Eglises d'Asie – Vietnam
Force et faiblesses des congrégations et ordres religieux au Vietnam
Publié le 18/03/2010
On peut même penser que, d’une certaine façon, la situation actuelle et les limitations dues au nouveau régime ont favorisé le développement des petites congrégations et des instituts séculiers. Vu les circonstances, en effet, les congrégations traditionnellement nombreuses et fortes dans le pays, comme les dominicains, les jésuites, les rédemptoristes, les franciscains… ont été obligées de se regrouper pour établir des centres de formation communs à tous, centres où sont venus se former également les membres des petites congrégations et instituts séculiers, ce qui a favorisé leur recrutement et élevé leur niveau intellectuel et spirituel.
« Nous avons beaucoup de raisons de nous réjouir fait remarquer le religieux franciscain Nguyên Hông Giao, qui a publié ces constatations dans un hebdomadaire catholique de Hô Chi Minh-Ville (38). Sans que l’on puisse parler d’une véritable explosion des vocations religieuses au Vietnam, il faut néanmoins constater l’existence d’un fort mouvement favorable à la vie monastique dans l’Eglise du Vietnam, mouvement qui s’est déclenché après l’ouverture politique (dôi moi) de la fin des années 1980. Cependant, note le religieux franciscain, il convient d’être lucide sur un certain nombre de motivations et de causes à l’origine de ce mouvement. La plupart des vocations viennent du milieu rural, ce qui est assez normal dans un pays où la paysannerie représente encore 80 % de la population. Sans nul doute, il faut tenir compte de la pauvreté de ces milieux, de la volonté de promotion sociale qui anime les jeunes paysans, du désir des familles nombreuses de voir un de leurs membres entrer dans la vie religieuse, autant de causes qui jouent un rôle certain dans l’afflux des vocations actuelles, sans compter le renfort apporté au Sud par un certain nombre de jeunes catholiques venus du Nord pour chercher des maisons religieuses capables de réaliser leurs aspirations, maisons absentes dans leur région d’origine, On peut penser, dit le P. Hông Giao, que le Seigneur utilise tous ces facteurs au profit de son Eglise.
Les véritables craintes que l’on peut concevoir aujourd’hui face à ce développement subit des vocations religieuses concernent la formation de cette masse de jeunes et leur avenir. En premier lieu, le nombre extrêmement réduit de formateurs disponibles permet difficilement l’accompagnement personnel dont devraient bénéficier les candidats à la vie religieuse. Certaines maisons qui ont accueilli dans leurs murs une centaine de nouvelles recrues ne disposent que de deux ou trois formateurs à mettre à leur service. Comment, dans ces conditions exercer sur chaque jeune le discernement nécessaire ? Il faut ajouter à cela que les candidats arrivent aujourd’hui dans les congrégations à l’âge adulte, en raison de la disparition des petits séminaires et diverses maisons de formation. Leur niveau culturel est celui qui est dispensé par les institutions éducatives actuelles, un niveau très faible et souvent disparate selon les milieux et régions d’origine. Alors qu’avant 1975, il était exceptionnel qu’un étudiant ne puisse lire de livres en langue étrangère, c’est aujourd’hui la norme pour ceux qui rentrent dans les maisons religieuses.
Par ailleurs, la formation reçue par eux à l’extérieur, avant leur entrée dans la vie religieuse, les a imprégnés des valeurs cultivées aujourd’hui dans la société vietnamienne, d’orientation matérialiste et marquée par la consommation et l’argent, autant de valeurs qui constituent un obstacle important à la formation spirituelle qui leur est dispensée, aux vertus religieuses qu’ils doivent adopter, aux priorités évangéliques auxquelles ils doivent se soumettre, à la conversion en profondeur qui est exigée d’eux.
Pour toutes ces raisons, le P. Giao a intitulé son article : « Ne nous réjouissons pas trop vite du grand nombre de vocations Encore faut-il pouvoir les former…