Eglises d'Asie

Malgré les protestations de la communauté bénédictine de Thiên An, les autorités ne sont pas revenues sur leur décision de réquisitionner les terrains du monastère

Publié le 18/03/2010




Le 27 avril 2000, les religieux bénédictins du monastère de Thiên An, près de Huê, avaient appris de la bouche d’émissaires du Comité populaire du district de Huong Thuy, la nouvelle de la réquisition de 495 929 m² de terrain leur appartenant pour être loués au Service du tourisme de Huê. Celui-ci recevait la charge d’y construire un vaste centre de loisirs ouvert à la population. Les représentants des autorités officielles étaient venus lire devant la communauté religieuse la décision n° 1230/QD-TTg signée du chef du gouvernement le 24 décembre 1999, à savoir plus de quatre mois avant qu’elle ne soit portée à la connaissance des intéressés qui n’eurent même pas le loisir de consulter le texte, aucune copie ne leur ayant été remise (1).

A la suite de cette décision qui fit l’effet d’un coup de foudre au sein de la communauté, les religieux n’avaient pas ménagé leurs protestations, faisant valoir un droit de propriété indiscutable et un droit de gestion des terres (2) reconnu depuis le début par les autorités révolutionnaires. Au mois de mai 2000, un premier rapport avait été envoyé aux instances provinciales (3) par la communauté bénédictine. Celui-ci n’ayant pas reçu de réponse, une plainte officielle était envoyée au Premier ministre, lui exposant dans le détail toute l’affaire. L’ensemble du dossier avait été plus tard transmis à la commission d’enquête du service du cadastre. Quelque vingt jours plus tard, des employés de ce dernier service étaient venus sur place s’enquérir des papiers authentifiant les religieux comme propriétaires du terrain en question. Mais aucune suite réelle n’avait été donnée aux réclamations envoyées par les religieux aux autorités provinciales et nationales. Désespérant d’être entendus, les religieux rassemblèrent les divers documents concernant l’affaire dans un dossier qui, au mois de juillet 2000, fut diffusé dans le monde entier.

L’affaire en était là lorsque au mois de février dernier, deux employés du service des ponts et chaussées se sont présentés au monastère pour avertir les religieux qu’ils étaient chargés par le Service du tourisme d’ouvrir un chemin à travers les terrains du monastère. Ils interrogèrent les religieux pour savoir si ceux-ci avaient quelque objection contre cette entreprise. Ceux-ci leur firent savoir qu’ils avaient déjà exprimé leur entier désaccord sur le projet et qu’ils refusaient de livrer leurs terres et de recevoir un quelconque dédommagement financier. C’est donc en toute illégalité que les employés des ponts et chaussées accomplissaient leur mission dans le monastère. Après avoir écouté les moines, la petite équipe a, pendant trois jours, continué de dresser les plans de la route projetée sur le terrain du monastère.

Quelques temps plus tard, un nouveau dossier sur l’affaire était constitué afin de faire connaître à l’extérieur le dernier développement de cette affaire très grave. En dehors des procédures étranges employées par les autorités, l’ordre de réquisition des terres est en contradiction avec l’article 27 de la loi sur les terrains qui prévoit que les réquisitions de terrains ne peuvent avoir lieu que pour des objectifs concernant la défense nationale, la sécurité ou des intérêts nationaux ou publics, ce qui n’est pas le cas pour un centre de loisirs. Par ailleurs, si le projet gouvernemental aboutissait et que le Centre de loisirs était créé, l’existence sur les lieux d’une communauté monastique vivant de son travail, dans la prière et le silence, deviendrait plus que problématique.