Eglises d'Asie

Le décès de Mgr Paul Bui Chu Tao fait découvrir l’ampleur de son œuvre pastorale

Publié le 18/03/2010




Mgr Paul Bui Chu Tao, évêque de Phat Diêm, s’est éteint à l’âge de 92 ans dans la matinée du 5 mai 2001 à l’hôpital Viet-Duc de Hanoi où il avait été emmené quelques jours auparavant. Les funérailles ont eu lieu le 9 mai suivant. Comme à l’accoutumée dans le diocèse de Phat Diêm, où toutes les grandes occasions donnent lieu à d’immenses rassemblements, une véritable foule estimée à 20 000 personnes venant de toutes les paroisses de Phat Diêm et de diverses régions du pays est venue participer à la cérémonie. Celle-ci s’est déroulée en plein air sur l’esplanade faisant face à la plus célèbre des églises du Vietnam, la cathédrale de Phat Diêm, construite au XIXe siècle par un prêtre vietnamien, le P. Trân Luc. Concélébrée par 11 évêques et 121 prêtres, la messe était présidée par le successeur de Mgr Bui Chu Tao, Mgr Joseph Nguyên Van Yên. Avant la cérémonie, lecture a été faite des lettres de condoléances du cardinal secrétaire d’Etat, du cardinal-archevêque de Hanoi et du cardinal F. X Nguyên Van Thuân, ainsi que de la biographie officielle de l’évêque défunt.

Mgr Bui Chu Tao est né le 21 janvier 1909, dans la chrétienté de Tâm Châu dépendant alors de la paroisse de Phu Nhac. Il était l’aîné d’une famille de cinq enfants. Bien que destiné à vivre jusqu’à un âge avancé, il conservera toute sa vie l’apparence chétive et la santé fragile qui l’ont affecté dès son enfance. Son poids ne dépassera jamais les quarante kilos. Très jeune, à 10 ans, il fut confié par ses parents aux soins des prêtres des paroisses des environs, puis il reçut une formation le préparant directement au sacerdoce, au probatorium de Ba Lang (actuel diocèse de Thanh Hoa), au séminaire de Phuc Nhac, puis au grand séminaire de Thuong Kiêm. Ordonné prêtre en 1937 par Mgr Nguyên Ba Tong, le premier évêque local ordonné au Vietnam, il sera chargé d’enseignement au petit séminaire puis de la direction spirituelle du grand séminaire. Lorsque survient l’exode général de juillet 1954, quelque temps après les accords de Genève, un événement qui va ébranler le diocèse jusqu’à ses fondements, il est curé de sa paroisse natale de Tâm Châu. Selon des récits de témoins, le jour du départ, il vient paisiblement saluer avant leur embarquement pour le Sud-Vietnam, l’évêque du diocèse, Mgr Lê Huu Tu, la majorité de son clergé, des religieux, des séminaristes, les deux tiers des fidèles et leur fit part de son intention de rester sur place.

Le 30 novembre 1956, le Saint-Siège le nomme administrateur apostolique de Phat Diêm, lui confiant un diocèse sans évêque, qui désormais n’a plus que 50 000 fidèles sur 110 000, 34 prêtres sur 159 et 34 religieuses sur quelques centaines. Dès cette époque, il essaiera de donner une nouvelle impulsion à la vie chrétienne d’un diocèse fortement secoué par l’épisode de l’exode. Il réorganise la retraite des prêtres, essaie de regrouper les aspirants au sacerdoce dans le grand séminaire. Mais celui-ci, comme tous les établissements du même type au Nord-Vietnam, ne va pas tarder à être fermé par les nouvelles autorités. Les séminaristes envoyés à Hanoi pour y continuer leurs études n’y resteront que quelques années, le grand séminaire de Hanoi subissant le même sort que tous les autres. Le nouvel administrateur apostolique se préoccupe également de recruter et de former des religieuses pour la Congrégation des amantes de la croix qui a perdu une grande partie de ses effectifs.

Nommé évêque en titre du diocèse au début de l’année 1959, il est consacré dans la plus grande discrétion par l’archevêque de Hanoi, Mgr Trinh Nhu Khuê, qui officie seul dans sa cathédrale. Pendant quarante ans jusqu’à sa retraite qui lui sera accordée en 1999, il rencontrera les plus grandes difficultés dans l’exercice de son épiscopat, surtout durant les premières années. Une partie d’entre elles proviennent de l’environnement politique de l’époque mais la plupart sont dues à sa santé. De bonne heure, la peur de laisser le diocèse sans pasteur le pousse à solliciter du Saint-Siège un évêque coadjuteur. Trois seront nommés successivement dont deux mourront avant lui, Mgr Lê Quy Thanh, consacré en 1964 et décédé en 1974, Mgr Nguyên Thiên Khuyên, consacré en 1977 et décédé en 1981. Le troisième, Mgr Joseph Nguyên Van Yên, consacré le 16 décembre 1988 est aujourd’hui l’évêque du diocèse.

Mgr Tao garda tout au long de ses quarante ans de ministère épiscopal les même soucis pastoraux qui l’avaient animé durant les premières années où il exerça la charge d’administrateur apostolique. Malgré les obstacles rencontrés, ses efforts ont porté des fruits. L’absence totale d’établissements de formation jusqu’à la fin des années 1980 ne l’a pas empêché d’ordonner 26 prêtres. A partir de 1989, il put enfin envoyer des séminaristes au grand séminaire de Hanoi, une moyenne de huit à chaque recrutement. Les effectifs des amantes de la croix ont augmenté et, surtout leurs activités se sont multipliées dans tout le diocèse. La vie chrétienne dans les paroisses a été profondément marquée par ses visites pastorales, ses très nombreuses lettres pastorales et ses diverses initiatives. La physionomie matérielle du diocèse a été également transformée par les années d’épiscopat de Mgr Tao. L’ouvrage du P. Luc Trân, la grande église de Phat Diêm, endommagée par la guerre a été restaurée, ainsi que des dizaines d’autres églises plus modestes.