Eglises d'Asie

Le dixième voyage d’une délégation du Saint-Siège au Vietnam n’a pas obtenu les résultats escomptés

Publié le 18/03/2010




Une certaine discrétion a entouré le voyage annuel de la délégation romaine au Vietnam, le dixième depuis 1990, date à laquelle le cardinal Etchegaray avait inauguré ce type de contact avec les autorités vietnamiennes. Contrairement à l’habitude, le départ de la délégation et son arrivée à Hanoi le 2 mai n’ont été précédés d’aucun communiqué de presse, pas plus en provenance du Saint-Siège que du gouvernement vietnamien. Durant le séjour au Vietnam de la délégation qui, comme à l’accoutumée, se composait de Mgr Celestino Migliore de la secrétairerie d’Etat et de Mgr Barnabé Nguyên Van Phuong de la congrégation pour l’évangélisation des peuples, l’annonce du décès de l’ancien Premier ministre Pham Van Dông a éclipsé toute autre actualité. Au lendemain de son retour à Rome, le 7 mai, un bref communiqué de presse a été publié par la salle de presse du Vatican. Il mentionnait les diverses étapes du voyage et relevait que, pour le moment, le Saint-Siège attendait les réponses du gouvernement aux propositions de nominations épiscopales qui lui avaient été faites. Le communiqué du Vatican était suivi deux jours plus tard par celui de Hanoi (27). Succinct et discret lui aussi, il n’a pas mentionné les sujets abordés lors des négociations et s’est contenté de décrire “l’atmosphère franche et ouverte » de la rencontre et d’affirmer que “les deux parties ont exprimé le désir de maintenir et de promouvoir les relations existantes dans un esprit de bonne volonté, d’égalité et de coopération pour l’intérêt commun, la paix, l’amitié et le progrès social de par le monde ».

Au cours du séjour des représentants de Rome au Vietnam, trois séances de négociations ont été menées avec les membres du Bureau des Affaires religieuses. Deux se sont déroulées dans la journée du 3 mai. La troisième série a eu lieu dans l’après-midi du 5 mai, la matinée ayant été consacrée à une rencontre avec le vice-ministre des Affaires étrangères, M. Chu Tuan Cap.

Selon une source proche de la délégation du Saint-Siège, le climat des négociations, durant lesquelles la délégation a eu pour principal interlocuteur M. Lê Quang Vinh, a été relativement cordial, mais beaucoup de restrictions ont été émises du côté gouvernemental. C’est ce terme de restriction » que le chef de la délégation vaticane a choisi pour caractériser le climat régnant. Sur les six propositions de nominations épiscopales faites par le Saint-Siège, deux seulement ont été acceptées immédiatement. D’autres ont été refusées tandis que la réponse du gouvernement à quelques autres a été remise à plus tard. D’autres sujets ont été abordés durant les entretiens, en particulier celui de la liberté accordée aux jeunes gens de rentrer sans contrainte aussi bien dans les séminaires que dans les maisons religieuses. Jusqu’à présent, l’accord des autorités est nécessaire à l’entrée des candidats au sacerdoce au séminaire et, à chaque rentrée, tous les deux ans, les établissements ne peuvent accueillir qu’un nombre restreint de séminaristes, nombre imposé par l’Etat. Par ailleurs le décret n° 26 exige de tout candidat à la vie religieuse qu’il y soit autorisé par les autorités locales. Aux plaintes des représentants du Saint-Siège à ce sujet, les interlocuteurs gouvernementaux ont répondu que l’Etat vietnamien obéissait sur ce point à ses propres critères, différents des critères de l’Eglise.

Lorsque la question de l’établissement de relations diplomatiques entre le Saint-Siège et l’Etat vietnamien a été abordée, les membres de la délégation ont senti chez leurs interlocuteurs une certaine réticence et le désir de renvoyer cette question à un avenir indéterminé. Dans ces conditions, l’éventuel voyage du pape au Vietnam lié par l’Etat vietnamien à l’établissement de ces relations semble de plus en plus improbable. C’est en effet à la suite de la demande des évêques d’être autorisés à inviter le pape au Vietnam, que les autorités du pays avaient soulevé ce préalable, l’établissement de relations diplomatiques avec le Saint-Siège. L’année dernière, lors des précédentes négociations (28), lorsque les représentants du gouvernement leur avaient fait connaître leurs intentions, les membres de la délégation s’en étaient réjouis. Une délégation des Affaires étrangères du Vietnam aurait même dû en discuter à Rome avec le Saint-Siège au mois de mai ou juin 1999, à l’occasion d’un voyage en Italie. Ces négociations n’ont jamais eu lieu.

Des détails plus précis sur les nominations seront certainement connus ultérieurement lorsque la délégation aura rendu compte de son voyage au Souverain Pontife et aux congrégations concernées. Mais d’ores et déjà, quelques informations en provenance du Vietnam permettent d’apprécier plus précisément les résultats de cette nouvelle série de négociations. La proposition de nomination la plus importante concernait le poste d’archevêque de coadjuteur de Hanoi, diocèse où le cardinal, Mgr Paul Pham Dinh Tung, et son évêque, Mgr Lê Dac Trong, sont déjà très âgés. Par deux fois, l’évêque de Nha Trang, Mgr Paul Nguyên Van Hoa, avait été proposé à ce poste lors des négociations précédentes. Jusqu’à présent la réponse du gouvernement avait été différée. Cette fois-ci, le gouvernement l’a refusé sans ambages. Hanoi n’aura pas de coadjuteur cette an-née et l’on peut craindre que la situation soit bloquée pour quelque temps, une situation rappelant celle qui régnait à Hô Chi Minh-Ville, avant et après la nomination de l’administrateur apostolique, Mgr Huynh Van Nghi.

Sur les six candidats présentés par la délégation, deux ont reçu une réponse favorable. L’évêque de Da Nang, très affaibli par la maladie, qui a présenté sa démission depuis quelque temps aura un successeur. Il en sera de même pour le diocèse de Vinh Long, où l’évêque principal Mgr Jacques Nguyên Van Mâu et son auxiliaire, Mgr Raphaël Nguyên Van Diêp, sont également âgés. La réponse a été remise à plus tard pour les propositions de nomination présentées par le Saint-Siège pour le diocèse de Hung Hoa, sans évêque depuis la mort de Mgr Nguyên Tung Hiêu au mois de mai 1992, pour Bui Chu, dont le siège est vacant depuis la mort de Mgr Vu Duy Nhât le 11 décembre 1999. Quant au diocèse de Hai Phong, vacant depuis le décès de Mgr Nguyên Tung Cuong, le 10 mars 1999. la délégation n’a fait encore aucune proposition.

Comme chaque année, la délégation a largement pris contact avec les responsables et les fidèles de l’Eglise locale. Le premier jour du séjour à Hanoi, le 2 mai, avait été consacré à la rencontre des membres du Bureau permanent de la Conférence épiscopale vietnamienne. Des évêques et des administrateurs apostoliques des diocèses du Nord-Vietnam s’étaient déplacés pour s’entretenir avec la délégation. La délégation avait fait savoir à l’avance son intention de rendre visite à deux diocèses, Phu Cuong et Xuân Lôc. Une seule des deux destinations a été retenue par les autorités civiles, Phu Cuong, où le diocèse au grand complet, son nouvel évêque, Mgr Pierre Trân Dinh Tu, son vicaire général, ses prêtres et la foule des fidèles ont accueilli chaleureusement la délégation, le 4 mai. Les visiteurs ont été informés de l’historique du diocèse créé en 1965 et de sa situation actuelle par un exposé du vicaire général avant la messe et par l’homélie prononcée par l’évêque du lieu qui, après avoir fourni l’étymologie de Phu Cuong (richesse et pauvreté), a décrit comment le diocèse met sa richesse spirituelle au service des pauvres de la région.