Eglises d'Asie

RENCONTRE DES RECTEURS ET DIRECTEURS SPIRITUELS DES SEMINAIRES D’ASIE

Publié le 18/03/2010




(Assemblée spéciale du Synode des évêques d’Asie)

Suivant de près les éléments du rapport du Synode des évêques d’Asie, la rencontre avait pour objectif les points suivants :

informer les participants de l’orientation du Synode des évêques d’Asie ;

approfondir l’intérêt porté à la situation asiatique en ce qui concerne la formation des prêtres ;

partager les expériences en vue d’aider les formateurs dans leur fonction ;

identifier des points de formation très clairs en ce qui concerne le célibat et la vie spirituelle comme fai-sant partis de la vocation sacerdotale et missionnaire.

Cette rencontre a revêtu un caractère important, tant par l’aide qu’elle a suscité de la part des Conférences épiscopales et de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, mais aussi parce que c’était la première fois que des formateurs des séminaires du Japon, de Myanmar, du Cambodge et du Vietnam étaient présents. Cela a offert une chance supplémentaire aux uns et autres de se familiariser aux situations les uns avec les autres.

Les quatre objectifs de cette rencontre pour recteurs et directeurs spirituels des séminaires d’Asie a permis de riches partages entre les participants. Le résumé qui suit reprend ces objectifs comme canevas de notre réflexion.

Le Synode des évêques d’Asie

Le Synode des évêques d’Asie qui s’est tenu à Rome du 19 avril au 14 mai 1998 a donné le contexte général de ce séminaire. L’importance d’une solide formation des séminaristes dans l’Eglise d’Asie a retenu l’attention des évêques. Dans son discours d’introduction, le cardinal Paul San Kau-shi a mi en relief les recommandations de ce Synode au sujet de la formation des séminaristes :

études bibliques et patristiques ;

la centralité du Christ et de l’Esprit Saint dans l’étude ;

les traditions religieuses et philosophiques en Asie ;

l’expérience de la pauvreté ;

la communauté ;

la formation psycho-spirituelle.

Bien sûr, ces éléments de réflexion aident à concrétiser le programme de formation dans les différents pays. Ce séminaire a aussi été l’occasion de mettre en lumière la coopération entre la Congrégation pour l’éducation catholique et la Congrégation pour l’évangélisation des peuples avec l’Eglise locale en Asie, dans le but d’aider à adapter la formation dans les séminaires en fonction des réalités asiatiques. Enfin a été rappelé le défi que représente la formation en Asie des futurs évangélisateurs de ce continent.

Situation asiatique

Un des principaux objets de ce séminaire était d’approfondir notre intérêt sur la spécifique situation asiatique, dans le contexte de la formation des prêtres. A cette occasion, Mgr Orlando Quevedo, président de la Conférence épiscopale des Philippines, a rappelé les princi-paux centre d’intérêt de la première assemblée plénière des Conférences épiscopales d’Asie à Taiwan en 1974.

La formation des prêtres en Asie aujourd’hui se trouve immergée dans trois contextes bien précis, ceux de la pauvreté de la majorité de la population, des riches traditions religieuses et des cultures anciennes. Mgr Quevedo a souligné l’émergence de problèmes nouveaux comme l’érosion d’un grand nombre de valeurs culturelles, une érosion causée par la globalisation et le développement de la société de consommation. Sa conclusion mettait en lumière un unique moyen pour aider l’Eglise en Asie dans la nouvelle évangélisation pour ce troisième millénaire, celui d’avoir un nouveau type d’évangélisateurs, marquant ainsi un renouveau dans la formation des prêtres elle-même.

Pour nous aider dans notre réflexion, les formateurs des différents pays représentés ont partagé leur expérience. Ceux qui venaient de pays plus développés notaient l’effet négatif du matérialisme et de la consommation dans la réflexion sur la vocation elle-même. Ceux des pays moins développés laissaient apparaître le manque de moyens aussi bien que la nécessité d’une formation qui puisse répondre à un paysage social marginalisé. Tous les participants ont mentionné l’importance qui doit être donnée à l’inculturation. Les séminaristes devront ainsi devenir des prêtres formés à l’art du dialogue.

Le P. Thomas Hurst, pss, a donné une présentation très pratique du rôle des formateurs dans les séminaires. Il a souligné les rôles du recteur et du directeur spirituel et suggéré quelques traits précis pour la bonne marche du séminaire. Le P. Paul Bernier, pss, a présenté ensuite la formation pastorale dans un esprit missionnaire. Cela mettait en relief la charité pastorale qui doit caractériser le prêtre et qui est en même temps une exigence de la mission. Les prêtres sont ordonnés pour l’Eglise universelle et le programme du séminaire doit donner le sens de la mission aux séminaristes. La dernière conférence de cette rencontre a été donnée par Mgr John Du, évêque auxiliaire de Cebu (Philippines) sur son expérience d’une année spirituelle. C’est un phénomène grandissant dans les différents pays d’Asie et cela permet aux séminaristes de s’ancrer dans la vie même du Christ. Son modèle de formation était nouveau pour beaucoup et un vrai défi pour tous.

Partage d’expériences

Chaque pays représenté a donné un “état du séminaire”. Cela a permis de constater les énormes différences de taille et de style, mais aussi les différences économiques et sociales qui affectent la formation elle-même. Cela a permis surtout aux uns et aux autres d’être attentif aux situations et aux problèmes de chacun.

Le cardinal Stephen Kim, archevêque émérite de Séoul, a fondé sa conférence sur la série d’interviews qu’il a réalisée dans les sept séminaires de Corée. En ce qui concerne la pauvreté, la chasteté et l’obéissance, il nous a rappelé que ce ne sont pas juste des obligations monastiques ou des normes de l’Eglise, mais tout simplement des valeurs de l’Evangile, quelque chose demandé par la nature de la vie comme disciple du Christ. Il a noté que, de nos jours, les recteurs et directeurs spirituels ne doivent pas imposer ces sujets comme des “lois de l’Eglise”. Cela ne marche plus dans une société moderne. Mais au contraire rendre les séminaristes attentifs à ces valeurs comme liées et surgissant d’un profond amour pour le Christ.

M. Fabiano Choi Hong-jun et Sour Teresa Kim Seung-hae ont partagé également leur expérience. M. Choi, à la suite de nombreuses rencontres de laïcs, a rappelé l’espoir des laïcs envers leurs prêtres. Il a notamment insisté sur la véritable autorité du prêtre qui vient de sa proximité avec le Christ, plus que de la position qu’il tient dans l’Eglise. Sour Kim a souligné l’importance de la place des femmes dans la formation. Dès son entrée au séminaire, le séminariste vit, prie, étudie, évolue dans un monde masculin. Cela conduit bien souvent à des malentendus, à une mauvaise considération de la femme, et des religieuses en particulier, mais cela conduit aussi à l’arrogance et à l’autoritarisme, traits qui sont souvent rappelés par les laïcs.

Pour une santé de la vocation

Selon Pastores Dabo Vobis, “sans une formation humaine adéquate, la formation sacerdotale tout entière serait privée de son fondement nécessaire” (n. 43). Plusieurs interventions ont été centrées sur la formation humaine des candidats au sacerdoce. Des modèles et des critères ont été présentés pour développer la maturité émotionnelle et psychologique des candidats à la prêtrise. Le P. James Tucker, pss, a décrit les progrès des séminaristes à travers les différentes étapes de la maturité émotionnelle, a mis en lumière la complexité de la maturité elle-même, en présentant des outils pratiques pour une telle évaluation. Dans ce contexte, le P. Tucker a exposé son expérience de formateur en ce qui concerne la chasteté et le célibat.

A propos du célibat, le P. Eliakim Suela a rappelé que c’était le problème le plus important dans le discernement de la vocation sacerdotale et dans l’admission au séminaire. Il a noté les différents signes qui permettent de repérer une suffisante maturité pour la réponse à la vocation, aussi bien maturité intellectuelle, morale, physique que psychologique.

La formation spirituelle a été un point important des interventions et des échanges. Il a été rappelé qu’“il est essentiel, pour une vie spirituelle qui se développe dans l’exercice du ministère, que le prêtre renouvelle sans cesse et approfondisse toujours plus sa conscience d’être ministre de Jésus Christ en vertu de sa consécration sacramentelle et de la configuration au Christ, tête et pasteur de l’Eglise” (PDV 25). Le P. Alex Rebello s’est intéressé à la formation spirituelle en lien avec les traditions religieuses en Asie. Après avoir expliqué les éléments constitutifs d’une formation spirituelle, il a mis en relief les valeurs positives trouvées dans les différentes religions asiatiques qui peuvent enrichir le développement spirituel des candidats.

Toujours dans le domaine de la formation spirituelle, le P. Vicente Cajiling a parlé de la direction spirituelle dans le contexte asiatique. Après avoir rappelé que la direction spirituelle est un accompagnement, le P. Cajiling a présenté différentes méthodes qui peuvent être utilisées en direction spirituelle. Sa conférence s’est achevée par un exercice pratique de direction spirituelle.

Le séminaire pour les recteurs et directeurs spirituels s’est révélé être malheureusement trop court pour aborder tous les sujets. Nous retenons les interventions des uns et des autres, qui de l’avis général, ont été d’une aide plus que précieuse.

Recommandations

Les recommandations suivantes serviront à retenir les convictions qui se sont affirmées ou qui ont germé durant ce séminaire. Elles sont un défi pour tous, pour que nos efforts se tournent vers les séminaristes dont nous avons la charge.

En ce qui concerne les recteurs

pourront être choisis comme recteurs ceux qui aiment leur vie de prêtre, modèles de foi et de charité, ayant une vision pour l’Eglise future, et possédant une formation et une expérience de séminaire ;

les recteurs (et en fait tous les formateurs) de chaque séminaire d’Asie, devrait être familier de Pastores Dabo Vobis et de Ecclesia in Asia ;

les recteurs pourront partager avec tous les formateurs et professeurs, les résultats de ce séminaire, et chercher à réfléchir ensemble aux différentes suggestions ;

les recteurs doivent pouvoir construire l’unité du groupe et travailler à une vision commune pour le séminaire. Il doit être impartial et capable de prendre des décisions justes ;

les recteurs pourraient prendre contact avec les autres recteurs de séminaires en Asie dans un esprit de échange fraternel et fructueux ;

les recteurs devraient mettre en ouvre et exécuter, avec l’approbation et l’assistance des évêques locaux, un programme pour les prêtres pendant les cinq premières années de leur ministère ;

les recteurs devront être courageux et attentifs dans le choix des candidats au séminaire, spécialement au moment du recrutement et pendant la formation, en préférant la qualité à la quantité. Les candidats devront montrer des signes positifs de croissance et de vertus sacerdotales et non pas simplement présenter une absence de gros défauts ;

les recteurs devront être clairs au sujet de l’ecclésiologie, spécialement celle adoptée par la FABC, qui présente l’Eglise comme “communion” ;

les recteurs doivent être physiquement présents au séminaire. Leur propre partage dans la vie quotidienne, leur régularité et leur exemple sont extrêmement importants s’ils sont réellement présents.

En ce qui concerne les directeurs spirituels

ils devront être des hommes de prière et de discernement, capable de comprendre le mouvement de l’Esprit de Dieu sur leurs dirigés, et qu’ils puissent recevoir une formation appropriée en spiritualité et en direction spirituelle ;

ils doivent inspirer confiance en leur dirigés, en étant ouverts et disponibles, favoriser un esprit de confiance par leur discrétion, de sorte que les dirigés puissent parler franchement au sujet de leurs problèmes personnels, spécialement dans le domaine de la sexualité ;

un programme de formation spirituelle pour les directeurs spirituels des séminaires d’Asie pourra être mis en place pour proposer des outils de direction spirituelle, d’intégration psycho-sexuelle, de conseils et d’autres points importants qui pourront leur permettre de concevoir leur propre programme ;

un recyclage s’avère indispensable, tous les cinq ans, si ce n’est tous les trois ans ;

les directeurs spirituels devraient mettre ne place un programme de direction spirituelle qui pourrait être échangé avec les autres séminaires en Asie ;

il serait bon d’avoir de temps en temps, des retraites pour directeurs spirituels de différents séminaires.

En ce qui concerne les séminaristes

les séminaristes seront encouragés à recevoir l’ordination, non parce qu’ils n’auront montré aucune défaillance, mais parce qu’ils auront montré des signes de croissance dans l’amour du Christ, un souci pour les pauvres et les marginalisés, et une charité pastorale bien comprise ;

le séminaire devra avoir un programme de formation spirituelle, systématique et bien organisé, incluant des moyens précis permettant des contacts spirituels personnels, des conférences spirituelles, retraites et récollections, confessions, programme pastoral, programme de vacances, et programme pour le discernement des vocations.

Propositions

le groupe des formateurs devra être uni et coopératif. Ceux qui ne peuvent travailler ensemble et ne peuvent pas être modèles de réconciliation ne doivent pas faire partie de ce groupe ;

ces documents pourront être présentés aux séminaristes pour qu’ils puissent réfléchir eux aussi aux différents enjeux présents dans la formation ;

les séminaristes devront être davantage conscients de leur solidarité avec l’Eglise universelle et accroître leur enthousiasme pour s’offrir eux-mêmes en sacrifice pour l’Evangélisation des peuples du monde ;

la formation des séminaristes comme celles des recteurs et directeurs spirituels doit faire une bonne place à l’inculturation et aux besoins spécifiques de chaque Eglise en Asie ;

les séminaires d’Asie devraient être des modèles de vie simple, centrée sur le Christ, mettant en relief l’importance des valeurs familiales ;

la direction spirituelle est destinée à tous les séminaristes, et non pas seulement aux étudiants de philosophie ou de théologie.