Eglises d'Asie

Moluques : le nonce en poste à Djakarta s’est rendu à Amboine pour une “visite pastorale”

Publié le 18/03/2010




Du 24 au 27 novembre, Mgr Renzo Fratini, nonce apostolique à Djakarta, s’est rendu aux Moluques pour une visite qualifiée de “pastorale ». A Amboine, capitale de la province, l’ambassadeur du Vatican, porteur d’un message de paix du pape Jean-Paul II, a rencontré, à la résidence du gouverneur, des représentants des autorités civiles et militaires locales ainsi que des responsables religieux, chrétiens et musulmans. Au nom du pape, Mgr Fratini a remis un don de 100 millions de roupies (10 580 dollars) destinés à venir en aide aux réfugiés, quelle que soit leur confession religieuse, chassés de chez eux par les affrontements meurtriers entre musulmans et chrétiens qui ravagent les Moluques depuis maintenant presque deux années. Les quartiers qui séparent l’aéroport de la ville d’Amboine n’étant pas sûrs, la marine avait mis à la disposition de Mgr Fratini un de ses hélicoptères pour le transporter jusqu’au centre de la capitale provinciale.

Ma visite ici n’a rien de politique. Elle est une visite pastorale pour exprimer la sympathie de l’Eglise catholique aux victimes, tant musulmanes que chrétiennes, de ce conflit communautaire », a déclaré le nonce apostolique. Le don du pape, a-t-il poursuivi, est un geste symbolique de solidarité aux enfants et aux familles qui ont perdu leur toit, dans l’espoir que cette somme contribuera à alléger le fardeau de ces gens, tout particulièrement à l’approche de la fête chrétienne de Noël et de celle, musulmane, de l’Eid ulFitr ». L’Eid ul-Fitr dure trois jours, marque la fin du ramadan pour les musulmans et tombe, cette année, juste après le jour de Noël.

Dans la ville de Tual, située sur une île de la partie sud-est des Moluques, devant une foule estimée à 20 000 personnes (en majorité des chrétiens mais aussi des musulmans), sur la colline de Masbait, Mgr Fratini a participé à la cérémonie de bénédiction d’un monument érigé en l’honneur du Christ-Roi. Surplombant la ville, ce monument haut de 13 mètres est surmonté d’un Christ haut de 2,25 mètres dominant un globe de 1,5 mètres de diamètre. Dans cette partie des Moluques, les chrétiens et les musulmans vivent en bonne intelligence. Mgr Fratini a visité une mosquée de la ville où il a pu entendre des chefs musulmans lui faire l’éloge des catholiques pour leur rôle pacificateur entre les communautés protestante et musulmane.

Le P. Ignatius Ismartono, jésuite et secrétaire de la Commission pour le dialogue interreligieux au sein de la Conférence des évêques catholiques d’Indonésie, a précisé que le nonce, aux côtés de l’évêque d’Amboine et de son auxiliaire, avait rencontré des dirigeants protestants et musulmans, en particulier le révérend Sammy Titaley, président du Synode des Eglises protestantes des Moluques.

Selon un universitaire musulman, en Indonésie, les conflits entre chrétiens et musulmans ne reçoivent pas l’attention qu’ils méritent

Lors d’un séminaire organisé entre les 16 et 18 novembre dernier à Malang, Ahmad Baso, universitaire musulman, membre de la Nahdlatul Ulama, une des deux principales organisations musulmanes de masse du pays, a déclaré que, comparés aux autres lignes de fracture qu’il identifie au sein de la société indonésienne, les conflits entre chrétiens et musulmans ne reçoivent pas l’attention nécessaire du gouvernement et de l’opinion publique. Selon lui, quatre conflits majeurs caractérisent la société indonésienne de ces quarante dernières années : les provinces contre le centre, les Chinois contre les pribumi (‘les fils du sol’, i.e. les indigènes), les communistes contre les partisans de l’Ordre nouveau (de Suharto) et enfin les chrétiens contre les musulmans.

Selon Ahmad Baso, les conflits locaux et nationaux peuvent être résolus si ces deux plus importantes religions sont placées sur un pied d’égalité dans la gestion des affaires de l’Etat. Cet universitaire musulman avoue ne pas savoir comment cette égalité peut être réalisée, mais il ajoute que, les musulmans formant la partie la plus importante numériquement de la population, l’unité doit d’abord être faite entre eux avant de penser à la réconciliation avec les chrétiens.

Intervenant devant la même assemblée, le P. Ignatius Ismartono, secrétaire de la Commission pour le dialogue interreligieux au sein de la Conférence des évêques catholiques du pays, a déclaré que l’aspect social de cette réconciliation relevait de la responsabilité du gouvernement et que la dimension spirituelle de cette réconciliation était du domaine des diverses religions représentées en Indonésie.