Eglises d'Asie

L’Eglise catholique indienne désapprouve la récente proposition du gouvernement visant à réviser la Constitution du pays

Publié le 18/03/2010




Le président de la Conférence épiscopale indienne, Mgr Alan de Lastic, vient d’associer sa voix à celles des partis de l’opposition et du président de la République indienne pour désapprouver une éventuelle révision de la Constitution indienne, proposée par le Premier ministre Atal Behari Vajpayee. A l’occasion du cinquantième anniversaire de la Constitution, le Premier ministre avait proposé cette réforme aux députés réunis le 27 janvier dernier pour une session extraordinaire de l’Assemblée nationale. L’archevêque a fait remarquer qu’une tentative trop hâtive de révision porterait atteinte au sérieux d’un document dont l’élaboration avait exigé plusieurs années. Le président de la République, Kocheril Raman Narayanan, s’était auparavant adressé aux parlementaires pour les dissuader de suivre la suggestion de son Premier ministre, leur demandant de s’interroger pour savoir si c’était la Constitution qui s’était montrée défaillante ou eux qui avaient échoué à l’appliquer.

Devant le parlement, le Premier ministre a précisé que sa proposition de révision ne toucherait pas aux structures fondamentales de ce texte mais que l’intention de son gouvernement était de laisser aux générations à venir des institutions, particulièrement, le parlement fédéral et les assemblées législatives des divers Etats, dans un meilleur état que celui dans lequel il les avait trouvées J.P. Mathur, secrétaire général du BJP, le parti pro-hindou qui mène la coalition gouvernementale, a également déclaré ne pas vouloir transformer l’esprit de la Constitution mais seulement y introduire certains changements, devenus nécessaires après cinquante d’ans d’application. Selon Ram Jethmalani, ministre de la Justice, une commission de révision de la Constitution devrait être créée d’ici quelques jours. Elle aurait pour priorité l’amendement de certaines dispositions contenues dans la loi fondamentale du pays, principalement celles qui concernent les relations entre le gouvernement fédéral et les Etats ou encore la nomination des juges à la Cour suprême.

Dans les milieux de l’opposition, comme dans les minorités linguistiques ou religieuses, on se montre généralement satisfait de la Constitution actuellement en vigueur. Celle-ci garantit à tous les citoyens l’égalité devant la loi, la liberté de parole et d’expression, ainsi que le droit de pratiquer ou de propager sa religion. Elle accorde également des garanties spéciales aux diverses minorités linguistiques ou religieuses, ainsi qu’aux secteurs les plus fragiles de la société. Pour beaucoup, la hâte avec laquelle le gouvernement veut conduire la révision de la Constitution – dans les six mois, a dit le Premier ministre – apparaît suspecte et laisse présager que certains des droits fondamentaux garantis par la Constitution seront mis en cause. Cette hâte est vraiment surprenante a fait remarquer le P. Sebasti Lazarus Raj, directeur de l’Institut épiscopal de la communication sociale, de la recherche et de la formation. Le porte-parole du Parti du Congrès, Ajit Jogi, est persuadé qu’il s’agit là d’une étape précise d’un programme secret du BJP, programme destiné à introduire des changements fondamentaux et irréversibles dans la société indienne. C’est aussi l’avis de partisans de la laïcité de l’Etat, comme le professeur Farida Khan ; ce dernier pense que l’objectif ultime de la récente initiative du gouvernement est beaucoup moins l’amélioration de la Constitution que l’hindouisation » de la société. Un autre dirigeant du Parti du Congrès, avocat à la Cour suprême, fait remarquer que des amendements à la Constitution actuelle ont déjà été adoptés plusieurs fois par le parlement dans le passé. Mais, une révision, a-t-il souligné, est bien autre chose qu’un amendement. C’est une tentative pour changer la teneur fondamentale du texte.

Certains leaders du BJP, comme son secrétaire général, se sont indignés des intentions cachées qui leurs sont prêtées par leurs adversaires. Le secrétaire général du BJP a expliqué que la commission de révision prochainement mise en place ne pourrait rien faire de plus que de présenter des recommandations qui seront proposées aux votes des parlementaires.