Eglises d'Asie – Inde
Rome a posé de nouvelles questions au P. Jacques Dupuis, mais n’avance plus d’objections fondamentales
Publié le 18/03/2010
Le P. Dupuis a enseigné durant vingt-cinq ans à la faculté de théologie de New Delhi et a pris la nationalité indienne. Dans son parcours théologique dominé par l’ouverture au dialogue interreligieux, il a été amené à reprendre une question jugée décisive depuis le début du christianisme : quelle place faut-il reconnaître à Jésus ? Si la révélation qu’il apporte sur Dieu et sur l’homme lui confère un rôle unique, de quel droit le prétendre universel ? Les millions d’êtres humains qui ne connaissent pas Jésus feraient-ils une expérience de Dieu et de la vie humaine fondamentalement tronquée ? Ou bien est-ce une violence de la part des chrétiens que de prétendre avoir découvert en Jésus le visage même d’un Dieu à l’image duquel ils sont appelés à vivre dans l’amour ?
A ces questions difficiles, le P. Dupuis apporte des réponses très nuancées qui ont marqué son enseignement depuis 1984 à l’université grégorienne de Rome. Pour lui, un chrétien peut prétendre que sa foi en Jésus-Christ est source de salut, “à condition de ne pas figer ni réduire la manifestation de Dieu à la révélation de Jésus”. Le P. Dupuis remarque encore : “Jésus ne clôture pas l’histoire des manifestations de Dieu. Certes, l’événement Jésus-Christ est le point culminant et le sacrement universel, mais, selon la comparaison de St Irénée, Dieu sauve avec ses deux mains que sont le Verbe et l’Esprit”. Le théologien reprend ainsi une idée, que l’on trouve également dans Vatican II, selon laquelle l’Esprit est aussi à l’ouvre dans les autres religions.
Après avoir répondu point par point aux objections de la Congrégation, justifié et précisé chacune des idées avancées dans son livre, le P. Dupuis a, selon l’hebdomadaire catholique anglais “The Tablet”, reçu une réponse du Vatican. Cette nouvelle lettre de la Congrégation ne semble plus formuler d’objection décisive contre les affirmations du théologien mais lui demande néanmoins de préciser encore sa présentation du Christ. C’est une question sur laquelle les penseurs chrétiens se sont divisés dès les premiers siècles : comment distinguer en Jésus son humanité et sa divinité sans toutefois les séparer ?
Le P. Dupuis a reçu au cours de ces derniers mois le soutien de nombreux autres théologiens et celui, retentissant, du cardinal Franz Koenig, ancien archevêque de Vienne (10).