Eglises d'Asie – Inde
Gujarat : la police arrête des militants d’une association défendant les intérêts de la population locale menacés par un projet de réaménagement du Narmada
Publié le 18/03/2010
Le projet appelé Sardar Sarovar, dont le coût devrait s’élever à près de 6 milliards de dollars, prévoit de construire un ensemble de digues sur le fleuve Narmada et sur ses affluents : 30 d’entre elles seront de très vaste dimension, 135 seront moyennes et 3 000 plus petites (19). Le fleuve Narmada, appelé aussi Narbada ou Nerbudda, dont le cours va être ainsi réaménagé, prend sa source dans la chaîne montagneuse de Maikala dans l’Etat du Madhya Pradesh et achève sa course dans le golfe de Cambay, après avoir parcouru 1 300 km et arrosé les Etats de Maddhya Pradesh et du Gujarat. Déjà connu du géographe grec Ptolémée, il est considéré par la population comme le fleuve le plus sacré de l’Inde après le Gange.
Pour mener à bien les travaux, il est prévu de déplacer un demi-million d’habitants, parmi lesquels au moins 40 000 familles appartiennent aux minorités ethniques des Etats du Gujarat, du Madhya Pradesh et du Maharastra, avant que les eaux ne submergent 13 774 hectares de forêts et 11 318 hectares de terres agricoles. Pour justifier le coût financier, écologique et humain d’un tel projet, le gouvernement local met en avant la création d’un système hydraulique gigantesque (75 000 km de canaux) que permettra l’établissement du réseau de digues. Il sera capable d’irriguer des millions d’hectares de terres de l’Inde occidentale souvent frappée par la sécheresse, de fournir électricité et eau potable à 132 agglomérations urbaines et 7 234 villages.
L’association Narmada Bachao Andolan s’est constituée il y a quelque 20 ans non pas pour s’opposer à la construction des barrages mais pour inciter le gouvernement à tenir compte des problèmes écologiques et humains que soulève cette construction. L’association exige en particulier que les autorités locales révisent leur projet en fonction des desiderata de la population et avec sa participation. Elle souligne que certaines des terres promises aux paysans par le gouvernement en compensation de celles qu’ils vont perdre sont pierreuses et infertiles.
Selon certains militants de l’association, la situation serait arrivée aujourd’hui à un point critique. En procédant à l’arrestation et à la détention illégale de leurs compagnons, actes qui s’ajoutent à une série d’autres comme la fouille des locaux de l’association ou la dissolution de manifestations, les autorités tentent de faire disparaître toute forme d’opposition aux barrages. Tout récemment, dans une lettre envoyée au ministre-président du Gujarat, Amnesty International lui faisait remarquer que son gouvernement avait, dans son comportement à l’égard des militants de la NBA, attenté à la liberté d’opinion et d’expression garantie par les lois indiennes. D’autres organisations internationales comme la Banque mondiale (qui s’est retirée du projet depuis 1993) reprochent au futur barrage de n’être pas conforme aux normes exigées par le respect de l’environnement naturel et humain.