Eglises d'Asie

Les autorités vietnamiennes rappellent à l’ordre la presse du pays entraînée selon eux dans une dérive commerciale

Publié le 18/03/2010




Même si la presse indépendante n’existe pas encore au Vietnam, on a pu assister, ces derniers temps à une multiplication des titres de presse, encore tous rattachés d’une façon ou une autre à des organismes d’Etat ou du Parti. Le sixième congrès des journalistes vietnamiens qui s’est tenu à Hanoi les 24 et 25 mars a été une occasion de recenser les diverses publications quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles du pays, généralement en langue vietnamienne mais aussi en anglais ou en français. Le bilan établi est impressionnant. Il existe aujourd’hui au Vietnam 451 journaux et organes de presse : 163 d’entre eux ont une parution quotidienne ou hebdomadaire (19). Il faut ajouter à cette presse écrite, une agence de presse nationale largement diffusée sur le réseau internet (réseau internet où l’on peut trouver également en vietnamien et en anglais une édition électronique du quotidien du Parti, le Nhân Dân), une chaîne de télévision nationale, une radio nationale, trois chaînes de télévision régionales, 61 radios et télévisions provinciales.

Dans le cadre de l’économie de marché, cette multiplication des titres a entraîné une très sévère concurrence entre les journaux qui cherchent à augmenter leur tirage afin de profiter de la manne publicitaire, longtemps absente de la presse vietnamienne, aujourd’hui de plus en plus envahissante. Dans le discours que le Premier ministre Phan Van Khai a adressé aux participants de ce congrès, discours rapporté par le Nhân Dân du 25 mars dernier, il n’a pas ménagé ses critiques et a exprimé la méfiance que lui inspire l’esprit qui anime de plus en plus la presse actuelle. Il a cité, en particulier, comme principaux défauts de la presse actuelle, son orientation commerciale, sa recherche effrénée d’avantages matériels qui la pousse à se mettre au service d’intérêts particuliers en l’éloignant des principes directeurs et des objectifs originaires du journalisme. Ces défauts qui s’aggravent de jour en jour ont sévèrement affecté le contenu de la presse vietnamienne. Selon le Premier ministre, celle-ci désormais néglige les sujets véritablement importants qu’elle devrait diffuser auprès de ses lecteurs. Par contre, les journalistes font peu de cas de la vérité et de la confiance que leur témoignent les lecteurs. On observe tous les jours davantage une baisse du niveau moral des journaux et de leurs rédacteurs. En foi de quoi, le Premier ministre a appelé les journalistes à combattre la corruption et les tentatives de sabotage des forces hostiles » ainsi que les phénomènes négatifs, la culture délétère et débauchée » afin de défendre les idéaux révolutionnaires du Vietnam communiste. Il faut que les journalistes soient courageux dans la lutte contre les faits négatifs dans la société pour contribuer à la restauration et à la consolidation de la confiance du peuple envers le Parti, l’Etat et notre régime»

D’autres critiques concernant la mentalité des journalistes et la qualité de leurs articles ont paru dans la presse officielle à l’occasion de ce congrès. On a pu lire dans le journal Lao Dông du 24 mars les propos du secrétaire d’Etat à la Culture et à la Communication, le général Phan Khac Hai, allant jusqu’à traiter de voyous (thang) certains journalistes dévoyés profitant du prestige de leur journal pour se livrer à des actions malhonnêtes, par exemple, utilisant la campagne menée par leur journal contre la concussion pour gagner de l’argent en faisant chanter certaines personnalités suspectes.

Les critiques du Premier ministre ne concernaient pas directement, semble-t-il, les journaux religieux peu nombreux au Vietnam, contrôlés eux aussi par le Front patriotique auquel ils sont rattachés. Il en existe deux pour les milieux catholiques du Vietnam : Le Catholique vietnamien, qui paraît à Hanoi, et Catholicisme et Nation, hebdomadaire avec supplément mensuel, qui est l’organe du Comité d’union du catholicisme de Hô Chi Minh-Ville. L’Eglise bouddhiste patronnée par l’Etat possède, elle aussi, un hebdomadaire : Giac Ngô. Dans une intervention publiée dans le Nhân Dân du 25 mars, à l’occasion de ce congrès des journalistes, un de ses rédacteurs, le vénérable Thich Giac Toan, a exposé ses vues sur les objectifs que devait viser ce type de publication. Elle doit se soumettre, a-t-il dit, à la mission générale assignée par le Premier ministre à tous les journaux et remplir de plus une fonction qui lui est propre, à savoir diffuser la doctrine religieuse, en résumé servir en même temps, les deux domaines profane et religieux.