Eglises d'Asie

Un projet de loi sur le mariage chrétien soulève des protestations unanimes chez les responsables des diverses communautés chrétiennes

Publié le 18/03/2010




Chez les responsables des principales communautés chrétiennes de l’Inde, c’est un tollé général qui a accueilli le projet de loi sur le mariage chrétien que le gouvernement fédéral devait mettre en discussion durant l’actuelle session du parlement, laquelle se terminait le 16 mai. Le projet a été présenté aux principaux dirigeants chrétiens de l’Inde le 28 avril dernier par le ministre de la Loi et de la Justice. Ces derniers ont eu des réactions extrêmement négatives et ont trouvé le projet “injuste et discriminatoire ». Mgr Alan de Lastic, président de la Conférence épiscopale indienne, a déclaré “qu’il n’était pas possible de présenter la loi au parlement dans sa forme actuelle 

Depuis plus de quarante deux ans, les chrétiens demandent que soit amendé l’ensemble des lois sur le mariage les concernant, lois établies par les Britanniques à l’époque coloniale, il y a plus d’un siècle. En 1997, en vue de permettre une mise à jour de la loi sur le mariage chrétien qui date de 1873, de la loi sur le divorce chrétien promulguée en 1869 et de la loi sur la succession de 1925, les chrétiens avaient présenté à la Commission des minorités le texte d’un projet de loi. Celui-ci, élaboré sous le contrôle de l’Eglise protestante du Nord de l’Inde et de la Conférence épiscopale catholique, était le fruit d’une consultation effectuée dans 39 communautés chrétiennes de l’Inde qui avait duré sept ans (10). Le texte proposé par le gouvernement aujourd’hui est fort différent du projet qui lui avait été envoyé, il y a trois ans, par les divers responsables chrétiens. Mgr de Lastic qui a relevé ses nombreux défauts l’a jugé totalement inacceptable ». Pendant trois ans, a souligné le président de la Conférence indienne, nous n’avons pas entendu parler de lui. Soudainement, le texte nous revient, totalement nouveau et comportant des dispositions inacceptables ».

Un certain nombre de clauses contenues dans le nouveau texte législatif sont catégoriquement rejetées par le plus haut responsable des catholiques de l’Inde. Il s’élève contre l’article du nouveau projet rendant illégal, un mariage contracté entre chrétien et non-chrétien dans une église, de tels mariages ne pouvant être enregistrés selon la nouvelle loi. Par ailleurs, il met en cause la disposition qui stipule que les prêtres qui auraient célébré des mariages en infraction avec les dispositions prescrites seraient passibles de peines pouvant s’élever jusqu’à dix ans de prison ou seraient soumis à de sévères amendes. La communauté chrétienne ne peut que craindre qu’il soit fait un mauvais usage de ces dispositions d’ordre pénal. Par ailleurs, bien que le ministre de la Loi et de la Justice ait donné l’assurance que les amendements ne seraient votés qu’après consultation avec les dirigeants chrétiens, Mgr de Lastic juge avec sévérité la hâte avec laquelle le gouvernement a proposé le projet à la discussion des parlementaires.

Le mécontentement règne également au sein des communautés membres du Conseil national des Eglises protestantes en Inde. Son représentant, le révérend Thampu, a même dit que le projet frise le sacrilège puisqu’il met le mariage et le divorce sur le même plan, ce qui est inacceptable pour l’Eglise Selon lui, le projet de loi va créer une situation absurde. La loi prévoit que si un couple chrétien a notifié au prêtre son intention de se marier depuis trente jours, celui-ci est obligé de les marier, sinon il sera passible de dix ans de prison ou d’une amende. Célébrer un mariage pour éviter d’être sanctionné par l’Etat, fait remarquer le pasteur, cela signifie que le prêtre doit prendre garde aux lois de l’Etat avant d’obéir aux lois de l’Eglise sur le mariage. S’il en était ainsi, l’Eglise perdrait le contrôle sur ses prêtres 

Un certain nombre de responsables chrétiens croient précisément que cette logique sous-jacente au projet est sa véritable raison d’exister. C’est ainsi que le secrétaire général de la Conférence épiscopale, Mgr Oswald Gracias, auxiliaire de Bombay, suspecte la nouvelle loi d’être un outil au service du projet de démantèlement du christianisme mis en ouvre par le gouvernement. John Dayal, personnalité laïque bien connue du monde catholique, voit dans cette proposition de loi une étape du programme anti-chrétien du nationalisme hindou.