Eglises d'Asie

Bihar : un projet d’adduction d’eau potable fait des miracles

Publié le 18/03/2010




Un projet commun à deux diocèses de l’Eglise catholique pour aménager des adductions d’eau potable en faveur des plus démunis a permis, dans plusieurs villages de l’est indien, non seulement d’éviter épidémies et décès mais a même réussi à briser les barrières multi-séculaires de la division de la société en castes.

Les diocèses de Bettiah et de Muzaffarpur, dans l’Etat de Bihar, ont lancé le projet, il y a deux ans, après que plusieurs postes de missions aient signalé un accroissement sans précédent » des maladies d’origine hydrique durant la saison des pluies. Sour Francisca de la Congrégation des Sours de l’Immaculée Conception, coordinatrice pour les questions de santé du diocèse de Muzaffarpur, a expliqué qu’après l’installation de pompes destinées à alimenter une population de 125 000 personnes, aucun décès dû à l’eau contaminée n’avait été signalé dans l’ensemble des 200 villages de la zone.

Une enquête conduite dans quelque 50 villages du district de Champaran a révélé en effet, qu’entre 1998 et 1999, plus de 5 000 cas de typhoïde, dysenterie, diarrhée, choléra et autres avaient été recensés, faisant 50 victimes. Beaucoup de ces victimes étaient des femmes et des enfants des basses castes hindoues a confirmé une autre enquête menée par le Khoj (recherche), un service de santé tenu par la Congrégation des Sours du Sacré Cour, une congrégation indienne. Le Centre de développement socio-économique (SEDC), le service d’action sociale commun aux deux diocèses qui ont mis sur pied le projet, avait fixé à 700 le nombre de pompes nécessaires pour extraire de la nappe phréatique l’eau potable destinée à quelque 21 000 mushahar (mangeurs de rat), chamar (cordonniers) et autres familles tribales. Le directeur du SEDC, James Seraphim, a indiqué que le projet des deux diocèses concernait les 200 villages des 35 postes de mission dispersés à travers les 12 districts inondables de Bihar, l’Etat indien le plus arriéré.

Le P. Chacko Pullolil, jésuite, en charge de la mission de Madhuband, nouvellement implantée, révèle que le projet a aussi permis de briser les barrières de séparation entre castes dans de nombreux villages. Il a expliqué que les hautes castes, après avoir observé l’amélioration des conditions de santé chez les exintouchables », faisaient dorénavant la queue devant les pompes en même temps que les gens des basses classes, au mépris des différences de castes. Le prêtre indique que le forage d’un puits profond coûtait entre 75 et 150 dollars américains. Une somme que même les hautes castes ne peuvent rassembler. Ainsi, pour survivre et être en bonne santé, ils en sont venus à oublier les inhibitions nées de la division de la société en castes ». Pour Mgr John Baptist Thakur, évêque catholique de Muzaffarpur, la fin progressive de l’esprit de caste est le vrai miracle » qu’a opéré ce projet d’eau potable : Nos pompes à main ont fait ce que les lois gouvernementales et les programmes de conscientisation n’ont jamais pu réussir en des dizaines d’années»

D’après James Seraphim, le directeur du SEDC, cinq millions de laissés pour compte, sur un district peuplé de 30 millions d’habitants, souffrent de manque d’eau potable. La santé des plus démunis est à la merci de puits peu profonds, de mares ou de rivières ils boivent l’eau contaminée ». Jai Ramlal Meena, un fonctionnaire du gouvernement de Bihar, a tenu à préciser que l’Etat avait installé un demi-million de pompes à main durant ces vingt dernières années dans les 12 districts inondables. Pourtant, un travailleur social, Pramod Kumar Singh, affirme, pour sa part, que ces chiffres, on les trouve dans les rapports. Les vrais bénéficiaires sont les gens riches des hautes castes ». Sour Elise, de la Congrégation du Sacré Cour, directrice du Khoj, dit que le gouvernement possède et les plans et l’argent pour des adductions d’eau potable. Mais qui se soucie des pauvres et des démunis » Meena Dubey, géologue et chercheur dans un institut de recherche local, a observé que les pics des épidémies d’origine hydrique se situaient au moment des inondations, entre juillet et octobre. Les gens n’obtiennent que de l’eau contaminée même en pompant à 18 mètres de profondeur. Il y a une vingtaine d’années, c’était suffisant pour obtenir de l’eau potable », mais maintenant il faut pomper plus profond à cause des engrais chimiques et des insecticides utilisés dans l’agriculture, explique Dubey. Le P. Alex Kurissummottil, curé de la paroisse de Marpa, dans le diocèse de Muzaffarpur, indique de son côté, que les forages effectués dans les paroisses atteignaient en moyenne 200 pieds (60 m.) de profondeur afin d’éviter toute contamination.