Eglises d'Asie – Indonésie
La communauté indonésienne d’origine chinoise a célébré publiquement mais dans une relative discrétion le nouvel an chinois
Publié le 18/03/2010
A l’église catholique Saint Pierre et Saint Paul, dans le quartier chinois de Djakarta, devant une assistance d’environ 300 Indonésiens d’origine chinoise, le P. Petrus Maria Willy Malim Batuah a déclaré : “Nous ne devons pas avoir peur de rumeurs à propos d’éventuelles bombes. C’est Dieu que nous devons craindre et suivre.” Dans son homélie prononcée en mandarin, le P. Batuah, d’origine chinoise, a invité ses fidèles à se mêler aux autres Indonésiens pour construire des liens de solidarité. Constatant que nombreux sont ceux qui ne se soucient que d’eux-mêmes et ne se penchent pas sur ceux qui souffrent, il a notamment déclaré : “Nous devons partager nos richesses avec les nécessiteux, autrement nous serons la proie d’émeutiers et de pillards”.
Accompagnée de son épouse revêtue d’une veste traditionnelle chinoise, le président Abdurrahman Wahid a assisté le 28 janvier à Djakarta à une cérémonie en l’honneur du nouvel an chinois, cérémonie organisée par le Conseil suprême du confucianisme en Indonésie. Aux côtés du couple présidentiel, se trouvaient Amien Rais, président de l’Assemblée consultative du peuple, plusieurs ministres du gouvernement ainsi que des représentants des principales religions, dont le cardinal Julius Darmaatmadja, archevêque de la capitale et président de la Conférence des évêques catholiques d’Indonésie. Dans son discours à la communauté d’origine chinoise, le président Wahid a réaffirmé la volonté de son gouvernement de défendre l’égalité des droits des disciples de Confucius avec ceux des autres religions. Cité par le Jakarta Post, il a déclaré : “Tout comme les autres croyants, les adeptes du confucianisme ont des chances et des droits égaux aux autres en Indonésie [.]. Toutes les mesures de discrimination à l’encontre du confucianisme doivent cesser”.
Longtemps classé dans la catégorie des organisations bouddhistes, le confucianisme n’a que depuis peu droit de cité aux côtés des cinq grandes religions officiellement reconnues en Indonésie (islam, catholicisme, protestantisme, hindouisme et bouddhisme). Le 17 janvier de l’an dernier, par un décret présidentiel, Aburrahman Wahid a en effet annulé l’instruction N° 6 prise en 1967 par le président Suharto, soit deux ans après le coup d’Etat manqué attribué aux communistes pro-chinois par le pouvoir alors en place. Cette instruction interdisait l’exercice des diverses pratiques culturelles et religieuses liées à la tradition chinoise. Depuis, pendant trente-trois ans, et malgré la reprise de relations diplomatiques entre la Chine et l’Indonésie en 1990, le confucianisme et les différentes traditions culturelles chinoises, telles que le nouvel an lunaire, étaient restés interdits dans le pays. En décembre dernier, les formalités de délivrance de visas pour les citoyens de la République populaire de Chine ont été allégées et alignées sur le régime commun.
L’an dernier, l’Eglise catholique a affirmé son accord avec l’initiative présidentielle, chaque Indonésien ayant le droit de pratiquer sa propre religion ou son propre système de croyance. Elle a soutenu la reconnaissance officielle du confucianisme comme religion, bien que, pour bon nombre de catholiques, Confucius est seulement un philosophe (2).
Les chrétiens représentent environ 10 % de l’ensemble de la population indonésienne (dont 3,3 % pour les catholiques). Parmi eux, notamment dans les grandes villes, une proportion notable est d’origine chinoise.