Eglises d'Asie

Hyderabad : deux religieux catholiques obligent l’Etat à revenir sur un projet de rénovation urbaine qui aurait lésé les pauvres

Publié le 18/03/2010




A l’issue d’une campagne de protestations de trois ans, et grâce aux efforts de deux frères de Saint Gabriel qui ont pris leur défense, les habitants d’un bidonville de Hyderabad, dans l’Etat d’Andhra Pradesh, semblent avoir réussi à repous-ser un projet de rénovation de la ville qui les aurait chassés des rives d’un cours d’eau asséché, la rivière Musi, où se trouvent leurs habitations. A la suite de leurs protestations, le gouvernement de l’Etat d’Andhra Pradesh vient en effet de retirer ce projet dont il était le promoteur et qui devait lui coûter 4 080 millions de roupies (89 millions de dollars).

Le projet appelé Nandanavanam (‘jardin de Krishna’) qui devait assainir les lieux et réduire le lit de l’ancienne rivière pour y créer un certain nombre de services, des centres commerciaux entre autres, aurait obligé les personnes (environ 5 000 familles) qui y résident aujourd’hui à quitter les lieux. Celles-ci qui habitent là depuis plus de trente ans exercent les métiers de journaliers, pousseurs de rickshaws, vendeurs de fruits et légumes. Pour leur défense, les deux frères de Saint Gabriel, Varghese Theckanath et Suresh Reddy, ont créé un organisme appelé Chatri qui coordonne la lutte de six associations de volontaires travaillant dans le bidonville et luttant pour la défense des droits des pauvres d’Hyderabad. Ceux-ci représentent 30 % de la population de la ville, estimée à plus de 5 millions d’habitants. Cette association a proposé que les fonds destinés au projet d’urbanisation soient directement donnés à ces derniers pour se construire des habitations près du lieu où ils exercent des métiers indispensables à la vie de la cité.

Au mois d’août dernier, la prise en compte des revendications de la Chatri a été favorisée par un phénomène d’ordre climatique. Le 24 août des pluies d’une intensité inhabituelle ont provoqué des inondations dans la ville d’Hyderabad et dans le district voisin, faisant 32 morts, détruisant plus de 8 000 maisons et en endommageant 6 000 autres. Or, un mois auparavant le frère Theckanath avait averti le coordinateur des services d’assistance de l’Etat que les travaux de rétrécissement du lit de la rivière allaient favoriser la montée des eaux. Après les inondations, des fonctionnaires gouvernementaux ayant accusé les habitants du bidonville d’avoir provoqué les inondations en bouchant la rivière avec des déchets de toutes sortes, les responsables de la Chatri » rédigèrent un mémorandum où ils repoussaient les accusations et renouvelaient leur invitation au gouvernement d’abandonner son projet de rénovation urbaine.

Enfin, le 31 octobre dernier, une conférence a rassemblé autour de la même table, des spécialistes de l’environnement, des militants de la Chatri, des habitants du bidonville et un haut responsable municipal d’Hyderabad. Les participants se sont accordés sur le fait que les pauvres qui constituaient une part importante et décisive des agents de l’économie urbaine ne pouvaient être laissés en marge du processus d’urbanisation de la ville et devaient être impliqués dans son développement. Pour sa part, le responsable municipal a admis que le projet de rénovation urbaine souffrait de graves déficiences et devait être révisé.

Selon le frère Theckanath, le projet aujourd’hui est mis en sommeil. Cependant certains craignent que le gouvernement ne le reprenne sous une forme différente.