Eglises d'Asie

Moluques : à Amboine, des soldats et des policiers engagés aux côtés d’émeutiers musulmans ont été arrêtés par l’armée

Publié le 18/03/2010




Selon le général de brigade I Made Yasa, commandant militaire de la région des Moluques, quatre policiers et un officier de l’armée ont été appréhendés le 22 janvier dernier dans un hôtel d’Amboine, capitale des Moluques, les armes à la main, alors qu’ils venaient de blesser par leurs tirs un soldat engagé à une centaine de mètres de là dans une opération de maintien de l’ordre contre des émeutiers musulmans. L’arrestation de ces cinq tireurs isolés confirme l’engagement d’une partie des forces de police ou de l’armée sur le terrain aux côtés des musulmans qui s’en prennent aux chrétiens. Toutefois, certains observateurs se demandent si la hiérarchie de la police ou de l’armée, en assurant la publicité de ces arrestations, ne se dédouanerait pas ainsi de responsabilités plus lourdes dans les événements qui ensanglantent les Moluques depuis deux ans (1).

Les cinq hommes, tous gradés, ont été arrêtés à l’hôtel Wijaya II Pattimura tôt le matin. Selon I Made Yasa, onze armes (du fusil automatique au revolver) ont été trouvées à leurs côtés ainsi que des munitions par centaines, des uniformes de la police et de l’armée et du shabu, un type local d’amphétamine. Dix-huit autres personnes, des employés de l’hôtel, ont été interpellés pour interrogatoire lors de ce raid. Le général Yasa a déclaré à la presse qu’il recommanderait à ses supérieurs de démettre l’officier arrêté, précisant qu’il “ne [voulait] pas d’un tel soldat”. D’origine balinaise et de confession hindoue, I Made Yasa a affirmé que l’armée maintiendrait une stricte neutralité dans le conflit des Moluques : “Personnellement, je n’ai pas d’intérêt à défendre, que ce soit auprès du camp chrétien ou du camp musulman. Nous réprimerons les émeutiers, d’où qu’ils viennent”. Le responsable local des forces de police, le général de police Firman Gani, a quant à lui précisé que ses supérieurs à l’échelon national lui avaient recommandé “de prendre des mesures fermes contre les hommes qui ne travaillent pas selon les procédures adéquates”.

Sur place, certaines personnes ont exprimé leur soulagement après la capture de ces cinq tireurs isolés, estimant que celle-ci constituait une première étape vers la dénonciation et l’arrestation des personnes agissant en coulisses pour dresser les uns contre les autres musulmans et chrétiens aux Moluques, un conflit qui a causé la mort de plus de 5 000 personnes depuis janvier 1999 (2). A Djakarta, Munir, coordinateur de la Commission pour les disparus et les victimes de violence et défenseur connu des droits de l’homme, a déclaré que les forces de police et les militaires n’ont pas seulement manipulé les parties en présence mais ont pris une part active aux affrontements inter-communautaires. Selon lui, en n’arrêtant pas ces éléments de la police et de l’armée dès le début des événements, on a ruiné les efforts ultérieurs pour restaurer la paix dans l’archipel des Moluques.

La dernière explosion de violence meurtrière remonte au 19 janvier 2001, 48 heures seulement après la journée “Les Moluques prient”, journée de prières réunissant chrétiens et musulmans à Amboine, organisée à l’initiative de la police locale. Du 19 au 23 janvier, quatre jours d’affrontements entre émeutiers musulmans et forces de sécurité ont coûté la vie à au moins seize personnes.

A l’occasion de l’arrestation de ces tireurs isolés, le débat sur place a repris à propos de l’existence des patrouilles conjointes de sécurité, qui réunissent des troupes de marine, des forces spéciales de l’armée de l’air et celles de l’armée de terre. Selon certains, ces patrouilles conjointes sont la garantie de l’impartialité des forces armées sur le terrain, les troupes de marine jouissant auprès de la population d’une réputation d’intégrité (au contraire de certaines unités de l’armée de terre accusées de prendre fait et cause pour les musulmans ou de certaines unités de la police favorables aux chrétiens).