Eglises d'Asie

L’ensemble des “ulémas” de la province d’Aceh se prononcent pour un référendum sur l’autodétermination

Publié le 18/03/2010




500 ulémas (docteurs de la loi musulmans), au cours d’une réunion qui s’est déroulée du 13 au 14 septembre dans le chef-lieu de la province d’Aceh, Banda Aceh, se sont mis d’accord sur l’idée d’un référendum d’autodétermination analogue à celui qui vient d’avoir lieu au Timor Oriental. Il permettrait à la population de déterminer pacifiquement l’avenir politique de la région. Les conclusions auxquelles sont parvenus les représentants musulmans de cette province troublée ont été reprises dans un appel aux autorités dont le contenu a été ainsi rapporté par le quotidien “Kompas” : “Nous avons pressé le gouvernement d’accepter la tenue d’un référendum sous contrôle international comme le demande la population de la régionLe texte de l’appel précise que cette consultation populaire est destinée à régler le différend qui sépare les deux camps en présence dans cette province située à l’extrémité nord-ouest de Sumatra : le camp de ceux qui veulent rester citoyens indonésiens mais avec une plus large autonomie et celui de ceux qui veulent que le territoire d’Aceh soit séparé de la République indonésienne à laquelle il a été intégré en 1945. Par ailleurs, l’appel des dirigeants musulmans indique aux autorités du pays que, si la consultation n’avait pas lieu, d’autres troubles encore plus violents se produiraient dans la région.

L’initiative des notables musulmans est loin d’être isolée puisque, tout récemment, sept partis politiques ont lancé un appel commun pour que la large autonomie offerte à Timor Oriental à la fin du mois d’août lors de la consultation organisée par les Nations Unies soit étendue à la population d’Aceh. Jamalludin Ahmad, porte-parole de cette coalition de sept partis qui est arrivée en tête des élections du 7 juin, a soutenu la propositions des ulémas : C’est une demande parfaitement légitimea-t-il déclaré. L’homme politique a insisté sur la représentativité des ulémascadres religieux qui, dans les villages, dirigent la plupart des institutions éducatives et sociales et, de ce fait, sont en contact direct et permanent avec la population, tout en n’étant soumis à aucune pression politique. M. Ahmad a également souligné que la solution qui avait la faveur des intellectuels de Aceh était un statut d’autonomie à l’intérieur de l’Indonésie, statut analogue à celui de Hongkong, région administrative spéciale au sein de la Chine. Ce statut lui permettrait de bénéficier d’une part plus importante des ressources naturelles de son sol.

L’appel des ulémas de Aceh a été également adressé aux dirigeants des quatre partis musulmans d’Indonésie et à ceux du Nahdlatul Ulama, la plus vaste des associations islamiques du pays. Abdurraman “Gus Dur” Wahid, le président bien connu de cette organisation, parlant du choix des ulémas en faveur du référendum, a déclaré: Même si elles m’attristent, je dois respecter les conclusions de cette réunion“. Une autre personnalité musulmane de grande notoriété, Amien Rais, président du parti de la mission nationale, a souligné que la revendication d’un référendum par les ulémas et la population de la province faisait partie de leurs droits légitimes.

C’est au milieu des années 1970, que le mouvement de lutte pour un Etat islamique à Aceh s’est éveillé. La répression militaire a été violente et a créé dans la population un très grand ressentiment contre l’armée. La chute de l’ancien président Suharto au mois de mai 1998 et l’arrivée du président Habibie ont donné un nouveau dynamisme aux partisans d’un Etat islamique indépendant. Les premières manifestations avaient eu lieu à Bandar Aceh, le 26 mars dernier, quelques heures à peine avant l’arrivée sur les lieux du président B.J. Habibie (10). L’armée avait ouvert le feu sur les étudiants massés devant la mosquée où le président devait prendre la parole, faisant une dizaine de blessés. Dans les mois qui ont suivi, les éruptions de violence ont été nombreuses et meurtrières (11). On estime que, depuis le mois de mai, 250 personnes sont mortes tandis que 200 000 ont quitté leur résidence à la recherche d’un refuge.