Eglises d'Asie

Pour raison de conscience, un évêque philippin se retire de la commission de révision des peines capitales

Publié le 18/03/2010




Le 26 octobre dernier, un condamné à mort, Pablito Andan, accusé d’avoir violé et tué en 1994 son cousin âgé de vingt ans, a été exécuté par injection. C’était la sixième exécution capitale de l’année. Le même jour, on apprenait que Mgr Francisco San Diego, évêque de San Pablo dans l’île de Luçon, avait donné sa démission de la commission de révision des peines pour les condamnés à la peine capitale. Dans sa lettre de démission, où il commençait par remercier le président Estrada de l’avoir nommé à cette commission chargée de conseiller le président dans l’exercice de son droit de grâce, l’évêque justifiait son retrait par les très nombreux engagements pastoraux dont il était déjà chargé aussi bien au sein de son diocèse qu’à Radio Veritas, au Bureau permanent de la Conférence épiscopale et à la Commission “Pour la vieIl a aussi exprimé sa volonté de se consacrer entièrement au service de l’Eglise et des prisonniers, dont il est chargé dans le cadre de la conférence épiscopale. Par la suite, l’évêque a refusé de répondre aux journalistes lui demandant s’il fallait considérer comme une pure coïncidence le fait que sa démission ait été remise le jour de l’exécution d’un condamné à mort.

Lors de la réunion de la conférence épiscopale qui a suivi, le 29 octobre 1999, son président, interrogé sur cette démission, n’a pas donné de réponse claire mais a laissé entendre que le retrait de Mgr San Diego hors de la commission était motivée par une raison de conscience : Si vous êtes mis en minorité dans cette commission et que le condamné est exécuté, il reste que vous êtes une composante d’un organisme qui a recommandé cette exécution“. Il a ajouté que les commissions n’ont pas de conscience, seuls les individus en ont. Par ailleurs, on a appris que la commission avait recommandé l’exécution de la sentence de mort par quatre voix pour et une contre.

Mgr San Diego avait accepté, le 10 septembre dernier, de faire partie de cette commission à l’invitation du président. Il avait cependant émis des doutes sur le motifs de cette invitation, craignant de n’être utilisé que comme une façade destinée à légitimer la mise en ouvre d’un programme d’exécutions. C’est le conseiller spirituel du président, Mariano Velarde, président fondateur du groupe charismatique catholique El Shaddai qui avait suggéré la création de ce groupe de conseillers qui, depuis sa création, a recommandé la grâce pour quatre condamnés à mort dont la peine a été commuée en détention à perpétuité.

Le Congrès des Philippines, avait, en 1994, après 18 ans d’abolition, et malgré l’opposition de la hiérarchie catholique qui aujourd’hui encore continue sa lutte, imposé à nouveau la peine de mort pour les crimes qualifiés d’odieuxdans l’intention d’enrayer la montée de la criminalité. Mais la première exécution capitale n’eut lieu que le 5 février 1999, jour où fut exécuté Leo Etchegaray, accusé de viol d’enfant. Un peu plus tard, c’était le tour d’Eduardo Agbayani, accusé du même crime. Enfin, le 8 juillet 1999, trois hommes accusés du meurtre d’un policier subissaient le châtiment suprême. Aujourd’hui, plus de 1 000 pensionnaires des prisons philippines sont condamnés à mort et 21 d’entre eux subiront prochainement cette peine si la cour suprême confirme leur condamnation. Un membre du Congrès, Roilo Golez, président d’une commission de l’ordre public et de la sûreté, a récemment déclaré qu’il était question d’exécuter ces sentences de mort au rythme d’une par semaine.