Eglises d'Asie

Tripura : les chrétiens se défendent d’apporter leur soutien aux groupes rebelles des ethnies minoritaires

Publié le 18/03/2010




Le 18 avril dernier, dans l’Etat de Tripura au nord de l’Inde, un chrétien, Gunnam Halam, travaillant à temps partiel comme secrétaire de village pour l’Eglise baptiste de Dharmanagar, a été trouvé en possession d’explosifs et arrêté par la police. La presse locale a fait grand bruit autour de ce fait divers et en a profité pour faire peser de graves soupçons sur la communauté chrétienne et sur ses dirigeants, les accusant de soutenir la cause de certains groupes rebelles appartenant aux minorités ethniques de la région. L’Etat de Tripura est, en effet, un des sept Etats de l’Inde septentrionale où se développe aujourd’hui un mouvement de rébellion au sein de certaines ethnies supportant de moins en moins la présence et l’influence dans la région d’habitants d’origine étrangère. L’un des mouvements les plus connus est le Front national de libération du Tripura.

Le révérend Rabindra Debbarma, secrétaire général de l’Eglise baptiste, s’est vivement insurgé contre les allégations des journalistes à l’encontre de la communauté chrétienne. Après avoir fait remarquer que son Eglise avait mis en garde les chrétiens contre toute compromission avec les rebelles, il a précisé que Halam n’était employé qu’à temps partiel par l’Eglise et que son véritable métier était le commerce. Un autre dirigeant baptiste a souligné que la presse avait donné un caractère sensationnel » à l’événement et qualifié Halem de dirigeant d’Eglise » dans le seul but de ternir l’image de l’Eglise, ce qui était profondément injuste. On ne peut attribuer à l’Eglise les malversations d’un individu. Par ailleurs, des membres de la communauté ont fait remarquer que l’accusation proférée aujourd’hui contre les chrétiens n’était pas nouvelle et que déjà, dans le passé, certains groupes, parmi lesquels le mouvement d’extrême droite, le Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Corps national des volontaires), avaient accusé les chrétiens de soutenir le mouvement de rébellion. Le christianisme, a souligné le pasteur, joue ici le rôle de bouc émissaire. Les militants de la rébellion appartiennent à différentes religions et leurs affiliations politiques sont diverses. L’Eglise, elle, se tient en dehors de la mêlée.

Un spécialiste de la démographie de la région a confirmé les dires des représentants de l’Eglise baptiste. La rébellion dans la région n’a rien à voir avec le christianisme auquel adhérent seulement 1,16 % des 2,7 millions de la population de l’Etat. Le mouvement de rébellion est un mouvement de résistance des populations autochtones contre la domination de plus en plus visible de groupes de population venus d’ailleurs. La masse des migrants de la région est venue du Bangladesh à partir de l’indépendance de l’Inde en 1947. Les peuples indigènes formaient 80 % de la population en 1930. Ils ne représentent plus aujourd’hui que 20 %. Les migrants ont pris le contrôle des plaines et repoussé les autochtones vers les montagnes, évolution qui a fait naître la violence armée qui sévit actuellement.

Des centaines de personnes meurent chaque année lors des attaques de la rébellion et des représailles qui les suivent. Pour le mois d’avril seulement, vingt habitants issus de la migration ont été tués. Lors d’une contre-attaque, on a déploré un mort du côté de la population autochtone.