Eglises d'Asie

Le 9ème Congrès du Parti communiste, tirant les leçons des troubles des Hauts-Plateaux, modifie le texte primitif du rapport politique relatif à la religion

Publié le 18/03/2010




Contrairement au rapport politique du huitième Congrès qui s’était abstenu de s’exprimer sur ce sujet, le projet de rapport du 9ème Congrès du Parti communiste, paru en janvier 2001, avait repris une coutume ancienne consistant à exposer la ligne politique du Parti en matière de religion dans le cadre du chapitre concernant “l’union du peuple tout entier Après une affirmation issue d’une évolution récente de la doctrine religieuse du parti, à savoir que les croyances et les religions constituent le besoin spirituel d’une grande partie du peuple, il était affirmé que la politique religieuse du Parti restait inchangée, garantissait l’égalité de tous les citoyens, la liberté d’adhérer à une religion ou de ne pas y adhérer. Puis, il était absolument prohibé d’utiliser les croyances religieuses de la religion “à l’encontre de la loi et de la politique de l’Etat” (1). Cette dernière injonction a été quelque peu modifiée dans la version définitive adoptée lors du 9ème Congrès (19-22 avril 2001), en fonction des troubles survenus sur les Hauts-Plateaux du Centre Vietnam, au début de février. La phrase est devenue : “Il est absolument interdit d’abuser des questions d’ethnies, de croyances et de religions pour entreprendre des activités à l’encontre de la loi et de la politique de l’Etat, exciter la division du peuple, la séparation des ethnies.”

Par ailleurs dans le projet de janvier, comme dans la version définitive, une allusion avait été faite à la dégradation des valeurs culturelles et morales de la société dans les cinq dernières années écoulées, une dégradation attribuée en partie, par les rédacteurs du rapport “aux pratiques superstitieuses et aux mœurs désuètes, qui auraient repris de plus belle Or, de très précieux éclaircissements ont été donnés sur les intentions ayant présidé à cette remarque critique, lors d’une intervention spéciale sur ce sujet qui a eu lieu le 20 avril, en plein déroulement du congrès. L’orateur a été montré à la télévision au cours de son exposé. Le texte publié par la presse officielle a été d’autant plus remarqué qu’il n’a pas pour auteur un membre du Bureau des Affaires religieuses (2), mais M. Dang Huu, chef du département du Parti pour les sciences et l’éducation (3).

Le responsable communiste, dans son exposé, a mis l’accent sur le développement inquiétant des pratiques superstitieuses et rétrogrades ainsi que des cultes illégaux introduits dans le pays par des prédicateurs appartenant à des sectes. Il a fait état d’études menées par les instituts de recherche qui, toutes, illustrent l’ampleur du phénomène. Sur les Hauts-Plateaux comme dans la plaine, dans les régions aussi bien urbaines que rurales, partout, on travaille à répandre la superstition et à diffuser ce type de cultes. Un peu partout sévissent de nombreuses personnes se prétendant investies de pouvoirs extraordinaires, accomplissant de prétendus miracles ou encore se disant les incarnations d’êtres spirituels.

Le responsable communiste a classé ces nouveaux “phénomènes religieux” en deux catégories : les cultes issus par scission d’une religion traditionnelle, et les mouvements lancés par un seul individu, destinés à rassembler une masse de croyants. Parmi ces cultes, Dang Huu a cité, les Assemblées de Dieu, les Témoins de Jehovah, les Mormons, un culte du jugement dernier, connu sous le nom de Religion de Vang Chu, qui a intégré des croyances traditionnelles de l’ethnie h’mong, enfin, un mouvement religieux introduit tout récemment, que Dang Huu appelle le protestantisme Dega (4), accusé d’être à l’origine des troubles de février sur les Hauts-Plateaux. Ces groupes religieux auraient créé des doctrines syncrétistes mélangeant des éléments issus de différentes religions, associant des phénomènes quasi religieux à des éléments scientifiques présentés de façon à faire illusion.

Le responsable communiste a également souligné que le Vietnam était en train de vivre une époque de regain du sentiment religieux. Après la guerre durant laquelle elle avait été reléguée en marge, la religion a connu un renouveau d’activités au cours des années suivantes grâce aux conditions devenues plus favorables. Ce renouveau s’est manifesté par la création de maisons des ancêtres, la rénovation des tombes parentales, la restauration des autels des ancêtres. La population a remis en usage les anciennes fêtes folkloriques villageoises, entrepris la réparation des maisons communes, des pagodes, des temples, des sanctuaires consacrés aux héros nationaux. A ce réveil de la vie religieuse au sein de la population, aurait correspondu un effort du Parti communiste pour aller à la rencontre de ces besoins religieux. Ces derniers temps, les responsables de la politique religieuse du Parti ont souvent souligné que les croyances religieuses étaient un besoin spirituel d’une partie de la population. Ils ont même affirmé, ce qui est relativement nouveau, que la morale religieuse comportait des éléments compatibles avec le régime socialiste.

L’exposé du chef de la Commission des sciences et de l’éducation ne débouche guère sur la pratique réelle et ne laisse pas deviner quelle sera l’attitude des autorités locales à l’égard de cette efflorescence de nouveaux cultes et religions non reconnues. L’analyse présentée n’est pas assez rigoureuse pour permettre de distinguer clairement ces cultes dits superstitieux des huit religions reconnues jusqu’à présent.