Eglises d'Asie

Timor occidental : les conditions de vie dans les camps de réfugiés est-timorais se dégradent mais les milices pro-indonésiennes paraissent ne plus pouvoir agir aussi librement qu’auparavant

Publié le 18/03/2010




Selon le Service jésuite des réfugiés (Jesuit Refugee Service), les conditions de vie, tant au plan sanitaire, alimentaire que médical, se dégradent nettement dans les camps de réfugiés est-timorais au Timor occidental. Interrogé par téléphone depuis la ville de Kupang, chef-lieu de la province du Timor occidental, le P. Edi Mulyono fait état d’une épidémie meurtrière de dysenterie. D’autre part, alors qu’il est question que diverses ONG reviennent dans un proche avenir au Timor occidental pour venir en aide à ces réfugiés, il semble que la sécurité dans les camps commence à être mieux assurée. En effet, et toujours selon le P. Mulyono, les forces armées indonésiennes ne laisseraient désormais plus agir à leur guise les milices composées d’Est-Timorais hostiles à l’indépendance du Timor-Oriental qui contrôlent toujours les camps. Le P. Mulyono, jésuite, est le directeur de l’antenne du JRS sur place.

“Les gens meurent”, rapporte le P. Mulyono, qui ajoute : “La saison des pluies rend les camps boueux. Les infrastructures sanitaires sont insuffisantes. Il n’y a pas d’eau potable et la malnutrition est générale.” Dans le camp de Tuapukan, situé en périphérie de Kupang, des réfugiés décèdent de dysenterie et de vomissements. La première semaine d’avril, “nous avons retrouvé morts un garçon et une vieille femme. La semaine précédente, cinq personnes étaient décédées de cette épidémie”, pour-suit le prêtre jésuite, précisant que lui et son équipe de 22 personnes ne peuvent donner de statistiques précises et exhaustives. “Les camps sont énormes et nous ne pouvons intervenir dans tous”.

A part quelques organisations humanitaires locales ou composées d’Indonésiens, telles le JRS, peu de personnes viennent au secours de ces réfugiés, dont le nombre est estimé entre 50 et 100 000. Selon le P. Mulyono, les réfugiés n’ont pas reçu de riz entre début janvier et le 20 mars, date à laquelle les autorités indonésiennes locales en ont distribué 465 tonnes. Ces dernières disent ne pas disposer des ressources budgétaires nécessaires pour financer l’approvisionnement en nourriture des camps et mettent en avant le fait que le Timor occidental est une des provinces les plus pauvres du pays. Les agences de l’ONU et les ONG internationales ont plié bagages depuis le massacre par des miliciens est-timorais pro-indonésiens le 6 septembre dernier de trois employés du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (1). Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) vient de faire savoir au gouvernement indonésien qu’il fournira une aide financière et logistique jusqu’au 31 août 2001 mais qu’il ne renverra pas ses employés au Timor occidental.

Le 1er mars dernier, lors d’un entretien avec un attaché de défense néo-zélandais en visite dans les camps, Guilherme Maria dos Santos, chef d’un camp de réfugiés situé près d’Atambua, a déclaré que les ONG étrangères étaient à nouveau bienvenues dans les camps. Il a assuré que “le sanglant incident” du 6 septembre 2000 ne se reproduirait pas, tout en exhortant les ONG à faire preuve de neutralité dans l’aide apportée aux réfugiés. Interrogé par le militaire néo-zélandais quant à l’éventualité de son propre retour au Timor-Oriental, dos Santos a répondu qu’il était “un citoyen indonésien et un ancien fonctionnaire indonésien” et qu’il avait “décidé de rester un Indonésien”. Certains observateurs sur place notent cependant que les forces armées indonésiennes (TNI) ne laissent plus les milices intimider les réfugiés. Selon le P. Mulyono, le commandant local des TNI aurait même donné l’ordre aux soldats de tirer sur les miliciens qui empêcheraient des réfugiés de partir pour le Timor-Oriental.

Par ailleurs, la semaine dernière, une délégation de l’UNTAET (Autorité de transition des Nations Unies pour le Timor-Oriental) s’est rendue au Timor occidental afin d’y informer les réfugiés est-timorais de la situation prévalant au Timor-Oriental et de les encourager à y retourner. Ils ont distribué des vidéos décrivant les conditions de vie au Timor-Oriental et des tracts portant les messages publiés à l’occasion de Pâques par Mgr Belo et Mgr do Nascimento. Par ces messages, les évêques des diocèses de Dili et Baucau invitent les réfugiés au retour. Selon le P. Mulyono, une grande partie des réfugiés sont à même de faire la part des choses entre la propagande anti-indépendantiste des milices pro-indonésiennes et l’information objective ; cependant, ajoute-t-il, “nombreux sont ceux qui estiment que, dans l’éventualité d’un retour au Timor-Oriental, leur sécurité n’y est pas garantie – parce qu’ils ont pris parti contre l’indépendance ou bien parce qu’ils ont commis des crimes (dans les semaines qui ont suivi le référendum d’août 1999). Ils se sentent menacés ; ils ont peur que de nouveaux conflits éclatent et qu’ils soient contraints de fuir à nouveau (au Timor occidental) ». Toutefois, par un communiqué daté du 5 avril, l’Organisation internationale des migrations a révélé que plus de 2 600 réfugiés étaient rentrés au Timor-Oriental au mois de mars, ce qui est le chiffre le plus élevé pour un seul mois depuis que le HCR s’est retiré du Timor occidental, en septembre 1999.