Eglises d'Asie

A Basilan, où le groupe Abu Sayyaf retient en otages 29 personnes, le gouverneur appelle à l’union de tous contre les preneurs d’otages

Publié le 18/03/2010




Tandis que les opérations militaires se poursuivaient pour tenter de localiser et de libérer les 29 personnes que le groupe Abu Sayyaf retient en otages depuis deux semaines (1) et qu’une certaine confusion régnait quant au sort réservé à ces otages, Wahab Akbar, gouverneur de Basilan, a, lors d’une réunion de la cellule de crise chargée de gérer cette prise d’otages, appelé tous les dirigeants civils et religieux de l’île à s’unir derrière les militaires pour amener les membres d’Abu Sayyaf à se rendre. Les responsables de la prélature d’Isabela, dont le territoire s’étend sur toute l’île de Basilan, tentent pour leur part de contacter les prêtres et les religieuses de l’île et sont dans l’incertitude au sujet d’au moins un prêtre et de trois religieuses.

Le groupe Abu Sayyaf, après avoir mené un raid sur une station balnéaire de Palawan le 27 mai dernier et enlevé 20 personnes dont trois Américains, a pris d’assaut la paroisse de Saint Pierre-Apôtre, située à Lamitan, au nord-ouest de l’île. Lors des combats qui ont opposé les hommes d’Abu Sayyaf aux forces armées, l’église paroissiale a été en grande partie détruite, des hélicoptères de l’armée ayant fait feu sur le clocher où étaient embusqués des tireurs d’Abu Sayyaf. Selon le P. Martin Jumoad, le groupe terroriste, en s’enfuyant, aurait pris en otages sept infirmières et le curé de la paroisse, le P. Cirilo Nacorda. Agé de 43 ans, le P. Nacorda a déjà vécu une prise d’otages du groupe Abu Sayyaf : kidnappé en 1994 avec 36 autres chrétiens, il ne fut libéré, à la faveur d’une opération militaire, que deux mois plus tard, dernier des otages à recouvrer le liberté après l’exécution par les terroristes islamistes de 16 des otages. Le P. Jumoad a également précisé qu’il était sans nouvelles de trois religieuses, dominicaines missionnaires, dont le couvent est situé près de l’hôpital de Lamitan où les hommes d’Abu Sayyaf s’étaient introduits. Le 11 juin, des hommes d’Abu Sayyaf ont pris d’assaut une plantation à Lantawan d’où ils sont repartis avec 15 enfants et adultes, sans doute catholiques pour certains d’entre eux, après avoir incendié cinq habitations et une chapelle catholique.

Le relief de cette île étant accidenté, les communications ne sont pas aisées. Le P. Jumoad a néanmoins pu joindre par radio ou téléphone une partie des prêtres et des religieuses de la prélature. Tous ont accepté de ne se rendre dans les églises que pour y donner ou recevoir les sacrements mais de ne pas y demeurer afin de ne pas offrir de proies faciles aux hommes d’Abu Sayyaf. Sur les 270 000 habitants de l’île de Basilan, 31 % sont catholiques. La prélature d’Isabela attend la nomination d’un successeur à Mgr Romulo de la Cruz, que le groupe Abu Sayyaf avait menacé de décapiter après qu’il eut co-présidé, l’an dernier, le comité de crise mis en place lors de la prise d’otages de 50 enfants d’une école, de leurs professeurs et du P. Rhoel Gallardo, responsable de cette école de Tumahubong. Cinq enseignants avaient été tués (dont deux décapités) et le P. Gallardo assassiné (2). Depuis, Mgr Romulo de la Cruz, pour sa sécurité, a été placé à la tête du diocèse de San Jose de Antique, situé au centre de l’archipel philippin (3).

Abu Sabaya, chef du groupe Abu Sayyaf sur l’île de Basilan, a par ailleurs fait savoir qu’il décapiterait les oulémas, docteurs de la loi musulmane, qui “se laisseraient utiliser par le gouvernement”. “Ils [les oulémas] sont censés être le fer de lance de notre lutte. Aujourd’hui, ils soutiennent ces kafir’ (incroyants) », a-t-il ajouté le 12 juin sur Radio Mindanao Network, en réponse à plusieurs responsables musulmans qui ont appelé publiquement Abu Sayyaf à relâcher les otages, arguant du fait que le Coran enseigne que l’enlèvement est contraire à l’enseignement de l’islam.