Eglises d'Asie

Des groupes hindous extrémistes rappellent aux chrétiens les méfaits de l’Inquisition à Goa

Publié le 18/03/2010




Le groupe hindouiste, “Front pour la protection de la culturea organisé, le 9 octobre dernier, dans le principal temple hindou de Goa, un service à la mémoire des victimes de l’Inquisition. La cérémonie qui a duré deux heures et demie a rappelé les méfaits de cette institution établie à Goa par le pouvoir portugais au XVIème siècle. C’est la première fois qu’est évoquée publiquement l’Inquisition de Goa, abolie aujourd’hui depuis deux siècles. Selon les organisateurs, cette initiative visait à informer les jeunes générations des atrocités commises par les Portugais de connivence avec les autorités de l’Eglise au nom de la religion. En fait, il s’agissait surtout de préparer la marche “contre les atrocités chrétiennes” qui devait partir de Goa, le 20 octobre suivant, et parvenir à New Delhi, le 4 novembre, la veille de l’arrivée du pape dans cette ville. Les prospectus distribués à cette occasion, intitulés “Méfaits chrétiens” ou encore “Questions posées au pape”, exigent de celui-ci que, dans un véritable esprit chrétien, il confesse les persécutions et les atrocités exercées contre les hindous au cours du deuxième millénaire et qu’il en demande pardon. Subash Velingar, secrétaire général du groupe extrémiste, le Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), et coordinateur de la marche, a déclaré : “Nous voulons montrer (par cette cérémonie commémorative) que si on les compare aux hindous compromis dans les récentes attaques contre les chrétiens, ces derniers ont été, autrefois, beaucoup plus impliqués dans des atrocités commises contre les hindous

L’Inquisition est apparue dans l’Eglise en 1231, établie par Grégoire IX pour lutter contre l’hérésie, au début vaudoise et cathare. Elle prit diverses formes selon les lieux, utilisant la torture dans ses interrogatoires et punissant les prévenus jugés coupables de châtiments très sévères y compris de la peine de mort par le feu. Elle fut particulièrement féroce en Espagne et au Portugal. Dans ce pays, c’est Jean III qui créa à partir de 1536 une Inquisition d’Etat chargée surtout de poursuivre les nouveaux chrétiens, juifs convertis soupçonnés de garder leurs anciennes pratiques religieuses. Dès 1560, le tribunal de l’Inquisition sévissait à Goa où il était destiné à préserver la foi et à la défendre contre les nouveaux chrétiensUn voyageur français qui visita Goa en 1608-1610 a noté que l’Inquisition y était encore plus cruelle qu’au Portugal.

Face aux exigences des extrémistes hindous, les dirigeants de l’Eglise catholique indienne ont tout de suite repoussé l’éventualité d’une intervention quelconque du pape à ce sujet. Les milieux de hindouisme extrémiste suggèrent en effet que le plus haut dirigeant catholique demande pardon pour les excès de l’Inquisition à Goa. D’autres suggestions lui sont également faites. Le Conseil mondial hindou propose par exemple que le pape condamne les conversions forcées d’hindous réalisées dans les minorités ethniques ou dans les basses castes, qu’il admette publiquement que Jésus-Christ n’est pas la seule voie pour atteindre le salut, qu’il reconnaisse les dieux autres que le ChristJusqu’où nous faudratil remonter dans l’histoire ?” a demandé Mgr de Lastic, président de la Conférence épiscopale, à des journalistes de la capitale indienne qui l’interrogeaient. A ceux qui demandent que le pape revienne sur le dogme de l’Eglise selon lequel le christianisme est le seul chemin du salut, il a répondu qu’une telle proposition violait les droits religieux fondamentaux. Le pape a le droit de proclamer ce à quoi il croit, a-t-il ajouté. Par ailleurs, il a fait remarquer que, comme tous les chrétiens, le pape sollicite le pardon pour ses propres offenses, chaque fois qu’il récite le Notre PèreTous devraient l’imiter, a conclu l’archevêque de New Delhi.

Beaucoup de chrétiens mettent en doute la sincérité des revendications des groupes extrémistes hindous et de leur indignation actuelle. Le P. Stanislas Fernandes de Ahmedabad a fait remarquer que ces groupes ne sont jamais à court d’arguments et que toute cette effervescence est uniquement motivée par le désir de troubler la visite pontificale et la célébration du troisième millénaire. Selon John Dayal, un des responsables de l’Union catholique panindienne, toutes ces menaces et proclamations visent à contraindre et terroriser une communauté minoritaire qui a servi le pays pendant les 2000 ans passés avec amour et compassion et s’est engagée plus que toute autre pour la promotion des pauvres. Mgr de Lastic a sans doute résumé l’opinion chrétienne générale en disant regretter cette propagande malveillante et systématique faite de demivérités, de mensonges et de désinformation“.