Eglises d'Asie – Indonésie
Sumatra : l’Eglise catholique se porte au secours des réfugiés qui ont fui les violences à Aceh
Publié le 18/03/2010
Ce service aux réfugiés a commencé en décembre dernier en réponse à la lettre pastorale de l’Avent de Mgr Alfred Gonti Datubara, archevêque de Medan. Dans cette lettre, Mgr Datubara appelait les catholiques à se mettre au service des réfugiés – tous musulmans – en provenance d’Aceh. Le gouvernement indonésien se charge en effet de l’hébergement de ces réfugiés mais n’a rien prévu pour leur fournir de quoi vivre. « Notre premier travail a donc consisté à faire un état des lieux et à recenser les besoins les plus urgents », explique encore le P. Paul Rahmad. « Aujourd’hui, à la date du 4 mars, nous apportons une aide humanitaire à 2 550 familles, soit un total de 20 461 réfugiés ».
Au départ, les réfugiés se sont montrés surpris et mal à l’aise de découvrir que les bénévoles qui les aidaient étaient des catholiques. « Maintenant, leur méfiance a disparu car ils ont vu par eux–mêmes que nous étions sincères et désintéressés dans notre aide et que nous ne faisions pas cela avec des arrière–pensées », précise Augustinus Suwadi, responsable du Bureau d’aide humanitaire de l’archidiocèse de Medan.
Selon Augustinus Suwadi, « les réfugiés, pratiquement tous des migrants originaires de Java (10), ont quitté Aceh à la fin de l’an dernier lorsque les heurts entre l’armée indonésienne et les hommes du GAM [Gerakan Aceh Merdeka, Mouvement pour Aceh libre] ont gagné en intensité ». Depuis le milieu des années 1970, l’armée et le GAM, mouvement musulman séparatiste, s’opposent durement à Aceh, cette province quasi exclusivement musulmane située à la pointe nord-ouest de l’île de Sumatra (11). Avec la chute de Suharto et l’arrivée au pouvoir d’Abdurrahman Wahid en octobre dernier, les attentes des indépendantistes du GAM ont redoublé et les combats ont repris, provoquant un nouvel afflux de réfugiés hors d’Aceh (12).
Selon les témoignages de nombreux réfugiés installés à Medan, les hommes du GAM, par des actions de terreur, cherchent à forcer les nombreux migrants originaires de Java à quitter Aceh. Oyo Sumantri, originaire de l’ouest de Java et qui vivait dans l’est d’Aceh, raconte comment lui et sa famille ont été attaqués par des hommes du GAM le 8 décembre 1999 : « Cinq minutes après que je fus revenu de ‘taraweh’ [la prière du soir au cours du ramadan], plusieurs hommes que je crois appartenir au GAM ont pénétré de force chez moi. Ils ont pris tout ce qu’ils pouvaient prendre puis ils nous ont attachés, ma femme, mon fils et moi, à un pont voisin. Là, ils nous ont frappés à coups de machette et ils sont partis, nous laissant pour morts ». En montrant les cicatrices que lui et son fils portent au cou, il explique que seule sa femme est morte. Un autre réfugié, Sugeng Herianto, originaire de Java-Est, rapporte que les hommes du GAM ont commencé à attaquer et brûler les villages de migrants en novembre dernier. « Ils avaient fixé le 4 décembre, jour anniversaire de la fondation de leur mouvement, comme date–butoir. A cette date, nous devions tous être partis. Avant de partir, ils nous ont contraints à leur vendre nos biens à vil prix. Par exemple, une bicyclette, d’une valeur de 300 000 roupies (41 dollars américains), était vendue pour 5 000 roupies. » A l’image de la plupart des réfugiés de Medan, Herianto ne souhaite pas retourner à Aceh. Il ne souhaite pas non plus se réinstaller à Java. « J’espère me fixer ailleurs », conclut-il.