Eglises d'Asie

Papouasie occidentale : après les violences du mois d’octobre 2000, une commission d’enquête des Eglises chrétiennes demande au gouvernement d’assurer la sécurité des Papous

Publié le 18/03/2010




A Jayapura, le 27 janvier dernier, le responsable d’une commission d’enquête mise sur pied par les Eglises catholique et protestantes de la province et chargée de faire la lumière sur les incidents meurtriers de Wamena du mois d’octobre dernier (1) a appelé les autorités indonésiennes à instaurer un climat de paix dans cette région de la Papouasie occidentale afin que les membres des tribus papoues, réfugiés dans les forêts, puissent regagner leurs habitations. “Ils craignent de redescendre en ville, car les forces de sécurité poursuivent leurs recherches, fouillent les maisons à la recherche d’armes et des personnes qu’ils soupçonnent d’avoir pris part aux émeutes”, a expliqué le frère Yohanes Budi Hernawan, franciscain et président de cette commission d’enquête.

On se souvient que les journées du 6 et du 7 octobre 2000 avaient été marquées par de violentes émeutes, provoquant la mort de quelques dizaines de personnes après que les forces de l’ordre soient intervenues pour amener le drapeau des indépendantistes papous, le Bintang Kejora (‘l’Etoile du matin’) (2). Armés de flèches et de machettes, des indépendantistes papous, rendus furieux par cette intervention des autorités, s’en étaient pris aux migrants installés là mais originaires d’autres régions de l’archipel indonésien. Le chiffre total des victimes était resté à l’époque assez incertain, Wamena, ville du district de Jayawijaya, dans la vallée de Baliem, étant assez isolée à l’intérieur des terres montagneuses de cette province.

Selon les autorités de la province, 22 migrants et six Papous avaient été tués lors de ces incidents. Des milliers de migrants avaient trouvé refuge dans les bâtiments de la police et de l’armée. La commission d’enquête des Eglises chrétiennes corrige ce chiffre et estime que les émeutes ont fait 37 morts (dont 33 ont été identifiés) et 89 blessés. Parmi les morts, on compte au moins 7 Papous et les autorités locales auraient enterré 24 migrants dont les corps n’ont pas été réclamés par les familles. “Les corps ont été ensevelis dans deux fosses communes – l’une où reposent 13 victimes musulmanes et l’autre où se trouvent les corps de 11 victimes chrétiennes”, a ainsi déclaré frère Budi Hernawan, ajoutant que les recherches seraient poursuivies par la commission d’enquête car les morts pourraient être au total plus nombreux que ceux déjà répertoriés.

Sur les 83 personnes arrêtées en octobre 2000, 22 sont toujours détenues, soupçonnées par les autorités d’être des militants de la cause indépendantiste papoue, a encore précisé le président de cette commission d’enquête. Afin de faciliter le retour à une vie normale, il a appelé les forces de police et l’armée à respecter la loi et la justice et les autorités locales à rouvrir les écoles.

Formée de membres de la Commission ‘Justice et paix’ du diocèse catholique de Jayapura, de l’Agence pour l’aide juridique, de l’Institut pour la défense des droits de l’homme, de la Commission pour les personnes dis-parues et les victimes de violence, ainsi que de médecins, ce groupe d’enquête devrait rencontrer prochainement les autorités provinciales afin d’œuvrer en faveur de la réconciliation entre les différents groupes – migrants et Papous – de la région de Wamena. Un peu moins de deux tiers des 2,5 millions d’habitants de la Papouasie occidentale sont d’origine mélanésienne. Répartis entre plus de 250 tribus, ces Papous sont en grande partie chrétiens ; le ressentiment éprouvé par nombre d’entre eux face à l’installation de migrants – souvent musulmans – sur leurs terres nourrit le mouvement indépendantiste qui agite cette province depuis de nombreuses années.