Eglises d'Asie

L’étonnant développement des communautés religieuses féminines au Vietnam

Publié le 18/03/2010




Un article intitulé “Portrait de religieuses, aujourd’hui paru dans le supplément mensuel de Catholicisme et Nation (1), présente une analyse détaillée d’une des particularités les plus originales du catholicisme vietnamien aujourd’hui, à savoir l’étonnante croissance des congrégations religieuses féminines et la place de plus en plus importante occupée par elles dans la société du pays. Un chiffre illustre cette importance : au mois d’octobre 2000, 9 986 religieuses étaient recensées au Vietnam selon les statistiques publiées d’abord par la Conférence épiscopale et ensuite par le Saint-Siège. Si l’on rapporte ce chiffre à la population catholique du pays qui compte 5 250 354 fidèles, la proportion de religieuses s’établit à 0,019/1000, très loin en avant de la proportion commune pour toute l’Eglise catholique dans le monde qui est seulement de 0,008/1000.

Alors que, durant la décennie écoulée, dans la plupart des pays occidentaux, le nombre des religieuses n’a cessé de reculer et que pour certains pays, il n’y a pratiquement plus de recrutement, le phénomène inverse s’est produit au Vietnam. Pour cette même période et surtout pendant les cinq dernières années, la progression n’a pas cessé de s’y faire sentir. Vers 1974, il y avait à Saigon 2 540 religieux et religieuses. Ce chiffre est aujourd’hui de 3 419. Pour mesurer pleinement ce que représente cet accroissement, il faut se rappeler que, pendant plus de dix ans, après le changement de régime de 1975, le recrutement dans les diverses congrégations a été pratiquement impossible. Au cours des dix dernières années, c’est sans doute au Nord-Vietnam que les effectifs de religieuses se sont le plus développés, après une stagnation qui avait commencé dès la fin des années cinquante et s’est prolongée jusqu’à la fin des années 1980. Dans le diocèse de Hanoi, selon l’annuaire pontifical, le nombre des religieuses qui était de 120 en 1995 est passé à 247 actuellement. Cette progression est également importante dans les provinces du Centre-Vietnam. Pour le diocèse de Huê au cours de ces mêmes cinq dernières années, le nombre des religieuses est passé de 386 à 505.

Si l’on essaie de dresser un tableau statistique de l’implantation des communautés religieuses dans l’ensemble des 25 diocèses du Vietnam, on constate que, sans doute pour des raisons historiques, elles se sont surtout concentrées dans le sud. Les deux grands diocèses du Sud, à savoir Hô Chi Minh-Ville et Xuân Lôc, arrivent en tête pour le nombre de religieuses. Le premier diocèse en accueille 2 674, le second 1 588. Viennent ensuite les diocèses de Dalat, Vinh Long, Can Tho, Phan Thiêt. Suivent les diocèses du Centre, puis ceux du Nord où Bui Chu est le plus riche avec 412 religieuses.

L’auteur de l’article met en relief la très bonne santé des congrégations locales créées ou implantées dès le début de l’évangélisation du Vietnam au XVIIe siècle, à savoir les amantes de la croix et les dominicaines. Lors du synode sur la vie religieuse de 1994 à Rome, sœur Nguyên Thi Thanh, la responsable des amantes de la croix de Go Vâp, avait présenté à l’assemblée des évêques les 22 congrégations d’amantes de la croix présentes sur tout le territoire du Vietnam. Les professes et les novices y étaient au nombre de 3 561, dont 53 % n’avaient pas atteint l’âge de cinquante ans. A ce chiffre, il fallait ajouter les 2 291 jeunes filles en formation à divers niveaux. Depuis 1994, ces chiffres ont encore augmenté. Il y aujourd’hui 1 000 professes et novices de plus et quelques centaines de jeunes filles en formation supplémentaire. Le même développement se vérifie chez les dominicaines et toutes les autres congrégations en activité dans le pays.

Peut-être plus étonnante encore que la progression des vocations des communautés religieuses féminines est la place acquise par elles au sein de la société vietnamienne, la sympathie et le respect qu’elles y suscitent. Un sondage effectué en septembre 2000 par la revue Catholicisme et Nation, sur un échantillon de jeunes de 18 à 30 ans d’un certain nombre de provinces du Vietnam a donné des résultats significatifs. 81,5 % des personnes interrogées y répondaient que les vocations religieuses féminines étaient plus nécessaires pour l’action sociale que pour la pastorale des paroisses. Les jeunes se montraient désireux de les voir s’engager encore davantage dans les diverses taches sociales. Aussi bien, les religieuses vietnamiennes élargissent de plus en plus leur champ d’action sociale. Aux orphelinats, maisons pour handicapés, léproseries, dispensaires divers se sont ajoutés depuis peu les classes maternelles, les “classes d’affection” pour ceux qui sont rejetés par l’éducation nationale, les foyers d’élèves et d’étudiants. Beaucoup de communautés cherchent aujourd’hui à étendre leurs activités dans les campagnes où, avec l’aide de diverses ONG, elles mettent en place divers programmes de crédit pour les paysans pauvres.