Eglises d'Asie

Uttar Pradesh : le cuisinier du foyer où a été tué un religieux franciscain début juin est mort dans les locaux de la police, sans doute sous l’effet de la torture

Publié le 18/03/2010




Placé en garde à vue, le cuisinier du foyer où un religieux franciscain a été tué début juin (10) est mort le 17 juin dans les locaux de la police. Bien que la police de Narauli où Vijay Ekka, âgé de 23 ans, était détenu depuis le 10 juin affirme qu’il s’agit d’un suicide, les responsables ecclésiastiques locaux suspectent le jeune catholique d’être mort sous la torture. “Où allons-nous si ceux qui sont chargés de nous protéger s’adonnent à des activités antisociales ? », a demandé Mgr Vincent Concessao, archevêque d’Agra, au cours d’une conférence de presse à New Delhi, le 18 juin. L’archevêque qui a vu le corps d’Ekka, a affirmé que celui-ci était cyanosé et portait des traces de coups. Il a affirmé que cette mort n’était à l’évidence qu’un “meurtre » et a demandé que des mesures sévères soient prises à l’encontre des policiers responsables. La nuit suivante, la chaîne de télévision locale annonçait que le ministre-président de l’Uttar Pradesh, R.P. Gupta, avait ordonné l’arrestation du chef du poste de police incriminé et de ses collègues. Selon le P. Bhaskar, secrétaire de Mgr Concessao, le rapport d’autopsie n’a pas encore été rendu public mais la presse d’Agra faisait état d’une mort par strangulation.

Le Forum des chrétiens unis pour la défense des droits de l’homme (UCFHR) a publié un communiqué qualifiant d’illégale » l’arrestation d’Ekka. Celui-ci travaillait depuis six ans pour les Frères missionnaires franciscains, une congrégation religieuse indienne, et vivait avec sa famille dans l’enceinte de la mission de Nawada. C’est là qu’il a découvert, au matin du 8 juin, le corps inanimé de Frère Kuzhikandam. Il a affirmé ensuite n’avoir rien vu ni rien entendu durant la nuit. Mgr Concessao a cité les déclarations des Frères qui ont apporté à manger à Ekka au poste de police où il était détenu. Celui-ci leur avait parlé des tortures qu’il subissait et de sa peur de mourir durant les interrogatoires. La police a sans doute voulu obtenir des aveux de la part d’Ekka pour pouvoir classer l’affaire et en faire une affaire interne à l’Eglise, a encore ajouté l’archevêque.

Selon l’UCFHR, la police a demandé aux Frères qui apportaient encore une fois de la nourriture à Ekka, le 17 juin, d’aller le rencontrer à la résidence du commissaire de police de Mathura où il avait été conduit. Celui-ci étant absent, les Frères sont allés se renseigner au poste central où on les a priés d’attendre à l’extérieur. Une heure et demie plus tard, un policier est venu leur dire de ne pas attendre plus longtemps mais leur a promis la libération rapide d’Ekka. Dans la soirée, un policier ami, de service ce jour-là, est venu leur signaler qu’il avait vu Ekka au poste de Narauli. Quand les Frères s’y sont rendus pour lui apporter son souper, les policiers ont affirmé ne pas savoir où il se trouvait. C’est alors que les Frères ont commencé à avoir des soupçons. Ils ont téléphoné au commissaire. Vers 22 heures, deux policiers sont venus leur annoncer la mort d’Ekka.

Cette mort en garde à vue fait planer une nouvelle suspicion sur la mort du Frère Kuzhikandam lui-même. L’UCFHR a demandé à la Commission nationale de défense des droits de l’homme d’ordonner une enquête sur la mort d’Ekka. Le président de l’UCFHR, John Dayal, met en cause la municipalisation » de la police en Uttar Pradesh et se pose la question de savoir si le gouvernement ne cherche pas à se défausser de son devoir de protection des chrétiens. Quant au supérieur des Frères franciscains missionnaires de Nawada, il a porté plainte contre la police, le 18 juin.