Eglises d'Asie

Réagissant à la nouvelle prise d’otages menée par le groupe Abu Sayyaf, l’évêque catholique de Jolo appelle à un renforcement des capacités opérationnelles des forces armées philippines

Publié le 18/03/2010




Réagissant à la nouvelle prise d’otages menée par le groupe Abu Sayyaf, Mgr Angelito Lampon, omi, évêque du vicariat apostolique de Jolo, où se trouvent les bases de ce groupe rebelle, a déclaré que le gouvernement avait le devoir de renforcer les capacités opérationnelles de ses forces armées afin d’assurer la protection des populations innocentes. Tout en affirmant que “la vie est la vie” et qu'”elle est précieuse”, qu’il s’agisse d’étrangers ou de Philippins, Mgr Lampon a mis en garde contre le fait que les prises d’otages continueront tant que le gouvernement ne se donnera pas les moyens d’y mettre fin. Selon lui, après l’enlèvement des otages le 27 mai, les militaires ont été pendant deux jours dans l’incapacité de localiser les ravisseurs et leurs otages. Ces deux jours ont été deux jours “trop longs” alors que, par mer, les ravisseurs ont eu au moins besoin de 24 heures pour rallier Palawan à l’île de Jolo où ils auraient été repérés. Un meilleur équipement des forces armées aurait sans doute pu permettre une opération “rapide” d’interception, estime l’évêque.

Depuis le 27 mai, vingt otages ont été enlevés dans la station balnéaire de Dos Palmas, sur la façade est de l’île de Palawan. Ils sont retenus par le groupe musulman Abu Sayyaf. Outre dix-sept Philippins (dont treize sino-philippins), se trouvent trois ressortissants américains : un amateur de plongée, Guillermo Sobero, et un couple de missionnaires protestants qui fêtaient là un anniversaire de mariage. Martin Burnham, 41 ans, et sa femme, Gracia Jones Burnham, originaires du Kansas, appartiennent à la Nouvelle mission chrétienne pour les aborigènes, une communauté protestante dont le siège se trouve à Sanford, en Floride (Etats-Unis) ; ils étaient en mission aux Philippines depuis 1986. Dans une émission radiodiffusée à Mindanao, Martin Burnham a déclaré que les otages étaient sains et saufs et qu’ils souhaitaient que “toutes les autorités se montrent raisonnables et mènent des négociations rapides”.

Le 28 mai, à la télévision nationale, la présidente Gloria Macapagal-Arroyo s’est montrée catégorique sur le fait qu’aucune rançon ne serait payée, tout en annonçant qu’une forte récompense serait offerte en échange d’informations permettant d’arrêter ces “bandits”. Elle a aussi affirmé que les ravisseurs seraient poursuivis jusqu’à leur “élimination” complète. Afin d’éviter que se reproduise le scénario de l’an dernier où l’intervention des médias philippins et étrangers avait singulièrement compliqué et amplifié la précédente prise d’otages menée par le même groupe Abu Sayyaf, la présidente a demandé aux responsables des médias de respecter un black-out complet sur les opérations menées dans la région. Ce à quoi un porte-parole des ravisseurs, Abu Sabaya, a répliqué sur une radio locale à Mindanao que “Manille devait s’attendre à un massacre”. Selon certaines informations, Khadafi Janjalani, frère du fondateur du groupe Abu Sayyaf, connu pour son animosité envers les chrétiens, détiendrait au moins une partie des otages.

On se souvient que les négociations pour libérer les 21 touristes – dont plusieurs occidentaux – pris en otages sur l’îlot de Sipadan, en Malaisie, puis transportés par le groupe Abu Sayyaf sur l’île de Jolo, avaient duré plus de quatre mois (1). Diverses factions de la nébuleuse Abu Sayyaf avaient empoché plusieurs millions de dollars, l’enlèvement ayant pris les proportions d’une crise internationale où la France, l’Allemagne et la Libye se trouvèrent mêlés. L’un des Philippins pris à l’époque en otage n’a toujours pas été libéré. En avril-mai 2000, l’opération militaire lancée pour libérer une cinquantaine d’autres otages retenus sur l’île de Basilan s’était soldée par cinq morts – dont le P. Rhoel Gallardo (2).