Eglises d'Asie

Moluques : selon l’évêque auxiliaire d’Amboine, les militaires ne peuvent ni ne veulent mettre un terme aux violences qui ravagent l’archipel

Publié le 18/03/2010




Le 18 juillet dernier, le Centre de crise du diocèse d’Amboine a publié un rapport dans lequel on peut lire que les militaires indonésiens ne sont pas en position de mettre fin aux violences qui opposent chrétiens et musulmans dans l’archipel depuis janvier 1999. “La tournure prise par les événements renforce notre conviction selon laquelle les forces armées ne sont pas capables ou ne font pas preuve de la détermination nécessaire pour mettre fin aux violences et ouvrir le chemin qui mènerait à la paix », écrivent Mgr Joseph Tethool et le P. Agustinus Ulahaiyanan, respectivement évêque auxiliaire catholique d’Amboine et vice-président du Centre de crise.

Selon leur rapport, les quartiers chrétiens de la ville d’Amboine subissent depuis le 15 juillet les attaques constantes de combattants musulmans équipés d’armes de qualité militaire ». Selon d’autres informations, toujours fournies par le Centre de crise, le 18 juillet, quatre quartiers majoritairement chrétiens de la ville ont été attaqués et le feu a été mis aux maisons de l’un d’entre eux, Manggadua. A Urimesing, un quartier de la ville, les chrétiens ont pu repousser les attaques d’un groupe d’assaillants musulmans qui s’en prenaient à une école. L’attaque s’est produite à seulement 50 mètres du quartier général de Pattimura, centre régional du commandement militaire qui abrite l’état-major responsable de la sécurité aux Moluques. Apparemment, les militaires ne se sont pas sentis concernés [par cette attaque des musulmans] », écrivent les responsables catholiques.

Ces informations recoupent d’autres selon lesquelles les militaires et plus généralement les forces de l’ordre aux Moluques sont divisées, une partie des hommes prenant partie pour l’un ou l’autre camp. Le gouverneur de la province, Saleh Latuconsina, a déclaré vouloir isoler les Moluques, et plus spécialement Amboine, des personnes étrangères à la province, faisant ici allusion aux combattants (musulmans) de la guerre sainte » présents dans l’archipel depuis plusieurs mois (14). Le général de brigade I Made Yasa, commandant militaire de Pattimura, a affirmé aux journalistes qu’il renverrait les combattants du djihad » d’où ils venaient. Rien n’y fait. Tout semble indiquer que les responsables militaires indonésiens n’ont plus le contrôle effectif de toutes leurs unités. Le général I Made Yasa le reconnaît implicitement lorsqu’il déclare qu’il relèvera les bataillons qui se sont fait une mauvaise réputation » depuis leur déploiement aux Moluques.

A Djakarta, le ministre de la Défense, Juwono Sudarsono, a reconnu que, dans certaines régions du pays, la chaîne de commandement s’était brisée. Au cours du mois de juillet, le président Abdurrahman Wahid s’est cru obligé de rappeler des principes élémentaires au cours d’un rassemblement militaire. Vous devez obéir à vos commandants et vos commandants doivent obéir au commandant suprême, lequel est le président », a-t-il déclaré aux officiers réunis devant lui. Le 29 août, selon le Jakarta Post, la vice-présidente Megawati Sukarnoputri est allée dans le même sens lors d’une intervention devant une assemblée de responsables religieux à Djakarta. Expliquant que le bas niveau du moral au sein de l’armée et de la police pouvait avoir été exploité par certains, elle a déclaré : Mon intuition est que la racine de tous ces conflits n’est pas religieuse ou ethnique mais que des contextes locaux particuliers, la crise économique et le fait que les conditions d’application de la loi et d’engagement des forces armées soient dégradées, expliquent ces conflits ».