officielle du caractère social de la religion n’en est jusqu’à présent qu’au stade de la déclaration de principe. Le nouveau décret ne reconnaît pas encore le statut de « personnalité juridique » aux organisations religieuses alors qu’il leur accorde le droit de se créer des sources de financement et de revenus. Il affirme même que la principale de ces sources est la quête et l’appel à la générosité des fidèles, tout en précisant que les comités populaires provinciaux doivent très sévèrement contrôler l’organisation des collectes.

Tout en soulignant le grand pas accompli avec cette reconnaissance de la dimension sociale de la religion, les deux articles déplorent un certain nombre d’éléments repris directement de l’ancienne législation religieuse. Ils relèvent le caractère inextricable et ésotérique du réseau des organes du gouvernement et du Parti chargés de la surveillance et du contrôle des activités religieuses. Le premier article énumère dix de ces organes, commençant par le gouvernement et le Bureau des Affaires religieuses placés sous la direction de ce dernier, citant ensuite l’Education nationale, pour terminer par des organismes difficilement identifiables, comme les « organes compétents », ou les « organes de gestion étatiques ». Sur un cas précis comme celui du séminaire, les commentateurs du décret ont dressé la liste de tous les services gouvernementaux auxquels les responsables religieux devront avoir recours. C’est au premier ministre qu’ils doivent demander l’autorisation d’ouvrir le séminaire. L’organisation et les activités de cette maison de formation devront se conformer aux directives du Bureau des Affaires religieuses et du ministère de l’Education. Enfin, dans leur travail de formation sacerdotale, les responsables du séminaire devront se soumettre aux « orientations » données par les Comités populaires et les « organes ayant compétencedont on ne sait trop qui ils sont.

La terminologie employée dans le décret pour désigner les différentes catégories du personnel religieux : les ministres du culte sont nommés « dignitairesles religieux bouddhistes (tu hanh) sont assimilés aux membres des congrégations religieuses catholiques. On a du mal à reconnaître une catégorie de personnes précises, dans certaines appellations employées dans le décret, comme « spécialistes en activités religieuses« personnes élues par les fidèlesou encore « personnes religieuses