Eglises d'Asie

Le président Estrada annonce un moratoire surprise sur les exécutions capitales jusqu’en janvier 2001

Publié le 18/03/2010




Répondant aux requêtes répétées de l’Eglise catholique, le président Estrada a annoncé vendredi 24 mars un moratoire sur les exécutions capitales jusqu’en 2001. Cette annonce a constitué une surprise, Joseph Estrada s’étant jusqu’à maintenant montré partisan de la peine capitale et Ronaldo Zamora, son principal conseiller et secrétaire général à la présidence, ayant déclaré quelques heures auparavant que des obstacles juridiques empêchaient la mise en place d’un tel moratoire. Selon des experts du code pénal philippin, ce moratoire pourrait commuer automatiquement la peine de mort de plusieurs condamnés en prison à vie, la loi philippine stipulant que la peine capitale doit être impérativement administrée dans un délai compris entre douze et dix-huit mois après la confirmation de la sentence de mort par la Cour Suprême.

Selon ses propres déclarations, c’est à la demande de la Conférence épiscopale des Philippines et tout particulièrement à celle de son conseiller spirituel, Mgr Teodoro Bacani, évêque auxiliaire de Manille, que le président Estrada a pris cette décision : A la demande de la Conférence épiscopale, exprimée par Mgr Bacani, j’ai déjà donné mon accord à un moratoire parce que nous célébrons en ce moment une année jubilaire ». Selon un communiqué de la présidence, ce moratoire courra jusqu’en janvier 2001, date à laquelle la situation sera de nouveau étudiée.

Les associations de défense des droits de l’homme qui faisaient campagne aux côtés de l’Eglise pour l’abolition de la peine de mort ont exprimé leur satisfaction. Ce moratoire d’un an sur les exécutions est une victoire pour le mouvement abolitionniste », a déclaré Jose Manuel Dioko, président du Groupe d’assistance juridique gratuite ; il a aussi précisé que le gouvernement devait désormais aller plus loin et abolir la peine de mort, réintroduite aux Philippines en 1994 après qu’une série de crimes qualifiés d’odieux » eut soulevé l’indignation de l’opinion publique. Le Congrès des Philippines avait, en effet, en 1994 et après 18 ans d’abolition, réintroduit la peine de mort malgré l’opposition de la hiérar-chie catholique. En octobre dernier encore, le jour même où un condamné à mort était exécuté, le seul évêque siégeant au sein de la Commission de révision des peines capitales, l’organisme chargé de con-seiller le président dans l’exercice de son droit de grâce, avait démissionné (17). Au cours du seul mois d’avril, cinq condamnés à mort devaient être exécutés par injection d’une substance létale, une période coïncidant avec le Carême, la Semaine Sainte et Pâques dans ce pays très majoritairement catholique.

Depuis le 5 février 1999, jour où fut exécuté Leo Etchegaray, reconnu coupable de viol d’enfant (18) et qui marque la reprise des exécutions capitales après 23 ans de moratoire, sept condamnés ont été exécutés. Environ 1 345 hommes attendent aujourd’hui dans les couloirs de la mort des prisons du pays, faisant des Philippines l’une des nations en Asie où la peine capitale est le plus souvent prononcée par les tribunaux.