Eglises d'Asie

Moluques : l’attaque par des musulmans de plusieurs villages chrétiens sur l’île de Kasui fait plusieurs morts et laisse des centaines de chrétiens otages, menacés de mort

Publié le 18/03/2010




Selon le Centre de crise du diocèse catholique d’Amboine, plusieurs villages chrétiens ont été attaqués entre le 23 et le 28 novembre à Kasui (Keswui), petite île de la chaîne des îles Watubela située dans le prolongement sud-est de la grande île de Céram. Selon les sources, entre 8 et 54, voire 91, chrétiens auraient été massacrés et environ 750 autres seraient retenus en otages dans diverses mosquées de l’île. A ces otages serait laissé le choix entre la vie sauve au prix de la conversion à l’islam ou la mort. Des unités de l’armée auraient été dépêchées sur l’île afin de mettre fin aux exactions de ces assaillants musulmans venus, semble-t-il de l’île voisine de Gorong, mais ils seraient en nombre insuffisant et n’oseraient pas affronter les militants musulmans, bien armés. Devant l’émotion internationale soulevée par ce nouvel accès de violence aux Moluques, le gouvernement indonésien a déclaré qu’il allait envoyer une commission d’enquête pour déterminer ce qui s’est passé sur cette île isolée. Mais, selon les derniers rapports du Centre de crise d’Amboine, les chrétiens sur place n’osent pas témoigner, de peur de subir des représailles de la part des musulmans.

Par ailleurs, entre le 8 et le 12 décembre, sur l’île de Teor (Tioor), de nouvelles attaques ont pris pour cible des villages catholiques. L’île abrite cinq villages peuplés de catholiques et un autre habité par des protestants et des catholiques. Là encore, des combattants musulmans ont menacé de tuer des chrétiens, à moins qu’ils ne se convertissent à l’islam. Les habitants des villages catholiques de Korfutin et de Korkolin ont dû fuir et leurs maisons ont été détruites. Certains de ces chrétiens sont allés se réfugier sur les îles de Kei (Kai), situées à plusieurs dizaines de kilomètres plus au sud.

A Amboine et sur l’île de Céram, la tension reste vive, des affrontements se produisent quasi-quotidiennement. Dans la ville d’Amboine, le 2 décembre, une foule menée par des hommes du laskar jihad (les combattants musulmans de la guerre sainte) a investi les bureaux du gouverneur, à Pattimura. Devant cette foule devenue menaçante, les soldats protégeant ces bureaux ont fait usage de leurs armes, tuant deux des manifestants. Une délégation a finalement été reçue par le gouverneur et les militants musulmans ont demandé, entre autres choses, que soit détruite la grande église de Maranatha située à côté des bâtiments du gouverneur.

Cependant, si la tension reste vive à Amboine, sur l’île de Céram et la chaîne d’îles située dans son prolongement sud-est, un certain apaisement est perceptible dans la province des Moluques septentrionales. Le 24 décembre, la vice-présidente Megawati Sukarnoputri doit se rendre sur l’île de Halmahera où elle signera une charte de réconciliation à Mamuya, un village où les communautés musulmane et chrétienne s’affrontaient il y a peu encore (12). Elle se rendra également sur les îles de Tidore et de Bacan.

Par ailleurs, à Yogyakarta, sur l’île de Java, pour la troisième fois (13), des responsables musulmans et chrétiens se sont réunis afin de discuter d’une solution au conflit qui ravage les Moluques depuis maintenant deux ans. Les deux groupes étaient composés de cinquante personnes chacun, et des journalistes du Siwalima et de Express, deux journaux respectivement chrétien et musulman d’Amboine, étaient également présents. Ces responsables sont tombés d’accord sur un programme en cinq points : 1.) Renouer le dialogue entre les Moluquois ; 2.) Etablir deux zones neutres à Amboine pour faciliter les activités économiques et éducatives ; 3.) Mettre en place une force de maintien de la paix pour assurer la protection de ces deux zones, force constituée de Moluquois ; 4.) Mener une action Baku Bae (‘Etre de bonne volonté’) dans toute l’Indonésie ; 5.) Garantir le bon exercice de la justice dans toutes les Moluques. Selon l’un des participants à ce rassemblement, restaurer la paix dans l’archipel ne peut être fait que par les Moluquois eux-mêmes mais, pour ce faire, un médiateur neutre et propre » doit être désigné.