Eglises d'Asie

Les heurts entre chrétiens et musulmans à Amboine prennent une nouvelle forme

Publié le 18/03/2010




Les heurts violents entre les communautés chrétiennes et musulmanes, qui ne cessent d’ensanglanter la ville d’Amboine dans la province des Moluques depuis le mois de janvier 1999 (12), continuent de se produire à intervalles plus ou moins réguliers. Le dernier en date a eu lieu le 20 septembre. Selon les rapports officiels, il aurait fait au moins sept morts. Mais on a appris du groupe “Media Indonésia” dont le siège se trouve à Djakarta, que, dans la nuit qui a suivi, le bilan s’élevait déjà à 21 décès. La plupart des victimes ont été tuées ou blessées par balles provenant soit des armes des agents de la sécurité essayant de disperser les deux groupes antagonistes, soit de celles des civils engagés dans le conflit.

Selon les informations de Média Indonésia“, les premier heurts auraient commencé avec l’expédition lancée par les habitants du village musulman de Gallunggund contre un village chrétien Ahuru, village où, déjà la veille, ils avaient commis des déprédations. Sur leur route, ils ont rencontré les habitants chrétiens du village de Karangpajang qui leur ont interdit le passage. C’est à partir de là que le conflit se serait généralisé.

Selon le révérend Dicky M. Mailoa, l’un des dirigeants du centre de crise de la Communion des Eglises en Indonésie, le conflit entre les deux communautés est en train de changer de théâtre d’opérations et de se déplacer de la terre vers la mer. En effet, des passagers chrétiens de barques de transport sont, depuis quelque temps, les victimes d’assassins professionnels. Le première victime de ce type d’agression a été un jeune chrétien, Edwin Nanere, voyageant à bord du “Lambelu”, le 24 août dernier. Il a été poussé et jeté à la mer par son agresseur. Apprenant l’incident, le capitaine du bateau a fait demi-tour mais a cherché en vain la victime. Le 18 septembre, neuf chrétiens, passagers d’un bateau de transport gouvernemental d’Amboine, ont été assaillis sur le pont par un groupe de 25 musulmans. Thelma Danjeubun, une des victimes de cette agression, à son retour, a rapporté à la police qu’elle et sa mère avaient été blessées au cours de l’attaque, tandis que son frère, assistant à l’université, avait disparu. Depuis le mois d’août, plus de 36 passagers chrétiens ont été victimes de telles attaques. Cinq au moins ont disparus, tués ou jetés à la mer.

Le pasteur Mailoa pense que la terreur ainsi semée dans les esprits des passagers des bateaux fait partie d’une stratégie qui vise à isoler la ville d’Amboine. On peut remarquer, en effet, que la zone qui entoure l’aéroport de la ville étant devenue la cible de nombreuses attaques, de plus en plus les avions commerciaux évitent de se poser dans cette ville. Ainsi, le chef-lieu de la province des Moluques risque bientôt d’être isolé par mer et par air, rendant la situation intenable pour les chrétiens, qui se trouveront alors totalement retranchés du monde.

Aujourd’hui, des accusations précises sont formulées par les chrétiens contre certains dirigeants musulmans. Durant le mois d’août, quinze juristes chrétiens représentant les Eglises des Moluques ont envoyé une lettre au général Wiranto. Ils y précisaient que H.R. Hassanusi, président du Conseil indonésien des oulémas, mais aussi colonel de police en activité, conduit lui-même des attaques de musulmans contre des villages chrétiens. Il faut noter en contre-partie, que le dirigeant de la communauté musulmane des Moluques à Djakarta, Abdu Rauf Pelu, a lancé contre les chrétiens des accusations analogues. Il a déclaré à la revue Dialogue“, que 90 % des effectifs de certaines brigades de police à Amboine sont formés de chrétiens qui ne bougent paslorsque ce sont les chrétiens qui attaquent les musulmans. Il a aussi reproché aux chrétiens de n’être pacifiques que dans leurs déclarations.