Eglises d'Asie

Selon plusieurs médecins, chrétiens ou bouddhistes, la légalisation de la pilule abortive n’est pas sans incidence morale sur les jeunes

Publié le 18/03/2010




La légalisation de la pilule abortive à Taiwan n’est pas sans incidences au sein de la population, estiment plusieurs médecins, de confession chrétienne ou bouddhiste. Non seulement, cette pilule provoque une baisse certaine du niveau des valeurs morales mais elle est également une menace pour la vie. Après quatre mois d’expérimentation clinique, le gouvernement taiwanais a légalisé l’usage de la RU 486, le 28 décembre dernier. Ce composé connu sous le sigle RU 486 est utilisé pour l’interruption d’un début de grossesse. Il est connu en France sous l’appellation mifépristone ou « pilule du lendemain ». Disponible depuis janvier 2001, elle fait de Taiwan, après la Chine, le deuxième marché d’Asie pour la pilule abortive.

« Pour un catholique, l’avortement est clairement interdit », explique le docteur Tang Hun-shang, vice-président de l’Association des médecins catholiques de la République de Chine et praticien à l’hôpital catholique cardinal Tien de Taipei. Selon les directives officielles, la RU 486 ne peut être prescrite et absorbée que sous le contrôle d’une infirmière ou d’un médecin, dans une clinique ou un hôpital agréé. Pour certains milieux médicaux et certains groupes féministes, la RU 486 est préférable à l’avortement qui reste toujours une intervention chirurgicale à risques. Selon un pharmacien bouddhiste interrogé par l’agence Ucanews, la RU 486 convient pour une interruption de grossesse suite à un viol ou à la découverte des malformations d’un fœtus. Toutefois, dit-il, le bouddhisme respecte chaque créature et croit que toute vie est imprégnée de l’esprit de Bouddha et donc ne peut jamais être supprimée. Le ministère de la Santé, quant à lui, affirme qu’il se conformera aux directives de la Loi sur la santé génétique. D’après cette loi, l’avortement est légal au cours des premières 24 semaines de grossesse si le fœtus comporte des malformations congénitales, si la grossesse présente une menace pour la vie ou la santé de la mère ou si la grossesse est le résultat d’un viol.

Une infirmière qui travaille dans un hôpital public à Taichung, au centre de Taiwan, a confié que beaucoup de femmes célibataires prenaient la RU 486 : elles se la procurent aisément au marché noir et elles y ont recours chaque fois qu’elles sont enceintes, au détriment de leur santé. Interrogé à propos de l’incidence de la RU 486 sur le taux d’avortement (qui est élevé à Taiwan), le docteur Chen Pu, de l’hôpital cardinal Tien, répond : « Parce qu’il est commode et facile de se la procurer, le RU 486 était déjà populaire avant même sa légalisation ». Le problème de l’avortement existe ici depuis longtemps, précise-t-il. Les statistiques officielles de Taiwan indiquent que 100 000 adolescentes ont eu recours à l’avortement au cours de l’année 2000. Le docteur Chen, inquiet, affirme que c’est le déclin des valeurs morales, et non la RU 486, qui sont au cœur du problème de la société taiwanaise. Les gens sont très laxistes quand il s’agit du sexe et, sans culpabilité, entretiennent des liaisons successives et sans lendemain. La réévaluation des valeurs morales et de l’éducation familiale aurait été plus utile que la légalisation de la RU 486, affirme le Dr Chen. Des étudiants en université ont eux aussi déclaré aux journalistes que la cohabitation et l’avortement chez les étudiants étaient loin d’être inhabituels. C’est l’absence de valeurs morales qui provoque l’augmentation des avortements, disent-ils, réaffirmant qu’une véritable éducation sexuelle et une vraie connaissance des méthodes de contrôle des naissances seraient préférables au RU 486.