Eglises d'Asie

De nouvelles négociations entre les rebelles musulmans et le gouvernement philippin sont interrompues par une reprise des hostilités

Publié le 18/03/2010




La reprise de négociations en vue de la paix, le 25 octobre dernier, entre le gouvernement philippin et le Front moro de libération islamique (MILF) n’aura pas eu d’effets durables sur le terrain. En effet, le 8 novembre suivant, les guérilleros du MILF s’emparaient d’une série de villages que le Front revendique comme faisant partie de son territoire. Les hostilités ont aussitôt repris. Pour la seule journée du lundi, 11 novembre, on a compté huit morts, deux appartenant aux forces gouvernementales, six aux troupes rebelles, victimes à ajouter à celles qui étaient tombées les jours précédents. Plus de 20 000 civils ont fui la région des combats abandonnant leurs champs et leurs habitations. Le commandant militaire des rebelles a affirmé mener une série d’actions de représailles à la suite des attaques des camps d’entraînements du MILF par les militaires philippins. De son côté, le gouverneur de la province interprétait cette initiative militaire des rebelles comme une tentative pour étendre la région contrôlée par eux afin de renforcer leurs positions dans les négociations à venir.

Après deux années où les tentatives de négociations ont sans cesse été interrompues, on espérait pourtant beaucoup de la reprise des pourparlers entre les deux camps qui s’étaient ouverts avec une certaine solennité le 25 octobre au centre islamique Da’wah de Sultan Kudarat, ville du Mindanao située un peu au nord de Cotabato. Les gongs traditionnels avaient résonné. Les ambassades d’Egypte, de Libye et de Grande-Bretagne avaient envoyé des représentants, comme observateurs. Au même titre, étaient aussi présents des évêques et des oulémas, appartenant au Forum des évêques et des oulémas, institution où sont débattus les problèmes brûlants de cette région. Des lectures du Coran et de la Bible avait même précédé les entretiens proprement dits et, dans un discours prononcé devant 5 000 musulmans, le général Orlando Soriano avait plaidé pour la réconciliation : Laissons maintenant le passé derrière nous et enterrons nos souvenirs de haine et de violence !”

Selon les témoignages recueillis auprès des participants, les entretiens qui se sont terminés le jour même sans fixer de dates pour d’éventuels contacts à venir, n’ont pas abordé la question de l’indépendance du peuple moro. Mais pourtant, en dehors du cadre des pourparlers, les deux parties ont multiplié les déclarations sur ce thème. Le fondateur du MILF déclarait, par exemple, dans une interview radiodiffusée que l’indépendance était la seule solution pouvant conduire à la paix et proclamait que le Timor-Oriental était un modèle pour le peuple moro. Un autre membre du Front affirmait ailleurs que si l’indépendance n’était pas acquise par la génération actuelle, la génération suivante en jouirait. Du côté gouvernemental, le secrétaire exécutif de la présidence, Ronaldo Zamora, a averti que son gouvernement rejetterait toute demande de formation d’un Etat indépendant : Nous n’accepterons jamais une formule d’indépendance, a-t-il dit, et nous espérons que le MILF ne mettra pas cette question sur la table“.

Le MILF, dont les effectifs s’élèvent aujourd’hui à quelque 13 000 hommes, a été fondé en 1978. Il a poursuivi sa lutte pour l’indépendance après son refus des accords de paix conclus en 1996 entre le gouvernement philippin et le principal mouvement indépendantiste, le Front moro de libération nationale (MNLF), accords qui octroyaient une autonomie limitée à quatre provinces à majorité musulmane de Mindanao. Aspirant à l’indépendance totale de la région, le Front a cependant toujours affirmé vouloir conclure une paix séparée avec le gouvernement philippin, mais toutes les négociations menées jusqu’ici ont été interrompues par une reprise des hostilités.