Eglises d'Asie

Tout en se montrant favorable aux nouvelles orientations évoquées par la présidente Gloria Arroyo en matière de contrôle des naissances, l’Eglise catholique reste prudente

Publié le 18/03/2010




Sur le sujet sensible de la politique à mener en matière de contrôle des naissances, les nouvelles orientations que la présidente Gloria Arroyo a évoquées lors d’une conférence internationale sur la “santé reproductive” dans la région Asie-Pacifique ont été plutôt bien accueillie par les responsables de l’Eglise catholique. “Si l’administration Arroyo se montre prête à considérer la position de l’Eglise au sujet de la planification naturelle des naissances, fort bien”, a commenté, laconique, le 15 février, Mgr Orlando Quevedo, président de la Conférence des évêques catholiques des Philippines. Cependant, si des discussions avec le gouvernement sur ces sujets sont possibles, les évêques philippins se montrent prudents. “Par le passé, de semblables discussions ont mené nulle part du fait de nombreuses pressions extérieures – et, à une occasion au moins, nous estimons que nous avons été “utilisés” comme si le fait de discuter (avec les autorités gouvernementales) signifiait que l’Eglise approuvait les politiques menées (par ces mêmes autorités)”, a ajouté Mgr Quevedo (1).

Devant les délégués d’une vingtaine de pays, réunis à Manille du 15 au 19 février, Gloria Arroyo, ancienne secrétaire au Bien-être social, a déclaré que son gouvernement était “prêt à adopter de nouvelles techniques en matière de planning familial, techniques qui soient applicables dans le contexte social (des Philippines)”. Soulignant que des techniques naturelles fiables de contrôle des naissances ont été développées, elle a estimé que les programmes éducatifs en la matière devaient répondre aux évolutions de la société tout en préservant les valeurs culturelles et religieuses qui ont motivé, selon elle, les soulèvements populaires (‘People Power I et ) de février 1986 et de janvier 2001. Catholique pratiquante, la présidente Arroyo n’a pas fait explicitement état de sa foi religieuse mais a affirmé que la politique de son gouvernement était fondée sur “le développement responsable de la paternité et de la maternité”, lequel met l’accent sur la co-responsabilité de l’homme et de la femme quant au choix du nombre d’enfants et de l’espacement des naissances. “Après tout, s’est-elle exclamée, les hommes exercent une grande influence sur les décisions concernant la santé et les choix du moyen de régulation de la fertilité de leur épouse”.

Interrogé sur le discours de la présidente, Jomar Flores, président de la Reach Out Foundation, une ONG active dans le domaine du planning familial, a déclaré que la politique d’Arroyo était “très progressiste” mais qu’elle “pouvait très bien être remise en question par la forte influence de l’Eglise”. Selon lui, les gens qui ont porté au pouvoir Gloria Arroyo en janvier dernier étaient mus par des “motifs politiques et non par leurs convictions religieuses”. Jomar Flores estime encore que l’usage des méthodes naturelles relevait de l’idéalisme tant, aux Philippines, les hommes ne font pas preuve d’autocontrôle et les femmes se trouvent dans l’incapacité de prendre des décisions libres quant à leur fécondité.

Catholiques à 82 %, les Philippines comptent 75 millions d’habitants, avec un taux moyen d’accroissement annuel ces dernières années de 2,3 %. Selon les sondages menés par l’administration philippine, le taux de fécondité s’établit à 3,7 enfants par femme en âge de procréer, les femmes en milieu rural donnant naissance à deux fois plus d’enfants que celles vivant en ville. Les régions les plus pauvres (Eastern Visayas et Bicol, par exemple) connaissent des taux plus élevés – jusqu’à cinq enfants par femme. Au cours de ces trente dernières années, l’usage de moyens de contraception a été multiplié par trois, 47 % des femmes mariées déclarant utiliser ou avoir utilisé un tel moyen, sans qu’il soit précisé s’il s’agissait de méthodes naturelles ou artificielles.