Eglises d'Asie

Un tribunal populaire de quartier juge du cas “Chân Tin” en son absence

Publié le 18/03/2010




L’appel des religions pour la liberté religieuse adressé au gouvernement vietnamien en septembre 1999 (20), dont le religieux rédemptoriste bien connu, le P. Chân Tin, avait été le principal inspirateur, n’en finit pas de soulever des vagues. Cet appel demandait la suppression de l’article 4 de la Constitution qui met toute la société sous le patronage du socialisme athée, l’abandon de dernières directives en matière religieuse et le rétablissement du statut légal des religions au Vietnam, tel qu’il existait avant 1975. Ces revendications avaient été peu appréciées des autorités qui ont ensuite multiplié les tracasseries policières à l’encontre des signataires. L’un d’entre eux, l’ancien dirigeant du caodaïsme, Trân Quang Châu, âgé aujourd’hui de 84 ans, épuisé par le harcèlement de la police, avait fini par signer un texte présenté par les policiers accusant deux autres signataires, le P. Chân Tin et M. Lê Quang Liêm, représentant du bouddhisme hoa hao, de l’avoir forcé à signer le texte, tout en assurant à ses amis que tout le monde comprendrait la raison pour laquelle il avait cédé à la pression (21).

Le P. Chân Tin avait déjà reçu un certain nombre de convocations à des séances de travail » (interrogatoires) auxquelles il ne s’était pas rendu. Le 13 mars dernier, une réunion populaire » a été convoquée en son absence dans le 9e quartier du 3e arrondissement de Hô Chi Minh-Ville pour juger de son cas (22). Y participaient un certain nombre de responsables locaux et des personnes très soigneusement choisies. Un acte d’accusation dressé par la sûreté urbaine y a été lu qui a retenu contre le religieux rédemptoriste, âgé aujourd’hui de plus de 80 ans, quatre griefs principaux. Il a abusé de la bonne foi du représentant du caodaïsme. Il s’est opposé au Parti en exigeant la suppression de l’article 4 de la Constitution. Il a essayé d’éloigner les religions de l’Etat. Il a enfin désobéi aux évêques catholiques du Vietnam en se mettant en désaccord avec la lettre commune de 1980. A l’issue de cet exposé des crimes du religieux, deux conclusions ont été proposées : ou bien traduire le religieux devant le tribunal ou le rééduquer sur place.

Le supérieur religieux du P. Chân Tin avait été invité à cette réunion populaire. Dans son intervention, il fait remarquer que le P. Chân Tin n’avait pas été convoqué à cette séance et que l’on ne pouvait donc pas lui reprocher son absence. Il a demandé avec grande insistance qu’une instruction judiciaire soit ouverte contre le P. Chân Tin et qu’il soit traduit devant un tribunal où un avocat pourra le défendre. Avant la conclusion de cette instruction, personne n’a le droit de considérer le P. Chân Tin comme un coupable, surtout pas ses supérieurs religieux qui le laissent libre de ses opinions politiques, a-t-il ajouté. Il a également rapporté des propos du P. Chân Tin rappelant que, sous tous les régimes, il a combattu pour la justice et les droits de l’homme.