Eglises d'Asie

Andhra Pradesh : un programme d’irrigation réalisé par le diocèse de Guntur transforme radicalement la mentalité des paysans d’une région pauvre

Publié le 18/03/2010




Dans le village de Rentachintla de l’Etat de l’Andhra Pradesh, avant que le diocèse catholique de Guntur, où se trouve cette agglomération, ne lance son programme d’irrigation des terres, le seul moyen à la disposition des paysans pauvres pour s’acquitter des dettes accumulées à l’époque des semailles et de la moisson était de faire don d’un rein à l’un des hôpitaux du pays contre une compensation financière. C’est ainsi qu’au mois de mai dernier, au moins 15 des cultivateurs de cette localité, où l’on cultive le coton et le piment rouge, ont vendu leur rein pour assurer le remboursement de la somme d’argent empruntée pour les besoins de la culture.

L’un d’entre eux, Bobba Vankata Reddy, père de deux enfants, a obtenu pour l’ablation de son rein une somme de 50 000 roupies (1 090 dollars), ce qui lui a permis de régler la dette contractée avec les intérêts. Interrogé sur ce geste, il a confié qu’il s’enorgueillissait d’avoir résisté à la tentation du suicide et que, tout compte fait, il n’avait fait que sacrifier une partie de lui-même. Selon des statistiques locales, en effet, quelque 500 paysans de l’Andhra Pradesh ont volontairement mis un terme à leur vie au cours des deux années écoulées, désespérés par leur impuis-sance à faire face à leurs obligations financières. L’absence de pluie à cette époque ne leur avait pas permis d’obte-nir des récoltes normales pour subvenir à leurs dépenses. Un autre habitant du village, dans le même cas que Reddy, a été conduit à cette extrémité à cause des frais occasionnés par l’achat de boufs, de moyens de transports, de pesticides et d’engrais. Son épouse, mère d’une petite fille de deux ans, se plaint de voir la santé de son mari gravement compromise par son opération. Il ne peut même plus porter un seau d’eau », se lamente-t-elle aujourd’hui.

A l’origine de ce programme d’irrigation, se trouve l’émotion éprouvée par un certain nombre de responsables diocésains en écoutant des récits racontant l’histoire de ces paysans pauvres allant à Delhi ou dans d’autres grandes villes de l’Inde proposer un organe de leur corps contre certains avantages financiers. Avec l’aide de l’organisme allemand Misereor et des subsides des autorités locales, le service social du diocèse a lancé le projet d’irrigation dans les plus brefs délais pour essayer de désamorcer la plus vite possible ce déplorable mouvement. L’évêque du diocèse de Guntur précise même qu’il ne s’agit pas seulement d’aider ces paysans pauvres à cultiver leurs champs, mais surtout de les inciter au respect de la vie et au courage face aux défis dramatiques qu’ils doivent affronter.

Selon les échos enregistrés sur place par les représentants des autorités diocésaines, l’arrivée de l’eau dans les champs a changé la mentalité de la population du village de Rentachintla où depuis longtemps se sont rassemblés un grand nombre de catholiques venant d’autres régions du diocèse de Guntur. Le nouveau réseau hydraulique recueille l’eau des cours d’eau voisins pour en faire bénéficier une centaine de familles dont beaucoup ne sont pas chrétiennes. Le chef de village, Gottam Ranga Reddy, affirme que le projet a apporté l’espérance et assure le pain quotidien à ses compagnons, dont certains sont aujourd’hui privés d’un rein. Un paysan qui avait déjà projeté de se suicider après avoir perdu sa récolte a confié que la mise en place du réseau hydraulique lui avait rendu l’espoir de pouvoir mener une vie heureuse.

Le diocèse de Guntur coïncide avec le district de même nom qui est habité par environ 4 millions d’habitants. 275 000 sont chrétiens, pour la plupart issus des basses castes et travaillant comme ouvriers agricoles. Dans le district, 26 % des habitants sont propriétaires des terres qu’ils cultivent, 45 % sont ouvriers agricoles, tandis que les autres travaillent dans des industries agro-alimentaires.