Eglises d'Asie

Des dirigeants locaux d’un mouvement extrémiste affirment publiquement vouloir chasser les chrétiens du pays

Publié le 18/03/2010




Beaucoup de lecteurs du The Times of India, le principal quotidien de langue anglaise en l’Inde, ont été stupéfaits de trouver en première page de ce journal la virulente déclaration d’un responsable du groupe extrémiste hindouiste Bajrang Dal concernant les chrétiens : “Notre objectif est de les mettre tous à la porte ! ». Dans la même édition, on pouvait aussi lire, sous la plume d’un autre dirigeant de ce même mouvement, que son association chasserait les chrétiens de l’Inde car ils étaient devenus aujourd’hui des ennemis plus dangereux que les musulmans. L’effet de ces déclarations a été d’autant plus vif que leurs auteurs sont les responsables locaux d’un mouvement fondamentaliste hindou dans l’Etat de Uttar Pradesh, un Etat qui a connu une longue série d’agressions contre les chrétiens depuis le mois d’avril de cette année, dont la plus odieuse a été la mise à mort d’un religieux missionnaire le 7 juin dernier (1).

Les réactions ont été immédiates. L’ambassadeur des Etats-Unis en Inde, Richard Celeste, a aussitôt pris contact avec des personnalités haut placées du gouvernement fédéral pour leur exprimer son émotion. Dans une déclaration au Club de presse des correspondants étrangers de l’Asie du Sud, il a affirmé que les violences anti-chrétiennes donnaient au monde une fausse image d’un pays dont la tradition de tolérance religieuse est bien connue. Le P. D’Souza, porte-parole de la Conférence épiscopale indienne, a parlé de l’horreur » ressentie par les chrétiens devant de telles déclarations. Il a cependant ajouté que l’organisation extrémiste et ses communiqués provocants étaient bien loin de représenter l’orientation générale des hindous qui, dans leur majorité, sont les amis des chrétiens.

Du côté gouvernemental, les prises de positions ont été nombreuses et diverses. La Commission fédérale des droits de l’homme a demandé au gouvernement de l’Uttar Pradesh de fournir un rapport sur les derniers incidents anti-chrétiens. Le procureur général de l’Inde Soli Sorabjee a ordonné qu’une action immédiate soit entreprise contre le Bajrang Dal et a affirmé aux médias que ceux qui accusaient les chrétiens d’être des ennemis plus dangereux que les musulmans devraient être mis sous les verrous, en prison ou dans un asile psychiatrique Le 24 juin, un communiqué du Premier ministre Atal Behari Vajpayee, membre du parti nationaliste au pouvoir, annonçait que son gouvernement ferait respecter la loi dans le pays. Il demandait aux gouvernements des Etats d’appliquer la loi honnêtement, fermement et impartialement. Cependant, le chef du gouvernement n’a pas cité le nom du groupe hindouiste et n’a fait référence à aucun incident précis.

Les deux dirigeants locaux du Bajrang Dal qui se sont exprimé dans le The Times of India font partie, selon un reportage de ce journal, des militants qui, à la dernière convention de leur association, à Mathura, au mois de mars dernier, ont décidé de lancer une campagne contre les institutions chrétiennes. Depuis lors, quatre des six institutions catholiques de ce district ont été attaquées. Dans leurs déclarations au journal, les deux responsables ont nié que leur mouvement fût impliqué dans une seule des soixante attaques contre les chrétiens qui ont été dénombrées cette année. Mais ils se sont déclarés satisfaits qu’on leur attribuât ces crimes car cela renforçait le respect éprouvé par les hindous à leur égard et la peur ressentie par les chrétiens devant leurs activités.