Eglises d'Asie

Diverses organisations d’Eglise débattent de l’attitude éventuelle de l’Eglise locale s’il y avait rupture des relations diplomatiques entre le Vatican et Taiwan

Publié le 18/03/2010




Un forum a été organisé les 18 et 19 février 2000 à Taipei par six organisations catholiques du pays dans le but de faire le point sur l’état actuel et l’avenir des relations entre le Vatican et Taiwan, et de surmonter le début de crise de confiance provoquée par les récentes déclarations et prises de position du Saint-Siège concernant ce sujet. Une centaine de prêtres, de religieuses, de laïcs, dont un certain nombre d’universitaires, participaient aux travaux.

Les spéculations actuelles sur d’éventuels changements dans l’attitude diplomatique du Saint-Siège vis-à-vis de Taiwan et la sourde inquiétude qui les a accompagnées dans divers milieux du pays, ont été déclenchées par la déclaration du cardinal Sodano du 11 février 1999 (22). Ce jour-là, le secrétaire d’Etat du Vatican, avait affirmé que l’Eglise catholique est prête à transporter à Pékin la nonciature de Chine, qui se trouve aujourd’hui à Taiwan, non pas demain mais ce soir même si les autorités chinoises le permettent Bien que le responsable de la diplomatie du Vatican ait ajouté qu’une éventuelle reprise des relations avec la Chine continentale n’impliquerait nullement la fin des relations avec Taiwan, une certaine agitation et mauvaise humeur s’en étaient suivies davantage d’ailleurs dans les milieux politiques qu’au sein de l’Eglise catholique du pays. Le ministère des Affaires étrangères s’était rendu à Rome pour demander des précisions (23) et une relative aigreur s’était fait sentir dans diverses déclarations émanant du gouvernement taiwanais (24). Les autorités chinoises du continent, elles, s’étaient contentées de rappeler que toute reprises de relations entre le Vatican et la Chine continentale impliquerait une rupture de relations avec Taiwan (25).

Les débats du forum du 18 et 19 février ont rapidement témoigné d’une volonté générale de mettre les problèmes de l’Eglise locale au centre de la réflexion sur la crise actuelle. Le P. Jack Kuepers, l’un des principaux organisateurs de cette réunion a suggéré que la crise actuelle pouvait être l’occasion pour l’Eglise de Taiwan de s’interroger sur son identité. Cette même idée a été reprise par la sour Christine Lin, secrétaire de la Commission Justice et Paix pour les religieux et religieuses de Taiwan, qui a fait remarquer que le forum pourrait aider les catholiques à transformer ce qui est aujourd’hui ressenti comme une menace en occasion de réflexion sur le rôle de l’Eglise dans le pays. Paul Fan Chiang, président du Conseil archidiocésain pour l’apostolat des laïcs, a lui aussi invité l’Eglise du pays à dépasser cette affaire de relations internationales pour revenir à une vision de foi. Chen Wen-Liang qui, au nom d’un groupe de jeunes catholiques avait écrit au pape, lui demandant de ne pas rompre ses relations avec Taiwan, devrait désormais s’appuyer de son identité propre.

Il se peut que Sun Hsiao-chih, professeur de philosophie à l’Université nationale de Taiwan, se soit fait l’interprète de l’opinion presque générale lorsqu’il a affirmé que dans cette affaire concerne grandement l’autonomie de l’Eglise locale et ne peut rester confinée uniquement dans le domaine de la diplomatie. L’Eglise de Taiwan doit prendre conscience que le Saint-Siège désire se rapprocher de Pékin essentiellement pour des raisons pastorales. Cependant s’il rompait pour cela les liens diplomatiques avec Taiwan, l’Eglise locale de Taiwan se verrait obligée de protester avec force. Par ailleurs, un historien, Ku Wei-ying a fait remarquer qu’après une éventuelle reprise des relations diplomatiques avec le Vatican, la Chine du continent pourrait continuer de soutenir l’Eglise officielle et prolongerait ses efforts pour éliminer l’Eglise clandestine. Il faut donc que le rétablissement des liens avec Pékin tienne compte des sentiments de l’Eglise de Taiwan, du respect dû aux principes de la liberté religieuse et de l’universalité de l’Eglise, a-t-il conclu.