Eglises d'Asie

Les appels d’un groupe hindou fondamentaliste à l’indépendance de l’Eglise catholique en Inde suscitent l’indignation dans le pays

Publié le 18/03/2010




Venant de milieux divers, d’appartenances religieuse, politique et idéologique différentes, on a enregistré de très vigoureuses réactions à la campagne menée par le groupe hindouiste d’extrême droite, le Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps national des volontaires, RSS) (4), appelant les catholiques de l’Inde à établir une Eglise “swadeshi c’est à dire nationaliste et séparée de Rome. Cette campagne entamée aux pre-miers jours d’octobre a atteint son sommet les 13, 14, 15 octobre, journées durant lesquelles s’est déroulé à Agra un grand rassemblement du mouvement, le troisième depuis le début du mois. 75 000 membres du RSS regroupés à l’occasion du 75e anniversaire de la fondation de l’association, ont entendu les propos de leur chef, K.S. Sudarshan, qui est allé encore plus loin dans ses exigences à l’égard des chrétiens et des musulmans indiens, leur enjoignant même de reconnaître l’hindouisme comme leur ancêtre commun. Cet appel a d’autant plus inquiété que, le dernier jour, le ministre fédéral de l’Intérieur fédéral, L.K. Advani, est venu participer au rassemblement du RSS, confirmant ainsi les liens existant entre le parti au pouvoir et le groupe fondamentaliste. La présence du ministre a été vivement critiquée dans la presse.

Déjà, dans un communiqué publié le 11 octobre, la Conférence épiscopale indienne avait répliqué aux allégations du RSS en affirmant, entre autres choses, que personne le droit de mettre en cause le patriotisme des chrétiens qui sont fiers de leur héritage culturel Au dernier jour du rassemblement d’Agra, le 16 octobre, au nom de la Conférence épiscopale indienne, le P. Dominic Emmanuel s’est livré à une critique sévère des récents propos du responsable hindouiste appelant les catholiques indiens à imiter l’Eglise “officielle” de Chine : Que pourrait bien signifier en Inde une Eglise ‘, a-t-il demandé. En Inde, il y a 145 diocèses catholiques, tous dirigés par des évêques indiens. Il a aucun évêque étranger S’adressant au chef du RSS, il lui a demandé s’il souhaitait que la démocratie se perpétue en Inde ou bien s’il voulait voir son pays adopter le système communiste dictatorial de Chine où il n’existe aucune liberté pas plus individuelle que religieuse. Enfin, le P. Emmanuel a conclu avec ironie : Les chrétiens sont ici depuis 948 ans. Si les chrétiens, après dixneuf siècles et demi de présence, ne sont pas encore indiens, ils ne le deviendront certainement pas à groupe fasciste… »

Les représentants de la communauté musulmane également concernée par la campagne du RSS se sont exprimés publiquement. Un de ses dirigeants, Syed Shabuddin, voit dans l’actuelle campagne une nouvelle manifestation de la volonté de certains groupes hindouistes de fonder une théocratie hindouiste. du RSS, a-t-il déclaré, est du régime indien. Ses membres pensent que la seule Inde réelle est une Inde hindoue ».

La presse dans son ensemble s’est montrée très défavorable aux provocations lancées par les extrémistes du RSS. Le quotidien The Hindu qui, dans les jours précédents, avait fait paraître plusieurs articles attaquant les positions soutenues par les fondamentalistes hindous, a renouvelé ses critiques dans un éditorial intitulé Une inquiétante agressivité On peut y lire que l’obstination avec laquelle le chef du Corps national des volontaires poursuit sa campagne pour une Eglise catholique nationale est une indication inquiétante sur l’agressivité sous-jacente aux revendications des fondamentalistes hindous. Le journal Asian Age s’est montré dédaigneux et a affirmé que les membres du RSS avec leurs shorts et leurs chemisettes amidonnées ressemblaient aux membres d’une clique inculte et grossière continuant de battre le tambour du communautarisme ».

Au Kerala, l’Eglise catholique a trouvé un allié dans le Parti communiste local qui, dans une résolution prise le 10 octobre, fait observer qu’il est absurde de considérer les chrétiens, les musulmans, les juifs, les parsis comme des étrangers en se fondant sur leurs croyances religieuses.